
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Avec un projet de démolition de logements dans le but de réaliser la construction d’un « complexe santé » à Rivière-du-Loup, poussant les citoyen·nes à se mobiliser. Un projet à Pointe-Au-Père consistant à vendre à des promoteurs des espaces verts et humide par la ville de Rimouski pour construire des logements. Et bien d’autres exemples qui montrent qu’en région, la ville ne semble pas appartenir aux citoyen.nes qui l’habitent.
Ces projets ayant pour but de résoudre des problématiques sociétales se situent dans une rationalité capitaliste, passant par une résolution se limitant à une logique d’urbanisation et de planification de l’espace (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 69). Cette logique se base principalement sur la production d’une plus-value sur les résolutions de problématiques. L’espace de vie citoyen devient alors une production d’espace avec rentabilité.
L’espace de vie comme marchandise
En effet, actuellement la reproduction du capital rencontre une crise, reproduire l’espace de vie par sa marchandisation par le pouvoir urbain devient un nouveau moyen pour accumuler du nouveau capital.
Cette logique d’urbanisation rentable entraine un accroissement du mode de production et un contrôle des forces sociales oppositaires au pouvoir politique l’utilisant. De ce fait, le capitalisme structure littéralement notre quotidien, le transformant en un monde régi par la marchandise (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 70).
Le pouvoir politique est un acteur qui collabore avec cette logique d’accumulation de capital par la restructuration et la gestion des relations sociales par l’urbanisation et la planification de l’espace.
De ce fait, on assiste clairement à une soumission de la ville aux exigences du capital privé. Par exemple, c’est vendre des terrains municipaux à des promoteurs privés, qui vont donc structurer l’espace quotidien sans que les citoyen.nes ne puissent agir sur l’agencement de leur lieu de vie quotidienne (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 72).
« Les conséquences réelles en sont visibles : sur le plan économique, c’est la propriété privée du sol urbain considérée comme marchandise reproductible ; sur le plan politique, c’est l’aménagement de l’espace qui structure en de profondes inégalités l’espace produit ; sur le plan social, c’est la production des espaces de ségrégation » (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 75).
La structure crée des inégalités sociales
En réalisant une coopération entre pouvoir politique et capital privé, les pratiques socio-spatiales sont effacées. Les frontières que crée l’urbanisation sont renforcées, et enferment les populations dans des espaces bien délimités et ségrégés.
Ce qui déclenche de nouveaux conflits entre les pratiques sociales que les citoyen.nes réalisaient et le nouvel ordre instauré par l’urbanisation. Par exemple, le conflit entre appropriation et domination de l’espace ; entre espace public et espace privé ; entre augmentation des possibilités de communication entre espaces et personnes, et dilution des liens de sociabilité ou encore entre droit à l’appropriation de la ville et droit à la consommation d’équipements collectifs dans la ville (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 76).
En raison de la structure urbaine centrée sur la marchandise, des inégalités socio-spatiales apparaissent inexorablement. Elles s’expriment par l’opposition entre les centres urbains et les périphéries à travers les ressources disponibles et accessibles. La concentration de richesses est alors située sur l’un des pôles, régissant ainsi l’accès au logement et à tous les services qui lui sont associés, comme les équipements sociaux, les infrastructures, les espaces de loisirs, les espaces publics, etc.
Le choix de la croissance économique est alors préféré à celui du développement social.
Agir sur la structuration
Pour récupérer la structuration de la ville, lui donnant un autre visage que celui de la marchandisation, les mouvements sociaux sont de précieux moteurs de changements qui arrivent à mettre en échecs des projets répétant ces schémas d’inégalité.
La lutte que mènent ces mouvements sociaux et citoyen.nes produit un refus de laisser uniquement une force étatique à gérer nos vies quotidiennes, qui consiste juste à nous inclure à l’univers de la consommation en restructurant nos espaces pour qu’ils soient productifs (Ana Fani Alessandri, 2012, p. 78).
C’est pourquoi la seule consultation citoyenne ne suffit pas pour intégrer pleinement la population. Les forces étatiques doivent construire en fonction des intérêts des citoyen.nes, et non prioriser une logique marchande.
Sources
Ana Fani Alessandri Carlos, « Le droit à la ville comme projet de nouvelle société », L’Homme & la Société 2012/3 (n° 185-186), pages 65 à 81.