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DE L’AUTRE CÔTÉ DU BLIZZARD

Par Jeanne Landry le 2021/11
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DE L’AUTRE CÔTÉ DU BLIZZARD

Par Jeanne Landry le 2021/11

Dans sa bande dessinée autobiographique Vers la tempête, le bédéiste rimouskois Jean-Sébastien Bérubé retourne en 2007, année où il rentre à Rimouski, de retour du Tibet. À cette époque, deux grandes passions animent Jean-Sébastien : sa carrière de bédéiste qu’il veut faire décoller, avec son projet sur Radisson, et ses cours de karaté kyokushin dans lesquels il espère obtenir sa ceinture noire. Mais sa famille, particulièrement son grand-père, ne le soutient ni dans l’un ni dans l’autre de ces projets. Il devra naviguer à travers des relations difficiles avec son grand-père, ses parents, mais aussi avec sa colocataire pour qui il développe des sentiments qu’elle ne semble pas partager. Sur les conseils de sa mère, il commencera une thérapie dans le but de mettre fin au malaise généralisé qui le ronge, d’autant plus que l’ombre de la mort plane : son professeur de karaté est atteint d’un cancer incurable. Cette tension éveillera une nouvelle rage de vivre chez Jean-Sébastien qui apprendra à s’affirmer et à chercher le bonheur là où il le croit, et non là où ses proches le dirigent.

En plus d’être rythmée par de dynamiques combats de karaté, cette œuvre est traversée par une profonde réflexion sur la question de la santé mentale et la force d’arriver à demander de l’aide. La violence physique comme psychologique est l’un des thèmes majeurs de l’œuvre, comme quoi la vie rend tout aussi bien, parfois mieux, les coups que les adversaires sur le tapis. Bérubé montre une grande maturité et une honnêteté touchante dans toutes les facettes de cet ouvrage. S’y trouve aussi beaucoup d’amour : celui qu’il éprouve pour le karaté, pour la bande dessinée elle-même et même pour ses proches, malgré qu’ils le fassent souffrir, parce qu’il réalise que lui aussi peut être ou non à l’origine de la souffrance de ceux qu’il aime. Bérubé nous montre avec bienveillance comment cet amour rend la blessure si profonde.

À travers les dialogues, d’une simplicité désarmante, résonne l’écho du vrai. Grâce à eux, on se sent proche de personnages qui ne sonnent jamais faux. On apprécie aussi la lumière des illustrations : Bérubé exploite à merveille les contrastes entre le blanc de la page et le gris de son crayon. Les mouvements du corps, sublimés dans les passages sur le karaté, sonnent aussi vrai que les dialogues. Le récit est fluide, rythmé par les magnifiques paysages de Rimouski.

La tempête du titre, c’est bien plus que la tempête de neige dont Rimouski a l’habitude l’hiver venu. C’est surtout celle que Jean-Sébastien devra traverser pour ressortir plus fort, grâce à sa persévérance et à l’amour qu’il apprendra à éprouver pour lui-même.

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