
La Déclaration universelle des droits de l’homme autorise les personnes à voyager partout dans le monde sans restrictions (art. 13) et, par défaut, de se considérer comme des citoyens et des citoyennes du monde. Certains articles de ladite convention reconnaissent les limites territoriales des nations ainsi que l’indépendance et la souveraineté de chaque pays, mais la convention promeut la libre circulation.
Par ailleurs, chaque nation a un développement économique différent, rendant les unes puissantes, voire très puissantes, et les autres pauvres, voire très pauvres. Cette position ou situation de puissance fait en sorte que le va-et-vient libre prôné par la Déclaration se voit imposer plusieurs restrictions et critères. Les puissants et très puissants peuvent se déplacer entre eux, aller comme bon leur semble dans les nations pauvres et très pauvres, mais l’inverse ne se produit guère. Les puissants prétendent aller aider les pauvres à devenir riches, or en réalité, c’est pour les appauvrir davantage par le pillage de leurs ressources naturelles qui fait la prospérité de ces nations riches. Les grandes puissances instrumentalisent des guerres civiles, bouleversent la démocratie qu’elles prétendent vouloir imposer en maintenant au pouvoir certains dictateurs qui protègent leurs intérêts et en chassant ceux qui ne jouent pas leur jeu par des coups d’État et des supposées manifestations populaires. Ce comportement égoïste a créé un monde bipolaire : une partie riche, calme, paisible et vivable, et une autre qui est tout le contraire : appauvrie, agitée, en guerre et invivable.
Ces conditions ont inévitablement poussé certaines populations de la partie du monde marginalisée à se déplacer pour aller bénéficier de ce qui provient de leur sous-sol, mais qui est transformé ailleurs : ce qui est tout à fait normal et justifié pour les peuples pillés. D’ailleurs, tous ceux qui veulent migrer dans des pays calmes ne sont pas forcément des personnes pauvres, car ces déplacements coûtent parfois des fortunes, qu’ils soient faits de façon clandestine et irrégulière ou de manière bien légale et régulière.
Imaginons une personne (voire une petite famille) qui vit paisiblement et dans d’excellentes conditions dans son pays. Un jour, le pays sombre dans une guerre imposée par l’extérieur au nom de ce fameux mot « démocratie », comme en Libye par exemple. Que voulez-vous que cette personne fasse? Rester et mourir? Voilà un exemple, parmi tant d’autres, que toute la communauté humaine connaît, que les grandes puissances maîtrisent bien et font semblant d’ignorer… Il en résulte que la démocratie est indûment utilisée par les grandes puissances pour faire plutôt du mal ailleurs et du bien dans leur pays.
Au-delà de toutes ces considérations, si les populations du « Sud » et celles de « l’Est lointain asiatique » parviennent à mettre leurs pieds dans les pays puissants, elles sont taxées de pilleurs d’emplois, des gens qui « polluent » leur société, bref, elles sont systématiquement traitées de tous les noms d’oiseaux. Or en réalité, ces gens travaillent comme des fous pour payer leurs factures, joindre les deux bouts et contribuer au développement de leur pays d’accueil en payant taxes et impôts. Il est clair que les personnes du « Sud » et de « l’Est lointain asiatique » ne jouissent pas des mêmes prérogatives salariales que leurs collègues, car les diplômes obtenus dans ces régions sont moins valorisés. De plus, le système de discrimination salariale est ancré dans la pratique des pays émergents vis-à-vis des femmes (de ces pays) et des immigrés. Ces derniers subissent une discrimination qu’ils sont obligés d’accepter, car il leur faut obligatoirement une référence et une expérience locale de travail pour se voir offrir une nouvelle opportunité.
En définitive, la migration telle que les grandes puissances la conçoivent est une ruine des cultures. Elle est organisée de manière à ce que les migrants soient dépouillés de leur valeur culturelle, car ils doivent s’approprier la culture du pays d’accueil. La migration vers les pays du Nord dévalorise de nos jours les gens qui arrivent : un médecin devient chauffeur de taxi, un ingénieur informatique devient préposé aux bénéficiaires, un enseignant devient commis d’épicerie… Or ces professions reposent sur des formations aux normes internationales, il suffirait de les réadapter à des normes locales par le biais d’une courte session de recyclage. Mais bon, on peut comprendre que l’universalité des programmes d’études ne concerne pas les universités du Sud qui sont toujours marginalisées. Dans toutes ces situations, il serait équitable de considérer tout le monde sur un pied d’égalité, sans tenir compte de leur provenance ni de leur origine.
*L’auteur a migré vers Rimouski en décembre 2018. Originaire de Centrafrique, il a d’abord été admis au Congo comme réfugié pendant plusieurs années avant d’être admis au Canada avec le même statut.