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À quoi rêves-tu?

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À quoi rêves-tu?

À quoi rêves-tu? Qu’est-ce que tu veux? Des questions que je me pose depuis longtemps, et qui teintent certaines de mes conversations.

Je rêve de voyager, de grandir au contact de l’autre et de contribuer. Pragmatique que je suis, il m’a fallu choisir un métier : physiothérapeute.

La physiothérapie est une profession passionnante et généreuse, qui me permet d’accompagner l’autre et souvent de toucher des communautés moins bien desservies en termes de soins. Au cours des dernières années, j’ai tracé mon chemin vers le travail humanitaire et je me suis rendue jusqu’à… Bagdad.

Après plusieurs mois d’attente, en novembre 2018, j’ai reçu cette offre : œuvrer pendant six mois en tant que Physiotherapy Activity Manager (PAM) dans un centre de réadaptation de Médecins sans frontières (MSF) à Bagdad! Départ en janvier!! Oh! Un mélange d’excitation et d’anxiété soudaine m’a brièvement habi-tée… mais la décision a été prise rapidement, je partirais en janvier direction l’Irak!

Que connaissez-vous de l’Irak? Quelles images avez-vous en tête? Vous pourriez être surpris… Certaines régions de l’Irak sont notamment beaucoup plus modernes que je ne le pensais.

Comment se prépare-t-on à vivre une telle expérience?

Lire et respirer.

Comment réussit-on à vivre une telle expérience?

Respirer beaucoup.

Sous un soleil de plomb, je vis certainement une expérience des plus exigeantes, en termes d’acclimatation à un environnement qui manque parfois de douceur, d’adaptation à mes nouvelles tâches professionnelles, à mon équipe multiculturelle et au rythme qui nous entraîne toujours plus loin. Régulièrement, je me (nous) remets en question. Suis-je utile? Sommes-nous utiles? Le oui l’emporte : je suis convaincue de l’impact positif de notre présence sur chaque individu et chaque famille qui fréquentent le centre de réadaptation, mais aussi sur le système de santé national.

L’établissement a été mis sur pied par MSF après des années de violence. Sans ce centre, beaucoup d’Iraqiens n’auraient malheureusement pas accès à une réadaptation adéquate et essentielle, amputant la nation de la participation de centaines d’individus. Sans ce centre, de nombreux patients seraient incapables d’accomplir leur rôle familial, de retourner à l’école ou de travailler, un grand nombre étant littéralement cloués au lit. Le centre se préoccupe aussi de la santé mentale des patients, plusieurs portant toujours les séquelles des différentes guerres.

Quotidiennement, je rencontre de la résilience. Je pense entre autres à un patient ayant subi une amputation des jambes et qui, malgré tout, soutient moralement ses confrères; à un autre qui tente de reprendre vie après la torture lui ayant coûté une jambe; à un patient qui, tel un magicien, parvient à se déplacer avec un seul bras et une seule jambe; et, finalement, à celle qui habite un camp de réfugiés et qui a retrouvé la marche grâce au projet de MSF. Malgré des années violentes et un climat encore tendu, la population regarde ou essaie de regarder devant. Rien n’est gagné dans le berceau de l’humanité.

Le projet MSF soutient également le système de santé national, principalement par la transmission de connaissances. Malheureusement, les systèmes de santé et d’éducation ont particulièrement souffert des guerres, ce qui a eu un impact sur la qualité de la physiothérapie en Irak. Encore aujourd’hui, le système, marqué par le passé et par une corruption omniprésente, peine à se relever et à retrouver son prestige d’autrefois. Grâce au projet, nous avons la possibilité d’améliorer la formation en physiothérapie et d’ainsi assurer le rétablissement d’un plus grand nombre. En tant que PAM, mon rôle est, globalement, de soutenir une meilleure pratique de la physiothérapie et de travailler, en collaboration avec les Iraqiens, au développement du service pour répondre aux besoins de la population victime de traumas orthopédiques.

Quoique plutôt moderne et plus libre que celui de ses voisins, le quotidien à Bagdad est toujours marqué par des contrôles de sécurité serrés. La religion est également bien présente, agissant tel un ancrage pour apaiser le découragement ou la frustration passagère.

Vivre à Bagdad, c’est vivre avec un lourd passé sous l’enclume du radicalisme… puis espérer. Espérer que la culture iraqienne, riche, festive, généreuse et millénaire, sera reconnue et fera oublier la violence.

Aujourd’hui, je me demande encore… À quoi rêves-tu?

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