Le ciel étoilé fait partie intégrante du patrimoine mondial à préserver.
– Unesco, 1992
Jusqu’à tout récemment dans l’histoire de l’humanité, la nuit était éclairée par la Lune, illuminée par des lanternes ou des torches placées aux extrémités des rues. L’invention de la lumière électrique a tôt fait de remplacer ces installations par des équipements permanents de plus en plus nombreux et performants. Depuis, l’intensité et les besoins en éclairage n’ont fait qu’augmenter, créant ce qu’il y a lieu d’appeler« la pollution lumineuse ».
Au cours des dernières décennies, les observateurs notent une croissance exponentielle du phénomène de l’éclairage électrique dans les grands centres urbains comme dans les villages, les campagnes et en bordure du fleuve. Dans certains cas, il est devenu impossible d’observer le ciel sans être ébloui par un éclairage routier public ou privé mal orienté, d’intensité excessive et invasive.
La pollution lumineuse constitue une altération et une dégradation de l’état naturel de l’espace nocturne causées par une utilisation abusive de lumière artificielle. Elle entraîne un gaspillage d’énergie et d’argent, et génère des effets négatifs sur la faune, la flore et sur la santé humaine. Elle est également responsable du voilement du ciel et de la perte de l’expérience nocturne.
La lumière intrusive pénètre dans les maisons, envahit les terrains et les jardins et éclaire au-delà du nécessaire.
Éclairage et sécurité : un mythe tenace
Il n’existe aucune corrélation entre l’intensité de l’éclairage et la diminution des accidents routiers. De plus, une étude menée par le National Institute of Justice des États-Unis sur le crime et la violence montre que le lien entre clarté et sécurité est très faible. Une mauvaise utilisation de l’éclairage augmente plutôt la vulnérabilité en intensifiant le contraste entre lumières vives et zones obscures.
La vie a besoin de nuit
Saviez-vous que le Québec est l’un des endroits les plus éclairés de la planète? Chaque citoyen québécois émet en moyenne de 2 à 3 fois plus de lumière que ne le fait un Européen ou un Américain. Cet excès représente une dépense énergétique et une perte économique d’environ 45 millions de dollars annuellement. Cette mauvaise utilisation de l’éclairage représente une consommation excessive de CO2 ayant pour effet une surproduction de gaz à effet de serre.
La vie a besoin de nuit. Faut-il le rappeler? Les chercheurs s’entendent sur les conséquences négatives de l’éclairage artificiel sur les espèces végétales et animales qui ont besoin de noirceur pour se nourrir et pour se reproduire. L’augmentation de l’éclairage artificiel affecte l’intégrité des écosystèmes nocturnes et perturbe le métabolisme humain.
Des études montrent l’importance et la nécessité de la noirceur pour la régulation de notre horloge biologique. Certaines hormones et cellules du système immunitaire fonctionnent uniquement à la noirceur totale. Une étude menée par l’University of Connecticut Health Center affirme que le dérèglement de l’horloge interne causé par la lumière nocturne s’avère un facteur aggravant des risques de cancer du sein.
Lumière invasive et actualité
La pollution lumineuse est un sujet d’actualité. À l’échelle internationale, il y a clairement une volonté de conscientiser la population et les gouvernements à cette problématique.
- En 1988, l’International Dark-Sky Association (IDA) est créé. Cette association compte aujourd’hui 10 000 membres et 450 organismes répartis dans 70 pays.
- En 2000, le premier Atlas mondial des cartes de pollution lumineuse voit le jour. On y révèle, entre autres, qu’environ 97 % de la population nord-américaine et européenne vit sous un « ciel lumineusement pollué ».
- Les gouvernements de l’Australie, du Chili, de l’Italie, de la République tchèque et les États de l’Arizona, de la Californie, du Colorado, du Connecticut, du Maine, du Nouveau-Mexique et du Texas ont déjà adopté des lois réglementant l’éclairage urbain à des fins de protection du ciel nocturne et d’économie d’énergie.
Le Mont-Mégantic : réserve de ciel étoilé
En 2007, l’International Dark-Sky Association a remis une reconnaissance officielle au Mont-Mégantic. La région est devenue la première réserve de ciel étoilé au monde. Depuis, d’autres endroits en Europe et aux États-Unis ont obtenu cette reconnaissance qui attire de plus en plus de touristes observateurs de ciel, de Voie lactée et d’aurores boréales, à la recherche de contrées rares où la nuit est protégée.
À quand cette reconnaissance pour notre région aux couchers de soleil hors du commun et aux ciels nocturnes fabuleux sur lesquels il est possible de projeter nos rêves et ceux de nos enfants?