
La Belgique interdit le gaspillage alimentaire dans les supermarchés, la Norvège protège à la fois l’environnement et la santé économique de ses habitants avec un système de redevances sur l’exploitation du pétrole plus équitable, le nombre de voitures électriques connaît un bond significatif dans plusieurs pays d’Europe. Et, ici, au Canada, on fait quoi? On place encore le capital devant l’humain. Rien de nouveau, direz-vous. Mais devant ces exemples inspirants, il est difficile de ne pas être un peu jaloux. Il ne s’agit plus de simples vœux pieux ou d’idéalisme.
On apprenait récemment que chaque Norvégien est maintenant théoriquement millionnaire, grâce au fonds de pension mis en place en 1990 pour faire fructifier les dividendes de l’exploitation pétrolière. Le fonds souverain norvégien détient aujourd’hui 1 % environ de la capitalisation boursière mondiale. L’argent amassé doit servir à assurer la viabilité économique nationale lorsque la ressource sera tarie.
En fait, les Norvégiens ont adopté ce modèle fort intéressant il y a 40 ans, au moment même où ils découvraient le potentiel pétrolifère de leurs côtes. Et puisque ces richesses ne disparaîtraient pas du jour au lendemain, ils ont choisi de prendre leur temps et de ne pas précipiter l’exploitation de la ressource.
Il faut cependant dire que le pays n’avait pas besoin de l’argent du pétrole pour boucler son budget. Et surtout que la population désirait protéger l’environnement et le secteur des pêches, qui représente une activité économique très importante pour les régions côtières de la Norvège.
Voilà un gouvernement à l’écoute de ses citoyens et qui songe aux générations futures, pas seulement à la prochaine élection.
Que dire de certains élus belges qui viennent de légiférer sur le gaspillage alimentaire? Dorénavant, les supermarchés de plusieurs villes et villages doivent obligatoirement donner les produits moins frais, moins beaux, sur le point d’être périmés ou simplement invendus à des organismes d’aide aux moins nantis. En Belgique, ce sont 200 000 personnes qui bénéficient de l’aide alimentaire, alors que normalement 15 kg de nourriture par personne par an sont jetés, soit l’équivalent de trois repas par jour pour 30 000 personnes durant un an. Un député belge du parlement européen a d’ailleurs demandé à la Commission européenne de se pencher sur la question et de tenter d’appliquer le modèle à plus grande échelle.
Pour une fois, ne pourrions-nous pas jouer les « moutons blancs » et tenter de s’inspirer de ces politiques? Pourquoi toujours céder aux pressions des grands groupes financiers et des grandes entreprises? Il ne s’agit pas de cracher inopinément sur le modèle capitaliste, mais de tenter d’en adapter les règles au profit d’un plus grand nombre. Et les Norvégiens ont bien prouvé qu’on peut accommoder les pétrolières en respectant l’environnement et en partageant les profits.
On ne peut pas se mettre la tête dans le sable, ce n’est pas demain qu’on pourra se passer du pétrole. Plus il sera rare, plus il vaudra cher et plus les compagnies iront le chercher coûte que coûte. Les spécialistes et autres « logues » s’évertuent à nous prouver, à coup d’études financées par l’industrie, que l’exploitation des sables bitumineux ne pollue pas tant que ça, que le transport du pétrole par train ou par oléoduc est sécuritaire et que le pétrole du golfe du Saint-Laurent peut être extrait sans risque. Et les analyses des groupes environnementaux se retrouvent sur la tablette juste à côté de la déchiqueteuse dans le bureau 234-F du Parlement canadien. Stephen Harper a certainement épuisé le budget des tampons encreurs « reject » pour le siècle à venir. Mais est-ce que l’éventuel départ des conservateurs va régler le problème? Sûrement pas. Ça ne nuira pas, mais ça sera bien insuffisant pour que le système change en profondeur. Il faut un grand coup, une coupure, un geste net, de nouvelles règles parlementaires et économiques au sein de cette insoutenable démocratie canadienne!