Politique

Lettre ouverte à 
Antoine de St-Exupéry

Par La rédaction le 2010/10
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Lettre ouverte à 
Antoine de St-Exupéry

Par La rédaction le 2010/10

Mon cher Antoine,

Dans tes royaumes inconnus, où que tu sois je te l’écris : ton Petit Prince est ici, aux Îles de la Madeleine.
Je l’ai rencontré sur la plage du Havre-aux-Basques.
Il a les cheveux couleur de sable.
Il joue sur la plage à construire des châteaux décorés de coquillages et de plumes d’oiseaux.
Il est tout rayonnant de sa rose.
Il dessine sur le sable la rose des vents et pointe sa flèche vers le Nordais.
Cette flèche pointée sur le Nordais indique peut-être le site d’un trésor.
C’est la direction de Havre-aux-Maisons, l’île aux trésors.
C’est la direction de l’île Brion, du Rocher aux Oiseaux où, d’après les légendes, des pirates ont enterré des trésors. Je lui ai posé la question.
J’ai bien vu qu’il s’agissait de ton Petit Prince : il ne répond pas quand on l’interroge.
Il m’a regardé gravement. Il m’a parlé d’un géant qui habite par là, au Nordais des Îles.
Il s’appelle Old Harry. Comme l’allumeur de réverbères, ce qu’il aime dans la vie, c’est dormir. Mais lui aussi aime les couchers de soleil.
De temps en temps, il se réveille pour les admirer.
Dans son regard en contemplation se profilent les silhouettes de notre archipel.
Le Vieux Harry veille sur nous et nous protège depuis des millénaires.
Le Petit Prince, je crois, a apprivoisé ce bon vieillard contemplatif.
Il m’a simplement dit : « Il faut respecter son sommeil et lui laisser ses couchers de soleil de buttes, de seillons, de phares, de quais, de bateaux… »
Il m’a aussi fait cadeau d’un merveilleux secret : dans le fond des abysses, dorment avec le Vieux Harry, tous nos proches morts en mer.
Il m’a dit gravement : « Un cimetière marin, c’est sacré comme les cimetières des buttes à côté de vos églises. »
J’étais tellement émue, j’ai pleuré.
Le Petit Prince, pour me consoler sans doute, a dessiné une autre flèche à la rose des vents, indiquant le Suroît. Il m’a dit : « Le trésor, il est par là. Il s’appelle le Saint-Laurent. »
Le vent s’est levé et la flèche s’est mise à tourner dans toutes les directions comme une girouette. Comme c’est étrange!
Le Petit Prince a éclaté de rire, comme si riaient toutes les étoiles, et il m’a dit : « Tu sais, le dessin de St-Ex. : la caisse avec les trois trous d’aération pour le mouton qui est dedans… eh bien, ce mouton-là, si tu veux vraiment savoir, c’est un mouton noir. »

Annie Landry à Hélier
Anse-à-la-cabane, Iles-de-la-Madeleine, 
19 août 2010

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