
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Selon les données de Tourisme Bas-Saint-Laurent, les établissements d’hébergement de la région Bas-Saint-Laurent avait atteint un niveau record de fréquentation en 2022 lors des saisons hivernales et estivales. L’année 2023 va suivre une fréquentation équivalente à 2022.
Sachant qu’avec ces augmentations de fréquentations, le Bas-Saint-Laurent se retrouve au troisième rang des cinq régions touristiques les plus prisées des Québécois pour l’été 2023. Durant la pandémie, les touristes étaient majoritairement originaires du Québec, maintenant les touristes internationaux refont surface.
Ainsi, le Bas-Saint-Laurent se révèle être une terre d’accueil pour les voyageuses et voyageurs. Pourtant, à première vue, l’association entre tourisme et hospitalité ne semble pas évidente, car l’hospitalité se comprend comme un don, alors que la marchandisation se trouve au centre du tourisme. Saisir ce lien plus étroit qu’on ne le croit permet de concevoir un tourisme plus durable et respectueux, surtout lorsque cette association se base sur le point de vue de la personne qui reçoit.
L’hospitalité
L’hospitalité désignait une pratique universelle consistant à accueillir des voyageurs et étrangers. Aujourd’hui, elle est toujours présente à travers une multitude d’actes quotidiens, comme l’accueil de ses proches et ami.es, ou encore se loger avec des personnes pour nouer des relations amicales et sociales, etc.
La pratique de cette notion a subi des évolutions, ce qui lui a permis d’inclure la dimension marchande avec le tourisme. Dans ce contexte, l’hospitalité désigne alors « le jugement des touristes concernant les rencontres dans une destination où ils se considèrent comme étrangers » (Zied, 2013, p. 11).
Ce que l’on peut extraire de cette définition, c’est l’aspect central de la rencontre entre deux acteurs : le touriste et l’autochtone, déterminant l’aspect de l’hospitalité. Le point de vue du touriste est souvent celui étudié pour comprendre l’hospitalité, or, le point de vue de l’autochtone est tout aussi important, et c’est ce dernier qui permet de construire un tourisme durable respectueux des particularités locales.
Hospitalité marchande
Ce que le rapport que crée l’hospitalité présente comme spécificité, c’est la relation dissymétrique qu’elle produit : « l’hôte est chez-lui dans un lieu qui lui est familier et l’invité est de passage dans un lieu qu’il ne connait pas et qui peut lui être une source d’angoisse et d’insécurité » (Zied, 2013, p. 13). Ce sont alors les gestes et actions de l’hôte qui permettent d’aplanir cette dissymétrie en faisant preuve d’hospitalité.
L’hospitalité exprimée par l’hôte est alors une reconnaissance de l’autre et lui attribuer un statut dans cet espace. Cet espace est alors mis à disposition pour qu’il puisse servir à l’invité afin de le mettre en sécurité et en confort. Le lieu est alors prépondérant dans la relation d’hospitalité en déterminant sa qualité. Pourtant, toute hospitalité s’accompagne de contrepartie explicite ou implicite, même dans les formes les plus anciennes (Zied, 2013, p. 15).
Avec le tourisme et la multiplication des voyages, les lieux d’accueils se sont spécialisés en créant des espaces dédiés à l’hospitalité des touristes. Ce n’est plus le lieu domestique ou religieux qui offre l’espace d’accueil, mais des structures dédiées accessibles, médiant une contribution financière. L’hospitalité devient une marchandise explicitement.
Les nouveaux lieux de l’hospitalité
Ces nouveaux espaces portent comme caractéristiques de prendre en charge les touristes dès leur arrivée. Car le secteur de l’hospitalité est dominé par l’hôtellerie et les séjours clé en main « circuit-hébergement tout compris ». Selon les statistiques prélevées du sondage de la Chaire de tourisme Transat, la plus grande proportion de touristes québécois (41 %) va résider dans un hôtel ou un motel, alors que 22 % d’entre eux vont séjourner dans des gîtes ou des auberges, et 20 % séjourneront dans des Airbnb, chez des amis ou des membres de leurs familles.
Le désavantage de ces lieux d’accueil réside dans la déconnexion entre le touriste et la réalité locale. Or, ce tourisme ne permet pas de réaliser la rencontre entre la personne autochtone et la personne visiteuse. Les seuls contacts sont de l’ordre commercial. Le touriste n’est alors plus une rencontre vers l’altérité en raison de la détermination que produisent ces nouvelles formes d’espace d’accueil.
Intégrer l’hospitalité dans le tourisme
Très clairement, l’offre touristique devrait laisser la possibilité que la rencontre entre touristes et autochtones se fasse. Car c’est par cette rencontre qu’un tourisme éthique et durable peut se construire, mais aussi pour que l’identité locale puisse s’exprimer.
Cela demande de favoriser de petites structures d’accueil, comme des gîtes et des maisons d’hôte, qui permettent de découvrir le cœur de la culture. « Ce tourisme « chez l’habitant » facilite l’échange direct et apporte une autre alternative au tourisme de masse basé sur l’hôtellerie » (Zied, 2013, p. 22).
Sources
Olivier Therriault, « Été 2023 : le Bas-Saint-Laurent très populaire chez les vacanciers », Journal le soir, 12.05.2023, url https://journallesoir.ca/2023/05/12/ete-2023-le-bas-saint-laurent-tres-populaire-chez-les-vacanciers/
Mani, Zied, et Véronique Cova. « Hospitalité et culture locale : deux atouts pour un tourisme responsable », Maghreb – Machrek, vol. 216, no. 2, 2013, pp. 11-25.