
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Voici la présentation du rapport de l’Iris (institut de recherche et d’informations socioéconomiques) communiqué en mai 2023 sur l’empreinte matérielle des Québécoises et Québécois.
Le rapport commence par expliquer que la crise écologique actuelle trouve son origine également dans les gestes quotidiens les plus banals que chaque personne produit tous les jours : se nourrir, se déplacer, se loger, se vêtir et se divertir. Or, chacune de ses activités sont inscrites dans un système qui n’a pas pris comme logique de se situer dans une perspective qui considère à viser un impact minimal sur l’environnement. C’est même une logique inverse qui conduit notre système.
De ce fait, toutes les activités quotidiennes demandent une grande consommation de ressources. Par exemple, « en 2019, les sociétés humaines ont extrait 96,19 milliards de tonnes de matière, ce qui dépasse de près du double le seuil maximal annuel de 50 milliards de tonnes » (Iris, 2023, p. 1).
Une telle dépendance à l’extraction de ressources pour des activités quotidiennes est à l’origine des problèmes écologiques que nous rencontrons. Car, en plus de détruire des écosystèmes pour l’extraction, tout ce qui est extrait est rejeté obligatoirement dans l’environnement (atmosphère, terre ou océan).
Les différentes mesures
Pour mesurer l’empreinte écologique des différentes activités quotidiennes, il existe 4 catégories :
L’empreinte carbone : elle mesure la totalité du gaz carbonique émis dans l’atmosphère par une activité. Elle est la plus connue, mais qui demeure n’être qu’une empreinte parmi d’autres. Se concentrer exclusivement sur elle ne nous permettra pas d’assurer une viabilité écologique, car elle ne dit rien sur d’autres impacts comme la perturbation des cycles de l’eau douce, la pollution des sols ou encore la perte de biodiversité.
L’empreinte eau : consommation d’eau pour produire un produit ou une activité
L’empreinte écologique : la pression qu’exercent les activités humaines sur les écosystèmes, comme l’étalement urbain ou la scission des écosystèmes par les routes.
L’empreinte matérielle
L’empreinte matérielle : L’étude porte principalement sur cette empreinte. Elle permet de « quantifier en tonnes la somme de matière impliquée dans la production et la consommation d’un bien ou d’un service » (Iris, 2023, p. 2). Cette empreinte inclut à la fois la matière consommée, mais également les matières inutilisées mais nécessaires à l’extraction (les remblais miniers), et également les rejets de matières (déchets industriels).
Par exemple, l’électrification des voitures réaliserait une diminution de l’empreinte carbone, mais au prix de l’augmentation de l’empreinte matérielle. En effet, les batteries des voitures électriques requièrent de nombreux métaux pour les composants, faisant augmenter les extractions minières, et donc l’empreinte matérielle. Une voiture électrique a une empreinte matérielle environ trois fois plus grande que celle d’une voiture à combustion interne (Iris, 2023, p. 2).
Pour que l’empreinte matérielle soit viable écologiquement, elle ne devrait pas dépasser 8 tonnes par habitant.e. Dans ces 8 tonnes, 2 réfèrent aux ressources biotiques (nourriture) et 6 tonnes pour les ressources abiotiques (fossile, minéral, etc.).
Alors que l’empreinte matérielle des Québécoises et Québécois est de 16 à 19 tonnes métriques par personne (Iris, 2023, p. 14).
Conséquences économiques et démocratiques
L’étude en vient à la conclusion que la couverture minimale des besoins de base n’est pas durable sur le plan écologique au Québec.
Ce qui veut dire qu’une personne qui vit sous le seuil de pauvreté a une empreinte matérielle deux fois supérieure aux seuils maximaux de durabilité (Iris, 2023, p. 14).
Une réduction de la quantité de produits consommés n’est alors pas une solution qui peut se suffire en elle-même. La vraie solution est de changer en profondeur les logiques du système de production et de consommation (Iris, 2023, p. 11).
Actuellement, notre système de production et sa logique de production dominante s’opposent à une planification écologique et démocratique de l’économie.
« L’habillement, l’hégémonie de la voiture, l’alimentation, les articles ménagers divers, la quantité de matières résiduelles par habitant·e ou les enjeux d’écoconception dans le bâtiment » (Iris, 2023, p. 12) sont des secteurs empreints de la logique d’obsolescence, d’usage unique, de mode ou de productions de masses. Ce qui explique la raison de l’empreinte matérielle des activités de base et quotidiennes au Québec et au Canada, les rendant non viables écologiquement.
Changer de logique de système pour le rendre en adéquation avec les objectifs écologiques, c’est aussi prendre en compte la lutte contre la pauvreté et assurer un revenu viable.
Pour y parvenir, il devient essentiel de penser des politiques qui prennent des mesures pour limiter la consommation des ménages à plus haut revenu, dont leur empreinte matérielle surpasse de loin les seuils maximaux. « Les questions sociales de couverture des besoins de base et de réduction de la consommation superflue des plus riches doivent être envisagées à partir d’une approche écologique » (Iris, 2023, p. 14).