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Que reste-t-il du virage numérique des marchés publics ?

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Que reste-t-il du virage numérique des marchés publics ?

La pandémie et les mesures sanitaires ont propulsé le déploiement et la multiplication des boutiques en ligne des marchés publics québécois, mais après deux ans, ce virage numérique a subi certains écueils. Quels sont les constats après deux ans de pandémie ?

Comme plusieurs marchés publics au Québec, le Marché public de Rimouski avait amorcé un virage numérique pour vendre ses produits en ligne durant la pandémie. Après s’être associé avec le marché numérique Le Maturin pour sa mise en marché virtuelle, une initiative provinciale portée par l’Association des marchés publics du Québec (AMPQ), le Marché public de Rimouski avait finalement créé sa propre boutique en ligne sur la plateforme Locavora.

Récemment, il a toutefois annoncé qu’il s’associait avec la plateforme de vente en ligne La Corde d’achat à Rimouski, pour la vente de ses produits locaux entre les saisons d’ouverture du marché.

Cette annonce signifie que le marché délaisse sa propre boutique en ligne créée durant la pandémie, ainsi que la gestion de la vente en ligne.

Le défi de la vente en ligne

« L’achat en ligne, c’est un monde, ce n’est pas toujours simple. Ç’a été vraiment propulsé par la pandémie parce que le monde était enfermé chez eux, mais ça reste que c’est quand même complexe d’aller chercher une clientèle, de la maintenir, de vraiment faire de la bonne rétention de la clientèle pour l’achat en ligne », explique Sophie Rioux, coordonnatrice du Marché public de Rimouski.

La fermeture de la boutique en ligne fait suite au constat que la gestion d’une plateforme de vente en ligne représentait un trop gros engagement pour l’unique ressource qui travaille au Marché public de Rimouski. En parallèle, il y avait aussi La Corde d’achat, une boutique en ligne qui existe depuis huit ans et qui regroupait déjà des producteurs membres du Marché public de Rimouski.

S’associer au lieu de se multiplier

Avec la multiplication des boutiques en ligne, « il faut que tu proposes quelque chose de vraiment intéressant » pour avoir une bonne rétention de la clientèle, constate Sophie Rioux.

Pour les consommateurs, « Quand tu as huit plateformes dans lesquelles tu peux parcourir, à un moment, tu te tannes. C’est comme du magasinage, faire huit magasins pour trouver des affaires, à un moment donné, tu aimes quand tout est dans un : c’est ça qu’Amazon a créé », ajoute la coordonnatrice du marché.

À une plus petite échelle, le Marché public de Rimouski a donc choisi de s’associer au lieu de concurrencer : « On s’est dit : “il y a déjà un organisme qui recoupe des exposants du marché public qui fonctionne bien (…). Pourquoi essayer de pousser de notre bord, construire quelque chose, quand on peut juste s’associer, se promouvoir et se développer ensemble ?” », mentionne la coordonnatrice du Marché public de Rimouski.

Mettre les efforts là où ça compte

À l’échelle de la province, Jean-Nick Trudel, directeur de l’Association des marchés publics du Québec (AMPQ), a observé que le virage numérique des marchés publics a subi certains écueils dans le contexte évoluant de la pandémie.

Le constat qui émerge « à rebours » est que « les gens préfèrent — de loin — aller voir les producteurs, aller voir les marchands, vivre leur communauté dans le marché public durant la période estivale que de commander en ligne et d’aller récupérer une boite, un produit, se le faire livrer ou autres », explique-t-il.

Cela a confirmé que « la valeur fondamentale d’un marché public, c’est d’offrir un contact privilégié avec les producteurs ».

Pendant la pandémie en 2020 et 2021, les marchés publics ont aussi eu des taux exceptionnels d’achalandage. Le virage numérique des marchés publics est ainsi tombé en 2021 au 15e rang des priorités des gestionnaires de marchés publics, selon une enquête de l’AMPQ menée auprès de leurs membres.

Jean-Nick Trudel explique donc que cette expérience a montré que les marchés publics ont besoin de ressources et qu’avec le peu de ressources disponibles, ils avaient plus intérêt à concentrer leurs efforts là où l’énergie investie apporte le plus de retombées réelles pour les consommateurs, pour les producteurs et le milieu hôte du marché public, c’est-à-dire l’organisation de journées de marché public durant la période estivale.

Maintenir le contact dans la durée

« Ça ne veut pas dire qu’il ne faut absolument pas aller vers le numérique », précise toutefois le directeur de l’AMPQ. Il mentionne qu’il y a encore des boutiques numériques à travers le Québec où les organismes gèrent à la fois un marché public et une boutique en ligne qui leur offre une bonne agilité. Il reste qu’« on ne va pas se cacher que c’est beaucoup d’énergie et de temps organiser un marché public », souligne-t-il.

L’intérêt de la vente en ligne pourrait toutefois être particulièrement utile entre les saisons estivales. « Le recours vers le numérique pour faire la bascule entre les saisons estivales, je pense — et Rimouski qui a l’habitude d’innover pourra nous le montrer —, est une bonne manière de maintenir un niveau de vente intéressant pour les producteurs », indique Jean-Nick Trudel.

L’association du Marché public de Rimouski, avec la plateforme de vente en ligne La Corde d’achat pour la vente des produits locaux entre les saisons d’ouverture du marché, pourrait ainsi être une option intéressante afin de garder un accès aux produits du marché tout au long de l’année.

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