
Le 2 avril est la Journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme et chaque année, les associations québécoises en autisme profitent de cette journée et du mois d’avril, pour sensibiliser le grand public aux besoins des personnes autistes et de leurs familles. Pour cette occasion, le Mouton Noir est allé à la rencontre du directeur général d’Autisme de l’Est-du-Québec (ADEQ), Simon Dufresne, pour connaitre les réalités et enjeux vécus par les personnes autistes.
La difficulté d’avoir accès à un diagnostic est une problématique majeure pour les personnes autistes, selon le directeur général de l’ADEQ, Simon Dufresne. Les délais sont très longs avant d’obtenir un diagnostic pour les personnes adultes et en partie pour les enfants. Dans certains cas, les délais d’attente peuvent être de plus de deux ans. Le diagnostic est important, car il permet à la personne de mieux adapter son milieu pour qu’elle puisse s’épanouir.
« On voit de plus en plus de personnes, à l’âge de 30 ou 40 ans, obtenir un diagnostic d’autisme et ils finissent enfin par comprendre pourquoi ils étaient différents des autres et toute l’énergie qu’ils ont mis durant leur vie à se faire un masque pour cacher leurs traits autistes. Parce que dans la société, les traits autistes ne sont pas toujours acceptés et compris. Ce qui explique leur épuisement le soir, leur éclatement et leur désorganisation. Alors que dans le jour, ils mettent un masque tout simplement », témoigne le directeur général de l’ADEQ.
Le spectre de l’autisme
Simon Dufresne décrit le spectre de l’autisme comme « un spectre de lumières, où il y a différentes variétés ». Certains autistes vont avoir besoin d’énormément de support et d’autres moins. Il indique qu’environ 70 % des personnes autistes n’ont pas de déficience intellectuelle, mais ils peuvent avoir d’autres troubles, tels que l’anxiété ou l’aphasie. Il y a certains grands traits de l’autisme comme des difficultés de communication pour percevoir le non verbal ou les non-dits, un intérêt spécifique, et une hypersensibilité ou hyposensibilité.
Les personnes autistes peuvent donc être des personnes qui performent extrêmement bien dans leur milieu de travail. Ils peuvent être des personnes très ponctuelles, transparentes et honnêtes dans leurs communications. Par exemple, une des membres de l’ADEQ est entrepreneure et elle performe très bien au travail, mais dans son quotidien, elle éprouve des difficultés à aller à l’épicerie parce qu’il y a trop d’informations et elle doit parfois compenser en faisant des battements de bras (flapping). Une fois, les gens à l’épicerie ne comprenaient pas ce qui se passait et ils ont appelé la police.
La nécessité de démystifier l’autisme pour favoriser l’inclusion
Le mois de l’autisme est donc l’occasion pour l’équipe de l’ADEQ de travailler à démystifier l’autisme afin que les personnes autistes bénéficient d’une meilleure inclusion au sein de leur communauté. Le directeur de l’ADEQ mentionne que « mettre un masque, ce n’est pas l’idéal parce que la grande majorité ne souhaite pas devenir des non autistes, elles souhaitent juste que la société les accepte et leur laisse une place ». Il ajoute que pendant longtemps, on voulait mettre fin aux gestes autistiques, mais il est important de laisser libre cours aux gestes, car ils permettent à la personne de se calmer.
Il y a aussi une grande détresse psychologique chez les personnes autistes, notamment chez les personnes qui découvrent tardivement un diagnostic d’autisme. Ils font face à un conflit interne où ils se demandent : « Est-ce que je vais continuer à jouer un rôle ou est-ce que je souhaite que la société s’adapte ? ». C’est particulièrement le cas pour les femmes, car elles auraient de meilleures capacités que les hommes à masquer ou camoufler leurs traits autistes, selon Isabelle Faguy, femme autiste de Gaspé. Non seulement, cela rend le diagnostic plus difficile, mais le fait de masquer entraîne de la fatigue et des problèmes de santé mental. Dans le cadre d’une campagne de sensibilisation pour le Mois de l’autisme, une série d’affiches réalisées par Serena Bennett seront d’ailleurs distribuées dans les bibliothèques de la Gaspésie, des Îles et du Bas-Saint-Laurent au sujet de l’autisme au féminin.
Des enjeux pour les services
Les défis et enjeux sont donc nombreux pour les personnes autistes. Il y a aussi un manque de service de transport adapté. Certaines personnes autistes qui n’ont pas de handicap visible ont aussi plus de difficultés à accéder au service. Elles doivent expliquer pourquoi elles ont besoin de transport adapté. De plus, il y a un important taux de roulement chez les accompagnateurs, ce qui amène beaucoup de changements pour les personnes autistes. Le manque de lieux de répits dans la région fait aussi qu’il a un important épuisement des familles.
Pour sensibiliser le grand public aux besoins et enjeux des personnes autistes et de leurs familles dans le cadre du Mois de l’autisme, l’équipe d’Autisme de l’Est-du-Québec (ADEQ) a donc préparé une programmation variée sous le thème « Faisons briller l’autisme ». Pour ce faire, l’ADEQ a comme projet de faire rayonner les personnes autistes de la région et de mettre en valeur leurs différences et leurs forces. Dans le cadre de l’activité « L’autisme, une différence à célébrer », la communauté est invitée à présenter un portrait de leur proche vivant avec le TSA. L’ADEQ et ses partenaires diffuseront des portraits sur les médias sociaux.