
La MRC de Rimouski-Neigette retournera en zone rouge lundi prochain, rejoignant ainsi les MRC de l’est du Bas-Saint-Laurent (Matanie, Matapédia, Mitis) alors que le KRTB restera en rouge foncé. Cela signifie qu’à Rimouski, dès lundi, le couvre-feu commencera à 21 h 30, les élèves du secondaire pourront retourner à l’école en présence, les commerces non essentiels ainsi que les cinémas et les salles de spectacle rouvriront.
Ces derniers jours, la pression des élus locaux a été forte pour que cet assouplissement ait lieu, essentiellement pour des motifs économiques. « Le printemps est toujours une saison importante pour les commerçants et il ne faudrait pas que le gouvernement décourage l’achat local au moment où la situation redevient sous contrôle », a par exemple déclaré le préfet de la MRC, Francis St-Pierre. Le maire de Rimouski Marc Parent a multiplié les sorties pour demander un retour en zone rouge, afin que les commerces non essentiels puissent rouvrir. « Considérant que les PME de notre territoire ont historiquement très bien géré les mesures sanitaires dans leurs commerces », le député Harold LeBel a joint sa voix à celle des maires.
S’il est légitime que les élus prennent la défense de leurs entrepreneurs, on ne les entend en revanche pas sur deux mesures sanitaires affectant les citoyens et qui sont de plus en plus contestées : le couvre-feu et l’interdiction de recevoir de la visite à l’extérieur.
Un couvre-feu qui s’éternise
Présenté début janvier comme un « électrochoc » afin de faire comprendre à la population que la situation était grave, le couvre-feu devait durer quatre semaines mais est toujours en vigueur quatre mois plus tard. Et on peut douter de son effet : les données les plus récentes de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) montrent que le nombre de contacts sociaux des Québécois à la maison est stable depuis l’automne, variant entre 1,7 et 1,9 par jour selon les mois.
Le couvre-feu a peut-être eu un impact en janvier, alors que 25 % des personnes sondées par l’INSPQ seulement ont reçu des amis à la maison ou sont allées leur rendre visite. Ce taux est monté à 34 % en février, 37 % en mars et 41 % en avril, proche du niveau pré-couvre-feu (38 % à l’automne), avec un pic à 46 % lors de la semaine de relâche.
Touchant principalement les moins nantis qui n’ont pas accès à une grande cour pour sortir prendre l’air et les femmes victimes de violence conjugale qui pourraient hésiter de quitter un foyer malsain de peur de recevoir une amende de 1500 $, le couvre-feu ne tient pas du tout compte d’une réalité observée depuis plusieurs mois : c’est dans les écoles et les milieux de travail que se fait le gros de la contamination. Ainsi, à Rivière-du-Loup, ramener le couvre-feu à 20 h n’a pas fait baisser le nombre de cas, ni empêché l’éclosion en cours à l’usine de Viandes du Breton.
Dehors, la contamination est négligeable
De même, on sait maintenant que la contamination à l’extérieur est négligeable par rapport à l’intérieur, à partir du moment où des mesures sanitaires de base (à commencer par la distanciation) sont respectées. Une étude menée en Irlande a démontré que seule une contamination sur 1000 avait lieu à l’extérieur. Une autre étude, au Japon celle-ci, est arrivée à la conclusion que les risques de transmettre la Covid-19 étaient 19 fois plus grands à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Ces données ont fait dire à la directrice du laboratoire de recherche sur la réponse de l’hôte aux infections virales au Centre de recherche du CHUM, Nathalie Grandvaux, qu’il fallait « insister sur le fait de se voir le plus possible dehors, en petits groupes ». Alors que les journées deviennent de plus en plus belles, pourquoi ne pas faire un peu plus confiance aux Québécois et leur permettre de recevoir un groupe restreint d’amis en extérieur? Cela mettrait certainement du baume au cœur d’une population sevrée de contacts sociaux, dont la santé mentale décline, et de la récompenser pour sa participation exemplaire à la campagne de vaccination.
Mais il faut creuser loin pour trouver la trace d’un tel discours chez les élus régionaux. « On nous avait laissé entendre que plus le taux de vaccination augmentait, plus on aurait de libertés. On est rendus à l’étape où il faut que ça se traduise par des gestes », a déclaré à l’émission Info-Réveil le préfet St-Pierre, sans parler précisément du couvre-feu ou des rassemblements à l’extérieur.
Le retour au palier orange, maintenant ardemment souhaité par le maire de Rimouski, ne changerait rien à cet effet : la mesure la plus significative serait la réouverture des restaurants, avec deux adultes maximum par table.
Questionné mardi par la journaliste Véronique Prince de Radio-Canada sur le couvre-feu et la possibilité de recevoir des amis à l’extérieur, le docteur Horacio Arruda a entrouvert la porte : « Je ne veux pas faire d’annonce aujourd’hui, compte tenu que les travaux ne sont pas terminés, mais je vais vous dire que notre plan d’assouplissement va être empreint d’espoir d’un peu plus de liberté, mais aussi de prudence ». Un peu de pression politique pourrait peut-être accélérer les choses…