
Depuis le 5 juin, des poussières s’échappent de la cimenterie McInnis à Port-Daniel-Gascons en Gaspésie et vont se déposer sur les résidences et les véhicules des voisin·e·s. Lorsqu’elles se mélangent à l’eau (par exemple à la rosée matinale), ces poussières se transforment en une couche collante indécollable à l’eau savonneuse, ayant la texture du « papier sablé » selon le Journal de Montréal, qui a révélé l’existence de cette « pluie collante » dimanche.
D’après la responsable des communications de Ciment McInnis, Maryse Tremblay, une cinquantaine de résidences ont été touchées. La compagnie s’est chargée du nettoyage des voitures et des propriétés. « Chaque cause d’émission de poussière identifiée a été résolue sans délai », poursuit-elle, affirmant qu’« il s’agit d’une priorité pour notre entreprise ». Des soucis mécaniques, doublés d’un problème informatique, sont à l’origine de ces émissions.
Impossible, par contre, de savoir si ces poussières sont toxiques pour ceux et celles qui en ont reçu sur leur terrain. Il s’agit de clinker, un constituant du ciment obtenu en cuisant à très haute température un mélange de calcaire et d’argiles. Mme Tremblay précise seulement qu’« Urgence Environnement a été informé des épisodes d’émissions de poussière » et qu’« il leur appartient de déterminer des suites à donner auprès des autorités en matière de santé ».
Lundi, Radio-Canada rapportait que les poules d’un voisin de la cimenterie sont mortes dans les dernières semaines, événement que cet homme relie à la présence de clinker chez lui. Sa femme a de son côté eu la gorge très irritée. Sur la fiche de données de sécurité fournie par une autre compagnie, Lafarge Canada, on peut lire que le clinker de ciment peut irriter les voies respiratoires et provoquer le cancer.
Données en continu exigées
« On sait que c’est nocif, de la poussière de ciment, dit le porte-parole du groupe écologiste Environnement Vert Plus, Pascal Bergeron. On ne sait juste pas à quelle concentration et à quelle exposition. Mais là, on a plusieurs centaines de kilos, voire plusieurs tonnes, qui ont été relâchés dans l’atmosphère. » D’après les témoignages qu’il a reçus, il y avait encore de la poussière qui se déposait dans le voisinage en fin de semaine dernière, en moindre quantité cependant.
Considérant qu’il s’agit d’un « accident grave », M. Bergeron aimerait que Ciment McInnis stoppe temporairement sa production, le temps d’identifier le problème et de le résoudre. Mais au-delà de cela, son groupe appelle à une transparence accrue de la part de l’entreprise sur une base régulière : « Avant même l’ouverture de la cimenterie [en 2017], on demandait à ce que les données des stations d’échantillonnage soient divulguées en continu. Trois ans plus tard, on demande encore la même affaire : on veut les données de qualité de l’air en continu, pour ne pas se faire niaiser quand il y a des accidents. »
Questionnée à savoir si la cimenterie pourrait accéder à cette demande, Maryse Tremblay répond que « McInnis fournit ses déclarations d’émissions atmosphériques aux autorités compétentes comme c’est le cas de toutes les autres cimenteries canadiennes. Ces données sont disponibles publiquement sur les sites Internet des ministères concernés, tant au fédéral qu’au provincial. »
« Il va être possible d’obtenir les données grâce à la loi d’accès à l’information un coup que le ministère de l’Environnement va les avoir », confirme M. Bergeron. Cela s’accompagne toutefois de délais, quelques semaines au bas mot. D’ici-là, les personnes vivant à proximité de l’usine risquent donc de ne pas savoir ce qui se trouve dans leur air, et en quelle quantité.