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Quel rôle pour les séjours d’initiation à la solidarité internationale dans les écoles?

Par Sarah Charland-Faucher le 2018/11
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Quel rôle pour les séjours d’initiation à la solidarité internationale dans les écoles?

Par Sarah Charland-Faucher le 2018/11

Partout au Québec, des centaines de jeunes et de moins jeunes partent chaque année avec leur école à la rencontre d’autres peuples et cultures à travers des petits et grands projets d’initiation à la solidarité internationale. Ces expériences vécues grâce à un personnel habituellement mobilisé et engagé sont souvent très positives pour les élèves, mais il n’est pas toujours évident de mesurer les retombées sociales tant individuelles que collectives de tous les efforts investis.

Est-il possible de faire jaillir de ces expériences en milieu scolaire les compétences transversales nécessaires à un vivre-ensemble local et mondial harmonieux afin que le projet ne soit pas réduit à un voyage consommé puis jeté dans la boîte des souvenirs heureux quelques mois après le retour?

Pour le Carrefour international bas-laurentien pour l’engagement social (CIBLES) qui se spécialise, entre autres, dans l’animation de formations préparatoires à ce type de séjours, il est crucial de faire une place très importante à la sensibilisation, à l’information et à la conscientisation afin que l’expérience soit transformatrice et ait une influence majeure sur le rapport au monde des élèves. Il s’agit aussi de développer l’esprit critique qui permettra de comprendre sa propre posture de départ avant de penser à aider ou à changer les autres ou le monde. Pour le CIBLES, ces séjours ont un rôle important à jouer en éducation, mais ils sont un moyen et non une fin.

Que cherchons-nous à déposer dans les bagages des jeunes? Que désirerions-nous observer chez les élèves à la suite des formations préparatoires au voyage, pendant les formations de retour et même dans les mois et les années suivant un séjour à l’international? Voici quelques pistes.

Des participantes et des participants qui ont renforcé leur estime et leur connaissance d’eux ou d’elles-mêmes, leur confiance en soi et en leurs prochains. L’estime de soi et la confiance sont une base essentielle pour entrer en relation avec les autres et le « monde extérieur », sans peur, de façon saine et pacifique. Se connaître permet d’identifier les valeurs qui nous constituent et qui entreront inévitablement en conflit avec d’autres au cours de notre exploration du monde.

Des participantes et des participants qui ont du plaisir à travailler en équipe et à se soutenir mutuellement. « Tout seul, on va plus vite, mais ensemble on va plus loin » peut devenir plus qu’un slogan lorsqu’on l’expérimente concrètement. L’esprit d’équipe et de communauté est une base pour développer des projets plus grands que soi, chercher des résultats collectifs, mais aussi pour permettre à un sentiment d’appartenance d’émerger sans lequel, aucune solidarité n’a l’habitude de germer. Or, la solidarité est un ingrédient crucial pour cocréer une société plus juste et harmonieuse.

Des participantes et des participants qui s’intéressent à l’histoire qui les précède et qui reconnaissent leurs privilèges. La connaissance du passé permet de mieux comprendre les réalités actuelles, de diminuer les jugements et de changer certains comportements pour ne pas reproduire les mauvaises expériences. Reconnaître ses privilèges peut ouvrir la porte à une plus grande humilité, et à une écoute et une sensibilité à l’égard de ceux et celles qui en ont peu ou pas ou qui n’ont pas les mêmes.

Des participants et des participantes plus à l’écoute, curieux, ouverts et plus tolérants et tolérantes à l’ambiguïté. Le monde est complexe, les cultures et les sensibilités, multiples. Si l’écoute et la curiosité pour l’autre ne se concluent pas automatiquement sur une compréhension mutuelle, il est possible de demeurer ouvert et tolérant malgré ce qu’on ne comprend pas et qui nous paraît étrange. Cela permet aussi de diminuer les jugements trompeurs ou les interprétations erronées tout comme la violence et le racisme qui peuvent en découler.

Des participantes et des participants qui explorent et apprivoisent le sentiment de coresponsabilité et non de culpabilité. Découvrir l’histoire, les injustices, le pillage et l’exploitation des personnes comme des ressources naturelles peut engendrer beaucoup de culpabilité pour les personnes qui réalisent comment s’est accumulée la richesse et se sont développés les privilèges dont elles jouissent en Occident. La culpabilité est rarement un moteur de changement durable et peut mener à différents mécanismes de défense : repli, indifférence, cynisme, dépression, gestes charitables occasionnels pour se déculpabiliser. Le sentiment de coresponsabilité nourrit la volonté de se solidariser et la motivation à travailler en équipe pour trouver des solutions.

Les projets de séjours internationaux dans les milieux scolaires peuvent être des outils pédagogiques influents puisqu’ils sont portés par un désir commun des élèves. Ils sont donc une occasion précieuse, hors du cadre scolaire habituel, de développer des connaissances, un savoir-être et un savoir-faire qui permettent d’agir comme citoyens et citoyennes du monde et de mettre en pratique les valeurs humanistes à partir desquelles nous souhaitons voir modelés le présent et l’avenir. 

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