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Prank

Par Joel Lelièvre le 2017/10
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Prank

Par Joel Lelièvre le 2017/10

Sorti il y a un an, Prank, premier long métrage du Québécois Vincent Biron, a fait beaucoup jaser. Pour toutes sortes de raisons : une énorme bannière présentant un pénis turgescent trimballée par l’équipe dans les festivals, le fait que le budget ait été bouclé sans mécène étatique… Mais c’est surtout son authenticité (un langage cru, actuel, d’une rafraîchissante véracité) couplée à une capacité à présenter un portrait nuancé de l’adolescence à l’occidentale, qui lui attire les louanges des critiques. Émotions multiples, ton changeant, langage aussi cru que vrai. Ce n’est ni une tragédie, ni une comédie. C’est la vie. Du moins un important segment.

Prank ne réinvente rien et ce n’est clairement pas son intention. Il présente plusieurs des jalons classiques qui marquent le passage à l’âge adulte – n’en disons pas plus ici – à l’instar de films américains devenus classiques comme Superbad ou encore Napoléon Dynamite. Mais il le fait à travers un filtre autrement plus humain, ce qui le rapproche du cœur de son public, qu’il soit jeune ou plus âgé. Prank se donne des airs racoleurs, mais le subterfuge apparaît translucide. En fait, le long métrage n’essaie pas de plaire à tout le monde, il cherche à atteindre un public un-tant-soi-peu sensible. Et comme il le fait bien.

Sa nature plus poétique que narrative contribue à dépeindre intelligemment le sas qu’est l’adolescence. Les péripéties se présentent comme des excuses pour peindre des images, ici crues, là vulnérables, soutenues par une trame sonore exquise qui met en valeur des artistes d’ici. Le tout intercalé d’esclaffements bien sentis : il s’agit quand même d’un film où des jeunes s’ingénient à orchestrer des coups pendables!

 Au final, ce ne sont pas les gags qui marquent l’esprit, peu importe comment le titre insiste, mais bien le scénario, senti et sans prétention, et le jeu des acteurs qui se renvoient la balle tout au long de ce film plutôt bref (79 minutes) : Étienne Galloy donne corps à ce qui aurait pu n’être qu’un archétype éculé, un protagoniste flasque; Constance Massicotte, résolument féline, épice les scènes de ce mystère féminin que les jeunes hommes cherchent à percer; Alexandre Lavigne incarne avec aplomb un leader aigre-doux, aux tourments mal masqués… Malheureusement – ou non! –, c’est Simon Pigeon qui vole la vedette, dans le rôle de Jean-Sauce : à la fois le plus tempéré et le plus absurde du quatuor, ses descriptions des films cultes des années 90 qui auront marqué plusieurs mémoires de trentenaires sont tru-cu-lentes. Un peu trop de bonnes idées investies dans un faire-valoir? Qu’à cela ne tienne, on en redemande. 

Prank ne marquera probablement pas le monde du cinéma québécois. Probablement parce qu’il s’adresse davantage à un public jeune, qui n’a guère de canal pour consacrer un film. Mais je parie que ceux qui l’auront visionné s’en rappelleront comme d’une fidèle représentation de l’adolescence québécoise au 21e siècle.

 

 

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