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Où sont les jeunes?

Par Benoît Collette le 2017/09
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Où sont les jeunes?

Par Benoît Collette le 2017/09

À la grandeur du Québec, par une belle ou moins belle journée de novembre, les citoyens et les citoyennes iront (ou n’iront pas, pour beaucoup) au bureau de vote pour élire maires, mairesses, conseillers et conseillères.

À chaque saison électorale, la question revient : où sont les jeunes en politique municipale? On pourrait inclure les femmes dans cette question, elles aussi sous-représentées. Les statistiques du ministère des Affaires municipales sont assez éloquentes : les moins de 35 ans représentaient 8,9 % des candidatures en 2013 et l’âge moyen des élus, en augmentation, était de 53 ans. Pourquoi en est-il ainsi? On peut émettre différentes hypothèses : faible rémunération des charges, difficile conciliation entre la vie politique, le travail, les études et la famille, etc. De plus, les jeunes ont moins tendance à voter que leurs aînés, ce qui pourrait notamment s’expliquer par le fait qu’ils n’habitent pas de manière stable au même endroit ou encore par manque d’information sur les candidats et les candidates, les lieux de vote, etc. Il y a aussi un effet de génération, car les jeunes d’aujourd’hui sont moins nombreux à aller voter que les jeunes des générations précédentes.

Bienvenus les jeunes?

Ce premier point en amène un second : la politique municipale s’intéresse-t-elle aux jeunes? Sans trop entrer dans les détails, je poserais cette question : Rimouski, ville étudiante, où es-tu? La mise au rancart à Rimouski du projet de ville étudiante est l’illustration d’une réalité implacable qui transforme lentement, mais sûrement la vie dans plusieurs municipalités : le vieillissement conjugué à l’exode de la population qui quitte les régions dites « périphériques ». Résultat : des régions comme l’Est-du-Québec voient leur population vieillir de manière importante. Ce faisant, il est peu surprenant de constater que des problèmes comme le logement pour les personnes âgées deviennent des enjeux importants dans plusieurs communautés. Cette situation n’est pas propre au monde municipal : un des premiers projets de loi adoptés par le gouvernement Couillard en 2014 fut « Mourir dans la dignité », après quatre ans de travaux et deux changements de gouvernement. En fait, comme les jeunes sont moins nombreux et qu’ils votent moins que leurs aînés, leurs préoccupations ont moins de portée politique. L’électeur médian au Québec vieillit et les enjeux politiques évoluent en conséquence.

Cela dit, les municipalités et le gouvernement souhaitent-ils que les jeunes s’intéressent à la politique municipale? Les municipalités pourraient faire participer davantage les plus jeunes à la vie politique, mais il y a peu d’exemples de conseils municipaux jeunesse ou d’autres structures qui facilitent leur inclusion dans le dialogue politique. Les séances publiques des conseils municipaux, par leur formalisme, leurs décisions déjà « cannées » et leur jargon urbanistique parfois incompréhensible, n’offrent pas toujours des exemples très édifiants, sauf les quelques fois où des citoyens et des citoyennes interpellent le conseil lors de la période de questions, ce qui interrompt le script. 

Forums jeunesse

Avec des discours creux, on ne peut pas dire que le gouvernement Couillard prêche par l’exemple. En 2015, il a aboli les forums jeunesse régionaux qui travaillaient entre autres à favoriser la participation des jeunes aux élections municipales. Il s’agissait de la seule instance administrée par des jeunes et pour des jeunes présente dans toutes les régions du Québec. La Fédération québécoise des municipalités et l’Union des municipalités du Québec (UMQ) souhaitent aussi impliquer davantage de jeunes dans la politique municipale, mais leurs moyens d’action demeurent limités sans une volonté gouvernementale claire. Et ça ne se limite pas aux jeunes. Le projet de loi 122, adopté en juin, qui réduit l’obligation de recourir aux référendums municipaux (projet par ailleurs chaudement applaudi par l’UMQ) est l’exemple de cette volonté de plusieurs élus de gouverner en ayant les « coudées franches », sans avoir à consulter la population sur des projets qui la touchent directement.

En conclusion, on constate que les jeunes sont sous-représentés dans les instances, qu’ils votent moins et que leurs préoccupations semblent peser moins lourd dans la balance démographique. Il n’en demeure pas moins qu’il reste plus facile d’interpeller un élu municipal, de discuter, de proposer des projets ou des idées ou de s’opposer à un conseiller qu’au premier ministre canadien ou québécois, en dépit des obstacles institutionnels. Et c’est dans cette proximité que permet le gouvernement municipal que les valeurs, les préoccupations, les enjeux et les projets de la jeunesse peuvent trouver leur place en premier lieu. Encore faut-il être suffisamment mobilisé et organisé pour pouvoir changer les choses. Un défi que les jeunes, et les moins jeunes, doivent relever.

 

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