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Le Saint-Laurent, une autoroute pétrolière?

Par Sylvain Archambault le 2016/09
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Le Saint-Laurent, une autoroute pétrolière?

Par Sylvain Archambault le 2016/09

Le Saint-Laurent, le plus vaste système estuarien au monde, le « chemin qui marche » des peuples autochtones, le « fleuve aux grandes eaux », oui, ce Saint-Laurent qui coule presque dans nos veines, certains voudraient en faire une autoroute pétrolière.

À la centaine de pétroliers de classe Suezmax (150 000 tonnes) qui approvisionnent chaque année la raffinerie Valero de Lévis et aux navires qui exportent présentement le pétrole albertain à partir de Sorel-Tracy, on voudrait ajouter un terminal pétrolier majeur à Belledune dans la baie des Chaleurs, un autre port pétrolier sur le Saint-Laurent, gracieuseté de TransCanada, un terminal de gaz naturel liquéfié à Saguenay… pour commencer.

Il est vrai que la sécurité des pétroliers s’est améliorée depuis le terrible accident de l’Exxon Valdez en 1989 alors que 36 000 tonnes de pétrole brut étaient déversées sur plus de 2 100 km de rivages vierges en Alaska. Les navires doivent maintenant être équipés de doubles coques et de cuves de stockage indépendantes de 10 à 15 000 tonnes chacune. Le nombre d’accidents majeurs, tout comme les quantités déversées diminuent constamment. Mais…

Mais malgré ces progrès, le risque est toujours présent, particulièrement dans le Saint-Laurent, où les difficultés de navigation abondent, où la météo est souvent très difficile et où un couvert de glace saisonnier rend presque impossible la récupération du pétrole déversé en hiver. À tel point que l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent ont l’honneur d’être, selon une récente étude de WSP , réalisée pour Transports Canada, un des deux secteurs au Canada les plus vulnérables aux déversements pétroliers. Rien pour nous rassurer.

De plus, les courants dans le système du Saint-Laurent, couplés aux fortes marées, font en sorte qu’une nappe de pétrole pourrait être dispersée sur des centaines de kilomètres, comme l’ont montré récemment des travaux comme ceux de l’équipe de Bourgault à l’ISMER, d’Environnement Canada, de la Fondation David Suzuki, ou même de la Société d’intervention maritime de l’Est du Canada (SIMEC) qui a estimé qu’un déversement à Cacouna pourrait atteindre la ville de Rimouski, 100 km en aval.

Et si l’impensable survenait? Si un Suezmax de 150 000 tonnes faisait naufrage dans le Saint-Laurent? On nous dit de ne pas nous inquiéter : les pétroliers ont accès à un fonds d’indemnisation de 1,3 milliard de dollars. De plus, la SIMEC, seul organisme d’intervention accrédité par Transports Canada au Québec, est prête à intervenir en cas de désastre.

Sauf que la SIMEC a l’équipement et l’expertise pour récupérer… 10 000 tonnes d’hydrocarbure seulement. De plus, le commissaire à l’environnement et au développement durable a confirmé que nous ne sommes pas en mesure de faire face à un déversement majeur dans le Saint-Laurent. Nous en avons eu la preuve éloquente en septembre 2013 alors qu’un déversement de cinq tonnes de mazout se produisait dans la baie bien protégée de Sept-Îles. La récupération se déroulait bien jusqu’à ce qu’une petite tempête automnale vienne rompre les estacades et libérer le mazout. Tout ça dans la baie de Sept-Îles… Imaginez dans le golfe!

Qu’en est-il ailleurs? Sur la côte ouest de la Colombie-Britannique, un moratoire sur le trafic pétrolier est en vigueur depuis plus de 40 ans, de façon à y protéger les précieux écosystèmes. Pendant ce temps, dans le Saint-Laurent, nous sommes tranquillement en train de paver la voie à une véritable autoroute pétrolière.

Golfe du Saint-Laurent à vendre? Il est encore temps de dire « non »!

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