
Jean Derome, figure de proue de la musique actuelle au Québec, compositeur, multi-instrumentiste et idéateur, présente un calendrier d’événements de 13 mois dans le cadre d’un projet nommé L’Année Jean Derome. Lauréat de la prestigieuse Bourse carrière du Conseil des arts et des lettres du Québec en 2012, l’artiste travaille depuis trois ans sur ce projet qui vise à organiser, à travers le Québec, des résidences artistiques s’étalant sur une année. Il souhaite, avec différents collaborateurs, travailler sur des créations nouvelles et revisiter des pièces n’ayant été présentées qu’une seule fois, comme c’est souvent le cas en musique actuelle. Cette série d’événements a débuté en mai 2015 et se terminera en juin 2016; elle inclut une exposition photos, le lancement du documentaire Derome ou les turbulences musicales et la mise en ligne du site Web jeanderome.com.
À Rimouski, le 28 avril prochain, dans le cadre des 22es Rencontres de musiques spontanées, les bricolages absurdes et le dadaïsme seront à l’honneur dans un spectacle nommé Hommage à Rose Drummond, en guise de dédicace à cette artiste automatiste proche de Borduas dont on aperçoit les « ateliers-serres » depuis l’autoroute 20 à Drummondville. Accompagné de Michel F Côté, Joane Hétu, Éric Normand et de quelques membres du Grand groupe régional d’improvisation libérée, le GGRIL, Jean Derome s’installera momentanément au Musée régional de Rimouski pour travailler sur des chansons absurdes issues de son répertoire. Les connaisseurs pourront reconnaître des textes déjà créés au sein de groupes/projets tels que Nous perçons les oreilles, Les Granules, Les Patates et De rome ma chine. Promettant de se tenir bien loin des traditionnels arrangements musicaux d’une chanson en groupe, Derome annonce que l’accent sera mis sur le travail avec les objets sonores.
Derome ou les turbulences musicales
Réalisé par Richard Jutras, le film documentaire sur le multi-instrumentiste s’articule autour de la captation d’une ambitieuse résidence de deux semaines de
Jean Derome au Théâtre La Chapelle à Montréal en avril 2000. Soulignant les 30 ans de carrière du musicien, le menu de cette résidence, qualifié de touffu par l’artiste, multiplie les collaborations avec musiciens, danseurs, artistes visuels et offre au public l’occasion d’assister au chantier créatif qui s’y tient au quotidien. Démesurée, cette « exposition de musique » présente 14 projets différents et la participation de 26 musiciens. On y retrouve les collaborateurs de longue date qui gravitent au sein de l’étiquette Ambiances Magnétiques, dont Pierre Tanguay, Normand Guilbeault, Diane Labrosse, Martin Tétreault, Joane Hétu.
À l’époque de cette captation, le projet de Jutras était de faire un film sur la musique actuelle à Montréal, mais faute d’intérêt des diffuseurs, le projet a été mis sur les tablettes. Il sera finalement terminé, 15 ans plus tard, à compte d’auteur et avec l’aide de la Coop Vidéo, et recentré autour de la carrière foisonnante de Jean Derome. À travers cette carrière, c’est tout de même l’histoire du clan que nous découvrons, de la naissance et de l’évolution de la scène actuelle. Parce que, comme le dit Derome : « C’est des tribus, les musiciens, des communautés de pensée qui partagent des idéaux. »
Le film de Richard Jutras navigue entre extraits d’entrevues, performances et déambulations urbaines, comme pour tisser le lien entre les gens, les paroles, les sons et le territoire qui a vu naître cette communauté de musiciens libres qui continuent de créer et d’inspirer. Derome et les autres s’y confient de manière naturelle et le film recèle de fertiles réflexions sur le monde et la musique, comme celle-ci :« La musique crée le consensus, ça accorde des manières de sentir le monde. »
Le documentaire sera présenté le 26 avril à Paraloeil en présence de Jean Derome.