Elle avait dit : « Tout peut changer dans l’urinoir! » Et ainsi fut fait, en ce 4 septembre 2012, où les sondages ont eu tout faux. De fait, si la tendance se maintient, le gouvernement minoritaire du Québec fera du surplace – s’il ne prend pas du recul – pour pouvoir survivre de 18 à 24 mois.
Et, toujours si la tendance se maintient, l’ultra-opportuniste François Legault, chef de la CAQ-ADQ (lire à voix haute), se promènera à l’Assemblée nationale avec son agenda de droite sous le bras pour monnayer de tièdes appuis au gouvernement de la première femme élue première ministre au Québec – Bravo! –, Pauline Marois.
Bref, si la tendance se maintient, le Québec sera ingouvernable tant et aussi longtemps que les Québécois ne sauront pas appuyer ou sanctionner suffisamment l’un ou l’autre des partis politiques en présence sur l’échiquier national, échiquier qui compte maintenant plusieurs pions bien placés pour bloquer la reine.
Il y a quelque chose de profondément déprimant à constater que la gent électorale, qui, depuis des lunes, se déclarait insatisfaite à plus de 70 % du gouvernement Charest, aura tout de même fini par redonner 50 députés à un Parti libéral usé, corrompu et à des années-lumière de la réalité quotidienne de la classe moyenne, des étudiants et des gagne-petit. Cinquante députés, soit seulement quatre de moins que le Parti québécois. De quoi lier les mains au nouveau gouvernement qui aura toutes les misères du monde à légiférer sur des questions budgétaires comme l’annulation de la hausse abusive des frais de scolarité, ayant devant lui 69 députés du PLQ et de la CAQ qui n’attendent que les occasions d’en découdre avec les péquistes pour grimper de quelques points de pourcentage dans l’opinion publique, dont la fonction d’analyse est anesthésiée par certains médias biaisés, en vue du prochain scrutin. Quand à un éventuel référendum sur la souveraineté du Québec, il pourra toujours aller se faire voir en Grèce, dans la région des Calendes…
Schizophrénie collective? Chose certaine, il y a du gros rouge qui tache qui se bidonne un peu partout au Québec. Et le rire le plus franc – épithète ne s’appliquant que très rarement à celui dont on parle ici – provient de Sherbrooke, ou plutôt d’Outremont, de chez Jean Charest, nouveau pensionné à vie des États québécois et canadien.
En somme, pas de doute, la tendance se maintient : les Québécois ont tendance à maintenir au pouvoir des gens qui ne le méritent pas.
Le PQ a un bilan électoral à faire. Plutôt que de craindre la division du vote souverainiste en consignant Québec solidaire et Option nationale dans des camps ennemis, il aurait été plus sage de répondre à la proposition de coalition stratégique lancée par Françoise David, avant même le déclenchement des élections. La présence en chambre de l’ex-péquiste Jean-Martin Aussant, d’ON, et de Manon Massé, de QS, empêchés d’être élus par la présence de candidats péquistes marginaux arrivés en troisième ou quatrième place, aurait aidé le PQ dans ses nombreux projets. En retour, ces deux partis auraient concédé des comtés où il y avait bel et bien division du vote souverainiste et où se sont faufilés qui des libéraux, qui des caquistes, plutôt que des péquistes. D’où ce gouvernement minoritaire, loin d’une majorité par alliance qui aurait pu se négocier stratégiquement entre le PQ, ON et QS, pour le plus grand bien de la démocratie.
Aujourd’hui, quelques semaines après les élections, près d’un Québécois sur deux se déclarent insatisfaits du résultat électoral du 4 septembre. Bien fait pour leur pomme!
Ces tristes résultats portent ombrage au fait que le taux de participation au vote a augmenté de 10 %, passant à plus de 73 %, le meilleur taux depuis plus de dix ans. Mais, de l’autre côté de la lorgnette, n’oublions pas que plus du quart de la population boude encore cet exercice démocratique périodique. Quel effet auront sur le prochain taux de participation ces résultats ?
À suivre, si la tendance se maintient…