Enfin, la conclusion du diptyque L’Été 63 du scénariste Marc Bourgne et du dessinateur rimouskois Vincent Rioux, aussi connu sous le nom de VoRo, est en librairie. Le premier volet était paru en août 2009. Heureusement, le lecteur voit sa patience bien récompensée, car fameuse est la conclusion de cette histoire qui porte à la fois sur les difficultés d’une famille reconstituée et les problèmes de communication entre un père et son fils, mais aussi sur le racisme et l’intolérance, voire la xénophobie.
Linh, une petite Vietnamienne de 13 ans, rejoint son père à Paris, qui la conduit chez sa grand-mère, à Saint-Roch, un petit village sis au cœur des terres volcaniques d’Auvergne. Son père, militaire et médecin déployé au Viêtnam dans les années 1940 et 1950, doit y retourner afin de retrouver la mère de Linh, dont la vie, là-bas, est menacée. On est à l’été 1963. Or, à cette époque, la guerre fait rage au Viêtnam. Une guerre que la BD ne manquait d’ailleurs pas d’évoquer dans toute son horreur dès les planches liminaires du premier tome.
Linh n’est pourtant pas la bienvenue à Saint-Roch. Son demi-frère Jeannot ne l’accepte pas. Il ne comprend pas pourquoi son père lui a si longtemps caché l’existence de cette demi-sœur… Les vieux du village, quant à eux, se méfient de celle qu’ils surnomment « la bridée ».
Le 14 juillet, jour de la fête nationale en France, le village organise un feu d’artifice et un bal. La grand-mère de Jeannot lui demande d’y amener Lihn et de veiller sur elle. Elle ne passe pas inaperçue auprès des garçons, au grand déplaisir des aînés du village. Mais les bruits tonitruants du feu d’artifice indisposent Lihn. Ils lui rappellent le bruit des bombes dans son village natal et ne font que raviver son inquiétude pour sa mère. Le bal et le bouquet du feu d’artifice ne suffisent pas à rassurer Linh, qui devient agitée, ni à assurer son intégration. Le lendemain, Lihn se rend au comptoir de la poste pour un rendez-vous téléphonique avec son père, mais elle ne rentrera pas à la ferme de sa grand-mère. Jeannot part donc à sa recherche sous la menace d’un terrible orage, qui fait écho au drame qui se prépare. La trame culminera dans une fin dramatique et magistrale alors que l’été 63 laissera une marque indélébile dans la mémoire des jeunes de Saint-Roch.
VoRo s’est investi afin de rendre L’Été 63 encore plus émouvant. Les atmosphères dépeintes sont intenses grâce à un habile dosage des couleurs chaudes et tamisées, les tons de jaune et de brun dominent et s’harmonisent bien aux touches bleutées du ciel. Les décors et les objets sont parfaitement reproduits et permettent au lecteur de mieux entrer dans l’histoire. De plus, l’intensité des émotions que vivent les personnages est bien présente grâce au trait élégant, net et précis de VoRo. C’est l’un des points forts du bédéiste, qui sait donner de l’épaisseur aux personnages.
Tous ces éléments conjugués traduisent une œuvre forte, un bon point pour Bourgne comme scénariste et un fleuron de plus à la carrière de VoRo, qui travaille actuellement à deux nouveaux projets. Bien qu’il serait intéressant de connaître la suite des aventures de Linh et de Jeannot, VoRo prépare un « thriller psychédélique » en plus de se consacrer à l’histoire d’une femme devenue amnésique à la suite d’une agression. Les deux récits se dérouleront à Rimouski…