Environnement

Le Québec à l’heure des choix énergétiques

Par Stéphane Poirier le 2010/10
Environnement

Le Québec à l’heure des choix énergétiques

Par Stéphane Poirier le 2010/10

Depuis près d’une décennie, le Québec est confronté à une multitude de projets énergétiques controversés : les mini-centrales hydroélectriques privées, les projets des centrales thermiques comme celles du Suroît et de Bécancour, le développement éolien anarchique, la réfection de Gentilly-2, les méga projets hydroélectriques comme celui de la Romaine, les projets de port méthanier de Cacouna et de Lévis, le « far west » minier encadré par la fameuse Loi sur les mines, et maintenant les gaz de schistes et les forages gaziers et pétroliers dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent. Que de perte de temps et d’énergie à s’entêter à cultiver de bien mauvais terreaux!

Poser les bonnes questions

Le Québec se voit plus souvent en mode lutte qu’en mode « bâtissons l’avenir ». La qualité de notre environnement n’a jamais été aussi menacée par l’appétit des géants de l’industrie des énergies non renouvelables, et ce, avec l’accord de nos chers élus provinciaux et fédéraux. De plus, nous signons des ententes d’exportation de notre électricité à perte. Le peuple québécois doit à tout prix se questionner, s’informer et agir par rapport aux grands enjeux de notre société comme la propriété des ressources naturelles et l’indépendance énergétique des États. Quel est notre projet de société? Voulons-nous décider collectivement ou voulons-nous que les autres décident à notre place? Quelles sont nos forces énergétiques pour l’avenir? Pourquoi ne pourrions-nous pas devenir un leader mondial en matière d’énergie verte? Nous avons déjà une bonne longueur d’avance dans ce domaine : en 2005, 46 % de nos approvisionnements énergétiques étaient de source renouvelable, comparativement à 26 % au Canada, 7 % aux États-Unis et 9 % à l’échelle mondiale. Nous pouvons nous affranchir de notre dépendance au pétrole par l’efficacité énergétique, par le développement de la géothermie, par l’électrification des transports à l’aide du moteur-roue de Pierre Couture, par l’achèvement de la nationalisation de nos ressources naturelles amorcée par René Lévesque dans les années soixante, etc.

État de survie

En écologie, il existe un concept nommé capacité de charge. Grossière-ment, celui-ci désigne la taille maximale qu’une population peut atteindre dans un milieu donné. La croissance infinie ne peut survenir dans un monde où les ressources sont limitées. Les espèces qui ont connu une explosion démographique suite à une abondance de nourriture et à une quasi-absence de facteurs limitants, comme la prédation, ont subi un déclin majeur peu de temps après leur apogée. On doit apprendre à travailler avec les écosystèmes, on ne peut s’extirper des forces naturelles. Toutes les civilisations ont vu leur environnement se dégrader à différents niveaux à travers les âges. Celles qui ont réussi à survivre eurent la sagesse de trouver l’équilibre entre la disponibilité des ressources et leurs besoins fondamentaux. Le développement rectiligne axé sur l’individu ne peut plus durer. Nous devons rééquilibrer le balancier et réduire l’écart entre le pôle « je » et le pôle « nous ». L’idée de révolutionner notre modèle économique apparaît de plus en plus comme une nécessité, et non comme un choix.

Tôt ou tard

La responsabilité anthropique dans le réchauffement climatique global actuel fait consensus au sein de la communauté scientifique. Les émissions de gaz à effet de serre dues aux activités humaines continueront d’augmenter inévitablement si nous poursuivons un modèle de société assoiffé d’énergies fossiles. Nous avons déjà rencontré le pic de production du pétrole selon les experts les plus réalistes, alors que les plus optimistes prévoient qu’il sera atteint d’ici 2035! En 2005, le département américain de l’Énergie a publié un document connu sous le nom de rapport Hirsch. On y mentionne que « le pic pétrolier mondial pose aux États-Unis et au monde un problème de gestion des risques sans précédent. Les prix du pétrole et la volatilité sur le marché augmenteront considérablement. Sans un programme d’atténuation appropriée, les coûts économiques, sociaux, environnementaux et politiques seront sans précédent. »

Nous sommes à l’aube d’une grande révolution énergétique et il est de notre responsabilité de nous y préparer. Pour y faire face, nous devons faire pression sur nos gouvernements afin qu’ils mettent en place, de toute urgence, une stratégie d’indépendance aux énergies sales en passant par une redéfinition globale de notre mode de vie énergivore. Deviendrons-nous un modèle phare pour le reste du monde ou resterons-nous passifs en attendant les directives?

Pour demeurer au fait de l’actualité, nous vous invitons à joindre le groupe Facebook NON à une marée noire dans le St-Laurent.

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Pour poursuivre la réflexion :

Claude Villeneuve et François Richard, Vivre les changements climatiques : réagir pour l’avenir, Québec, Éditions MultiMondes, 2007.

Rob Hopkins, préface de Serge Mongeau, Manuel de Transition : de la dépendance au pétrole à la résilience locale, Montréal, Éditions Écosociété, 2010.

Normand Mousseau, L’avenir du Québec passe par l’indépendance énergétique, Québec, Éditions MultiMondes, 2009.

Ouvrage collectif sous la direction de Daniel A. Breton, Maîtres chez nous 21e siècle, MCN21, 2009.

Attention FragÎles, Les pieds dans l’eau, les orteils dans le sable : à la découverte de la mer, des dunes et des plages des Îles de la Madeleine, Cap-aux-Meules, Éditions de la Morue Verte, 2009.

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