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Bidonvilles en Floride

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Bidonvilles en Floride

Ah! La Floride, ses palmiers, ses plages, ses sans-abris. Comme bien des milieux ayant connu la prospérité, l’État de la Floride dissimulait de son mieux sa pauvreté et ses problèmes sociaux. Avec la crise financière de 2008, les vannes ont cédé. Des hordes de démunis errent sans même se cacher, aux portes du paradis.

Ouragans, tempêtes tropicales, hausse constante du coût de la vie, voilà les défis qu’ont dû relever les habitants de cet État du sud des États-Unis. La spéculation effrénée d’avant la crise a laissé croire à bien des gens qu’ils feraient des affaires d’or. La baisse soutenue des taux d’intérêt a facilité l’accès à la propriété. Encore fallait-il pouvoir trouver des maisons à prix raisonnable. La concurrence entre les acheteurs a fourni l’occasion aux vendeurs de hausser les prix. À leur tour, les entrepreneurs en construction ont flairé la bonne affaire et les mises en chantier ont augmenté substantiellement. Devant l’augmentation généralisée de la valeur des propriétés, les investisseurs ont grimpé dans le train. Bientôt, on a vu des gens de partout acheter leur maison en Floride comme un placement, comme un RÉER pour leurs vieux jours. En quelques mois à peine, une maison pouvait être revendue avec profit. Ensuite? Et bien, on en achète une autre. Pourquoi pas deux? Ou trois? Tant qu’à faire de tels placements lucratifs, pourquoi ne pas emprunter et investir?

Dans le sud de la Floride, la construction de maisons neuves a pris un rythme endiablé, déraisonnable. On a construit, construit sans relâche. Y a-t-il un marché pour toutes ces demeures? Qui viendra y vivre? Pourquoi ces questions puisque les affaires marchent?

Tout à coup, ça n’a plus marché. Comme toutes les bulles spéculatives, le mouvement de masse s’est arrêté lorsque le jeu a manqué de nouveaux joueurs. L’augmentation de la valeur des résidences n’était due qu’à l’apport constant de nouveaux capitaux. Les premiers investisseurs, les promoteurs à l’origine du mouvement se sont retirés, enrichis déjà depuis longtemps. Deux catégories de gens ont vu leur vie changer avec l’éclatement de la bulle immobilière : les petits épargnants cupides et les ouvriers se logeant à même les maisons qu’ils construisaient, croyant ainsi leur salaire brillamment investi.

Aujourd’hui, la valeur des maisons se situe entre la moitié et le tiers du prix payé il y a deux ans. Vendre veut dire tout perdre. Dans ce contexte, on ne construit pratiquement plus. L’emploi manque désespérément. Comment faire pour payer ces grosses hypothèques? Selon le journal Miami Herald, dans le sud de la Floride, un propriétaire sur quatre est en défaut de paiement. Beaucoup ont déjà fait faillite, ou ont été évincés de chez eux. Le filet social américain est assez perméable. Que faire alors? Où aller lorsqu’on est sans le sou?

Les pauvres ont pris d’assaut les campings privés, municipaux, ou de comtés. On vit sous la tente, avec ses meubles. Ce n’est pas si mal, il fait beau et chaud sous les tropiques. Certains, un peu plus haut dans la hiérarchie des pauvres ont un vieux véhicule motorisé. Au début, on s’encourage : c’est une solution temporaire fort acceptable. Et puis le temps passe. Avec un peu d’argent gagné ici et là, on arrive à joindre les deux bouts. Pour rendre le quotidien plus vivable, on s’équipe, on s’organise. Avec de vieux matériaux, on s’improvise un abri. Cette vieille voiture pourrie achetée à rabais, après quelques réparations, pourra être revendue à profit. On l’installe là, à côté de la tente-roulotte, en attendant. Pour avoir un peu de compagnie, on héberge un ou deux chiens. L’aboiement est permanent, l’hygiène est douteuse.

Inquiètes de la situation, les autorités agissent. Les gestionnaires des parcs du comté de Volusia ont préféré fermer des campings plutôt que de maintenir l’ordre dans ces villages de tentes. À Key Largo, la fermeture d’un parc de roulottes a été décrétée devant le nombre important d’infractions au code de la sécurité publique, particulièrement en matière d’incendie. 300 personnes parmi les plus pauvres se retrouveront à la rue.

Le phénomène gagne en importance et il n’étonne même plus. Ce n’est qu’une conséquence normale du taux de chômage qui dépasse par endroits les 15 %.

Et dire qu’il y en a parmi nos élus régionaux qui prient pour un développement économique rapide, bâti sur des projets farfelus et sans pérennité.

Croissance économique éclair sans lendemain? Non, merci.

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