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L’incohérence de la SAQ

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L’incohérence de la SAQ

La SAQ a remis des recettes 11 % plus importantes au gouvernement du Québec en 2011-2012 que l’année précédente, entre autres grâce à la délocalisation de plusieurs succursales. Au cours des dernières années, au Bas-Saint-Laurent, des succursales ont été déplacées de telle sorte que les clients doivent maintenant s’y rendre en voiture. Cela est incohérent avec nombre de politiques et de programmes du même gouvernement qui visent la réduction de l’obésité et des émissions de gaz à effet de serre. À la fin de l’exercice 2011-2012, la société d’État a versé 1,5 milliard de dollars au gouvernement du Québec, incluant les taxes. Cette somme est non négligeable considérant que le budget 2011-2012 du Québec contenait 65,4 milliards de dollars en revenus. La SAQ a donc contribué, pour l’année financière se terminant en mars 2012, à un peu plus de 2 % des recettes du gouvernement québécois. Comment la SAQ est-elle parvenue à réaliser une telle augmentation de ses ventes ? Il y a lieu de croire que la Stratégie immobilière 2010-2011, obtenue par Radio-Canada en octobre 2011, a contribué à l’augmentation des recettes de la SAQ. La société d’État prévoyait alors fermer des succursales afin d’accroître sa rentabilité.La SAQ a délocalisé ses succursales à Rivière-du-Loup et à Rimouski de telle sorte qu’il est beaucoup plus difficile de s’y rendre à pied ou en vélo qu’auparavant. À Rivière-du-Loup, en novembre 2012, la succursale de la SAQ a été déplacée à l’ouest du boulevard de l’Hôtel-de-Ville dans un immeuble commercial séparé, alors qu’elle se trouvait auparavant dans le stationnement du centre commercial et qu’il était aisé de marcher du centre commercial à la SAQ. Pourquoi ? Dans l’Info-Dimanche du 25 avril 2012, le porte-parole de la SAQ, Renaud Dugas, affirmait : « Après avoir fait des études de marché et avoir regardé les habitudes de magasinage des gens, on a décidé de suivre la clientèle… Nos nouveaux locaux passeront de 7 400 à 9 200 pieds carrés […] et compteront 50 places de stationnement. » À Rimouski, deux succursales situées au centre-ville ont été fermées en 2010. La même année, une nouvelle succursale a été construite dans la zone commerciale près du Wal-Mart (officiellement appelée la Cité des achats). Autrement dit, dans ces deux villes, aller à la SAQ à pied ou en vélo est désormais périlleux et non commode ; mieux vaut prendre sa voiture. La délocalisation des succursales de la SAQ cadre avec sa mission, laquelle consiste à faire des profits qu’elle verse par la suite au gouvernement. En d’autres termes, la SAQ respecte son profil : « La SAQ est une société d’État qui a pour mandat de faire le commerce des boissons alcooliques et pour mission de bien servir la population de toutes les régions du Québec en offrant une grande variété de produits de qualité. 1 » Si les Québécois délaissent les emplettes à pied et préfèrent se rendre dans les commerces en voiture, la SAQ a pour mandat de s’adapter à ce changement de comportement en établissant ses succursales dans les endroits qui garantissent une rentabilité maximale. Ce qui cloche, c’est l’incohérence entre la SAQ et nombre de politiques et de programmes créés par d’autres ministères et organismes au Québec. Cette incohérence est particulièrement flagrante en matière de lutte contre l’obésité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les objectifs du Programme national de santé publique (2008) et du Plan d’action gouvernemental de promotion des saines habitudes de vie et de prévention des problèmes reliés au poids (2006) du ministère de la Santé et des Services sociaux visent la réduction d’une série de maladies liées à des facteurs qui caractérisent l’environnement des citoyens, notamment par l’adoption d’approches touchant la réduction des gaz à effet de serre et la promotion d’un mode de vie actif. Parallèlement, les objectifs du Plan stratégique 2008-2012 ainsi que la Politique sur le vélo (2008) du ministère des Transports ont pour objectifs de soutenir la réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’encourager l’usage du vélo. Les calories brûlées et les émissions de gaz à effet naguère épargnées en marchant ou en pédalant à la SAQ plutôt qu’en y allant en voiture démontrent la difficulté pour le gouvernement québécois de mettre en œuvre des politiques et programmes qui ne se contrecarrent pas les uns les autres. Il ne fait aucun doute que la localisation des succursales de la SAQ à l’extérieur des centres-villes nuit aux objectifs de réduction de l’obésité et d’émissions de gaz à effet de serre du gouvernement du Québec. Cette délocalisation garantit des revenus à court terme ; à long terme, pour le gouvernement, les coûts de l’obésité et des changements climatiques ne vaudront pas les recettes engrangées. 1 SAQ. « À propos » : www.saq.com

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