
Les mots s’accouplent en vol /
Cherchent le vers pendant la chute / Nuptiale /
Plusieurs catastrophes doivent se produire / Dans un poème
Dans son nouveau recueil intitulé Carnets migratoires, Dany Héon nous invite dans un voyage au cœur de l’écart. La migration commence par un rapatriement. Le flamboyant appel de l’envol prend naissance dans le berceau déchirant de l’attente : « Je me tiens immobile / contenant le raid céleste / le cœur en trombe / l’ossature incandescente ». L’écriture prend corps dans le goût d’une fin qui prédit un invisible ailleurs, chaque poème comme un nouveau pas dans la traversée du vide qui les sépare.
Le poète vacille entre l’ombre et la lumière, jongle entre la souffrance et la beauté, la solitude et la rencontre, et vient nous enseigner le consentement à l’existence de cette dualité comme voie de dépassement : « C’est par une sorte d’abandon / Que je cesse de craindre / La mort ». La traversée en vaut la chandelle : nous sommes propulsés dans d’intimes moments de rencontre, où la passion sauvage et la sensibilité du poète s’entremêlent et se confondent pour célébrer la femme dans un éloge profondément sensuel. Partout où le regard se pose, il est amoureux, partout il décèle la noblesse de la beauté qu’il nous transmet avec finesse : « Ta peau peinte à la main / De tous les tons du sable / Ta crinière obscure ».
De corps en corps, de terre en terre, la poésie de Dany Héon est une poésie de l’impermanence, à la lisière du réel et de l’imaginaire. Chaque tableau prend forme et s’évanouit aussitôt dans la fuite du temps, l’écriture comme tentative de tissage entre une multitude d’instants « éparpillés » dans une course à l’intensité.
Carnets migratoires est le témoignage inspirant d’un corps animé par la beauté du vivant, d’un être en marche qui nous convie avec ardeur au sein de la quête d’une liberté à gagner.