Marc Fafard, porte-parole de Sept-Îles Sans Uranium (SISUR), fait le point sur l’exploration et l’exploitation uranifère sur la Côte-Nord.
Mouton NOIR – Comment la mobilisation citoyenne s’est-elle mise en place ?
Marc Fafard – En 2008, nous avons entendu parler du premier permis émis pour le déboisement au lac Kachiwiss. À l’automne 2008, les médecins de Sept-Îles ont fait une sortie en disant qu’ils déménageraient si l’exploration pour l’uranium se poursuivait. C’est ainsi que le comité citoyen SISUR a été formé. […] À la suite d’une première manifestation en janvier 2009, la Ville a voté un moratoire pour demander une consultation du BAPE sur les mines d’uranium. […]
Il faut dire que Sept-Îles a une importance particulière en ce qui a trait aux mines et aux ressources naturelles. La Côte-Nord fournit 40 % du PIB en ressources naturelles du Québec. Sept-Îles est dans la ligne de mire. Beaucoup de gens travaillent, entre autres, au transport des 25 millions de tonnes de minerais qui transbordent par le port de Sept-Îles, qui est un des plus beaux ports en eau profonde du Québec. […]
M. N. – Quel est le plus grand danger lié à l’exploitation uranifère et à l’énergie nucléaire ?
M. F. – Ce qu’on dit le comité SISUR, c’est que ce ne sont pas les centrales nucléaires qui nous intéressent, ce sont les mines. On veut savoir comment les résidus miniers vont être contenus. On demande à l’industrie de nous démontrer que le confinement des résidus va être bien fait. Ce qu’on nous dit, c’est qu’il y a des normes. Pourtant, dans la phase d’exploration, il n’y en a pas. […]
Avec des mines à ciel ouvert, ce sera impossible de contrôler la perte de particules radioactives dans la nature, puisque nous nous trouvons dans le bassin versant du fleuve Saint-Laurent. Peu importe l’emplacement des mines dans le nord, ça va toucher la population au sud, puisque les contaminants vont venir par l’eau. […] Il n’y a pas de matériaux qui sont actuellement capables de contenir les résidus miniers de façon adéquate durant les 100 000 ans de radioactivité. […]
La première mine uranifère est prévue en 2012 dans les monts Otish. C’est un territoire conventionné par la Convention de la Baie-James, donc en partie sous juridiction fédérale, ce qui complique le processus d’évaluation environnementale. […] Le fédéral a annoncé qu’il va assouplir la règlementation pour favoriser l’investissement. Il n’y aura plus de dédoublement d’études environnementales entre les deux paliers de gouvernement. De son côté, Jean Charest a déjà annoncé qu’il n’y aurait pas de consultation du BAPE parce que c’est un territoire fédéral. […]
Ça nous met en furie parce qu’on voit la renaissance du nucléaire partout dans le monde sous prétexte que cette façon de faire de l’énergie ne produit pas de gaz à effets de serre. Pourtant, sur douze centrales CANDU au Canada, il y en a huit de fermées. […] et même en Ontario, on ne parle pas de rouvrir les centrales en fonction. Les problèmes nombreux des réacteurs CANDU pourraient mener à des accidents nucléaires comme à Three Mile Island ou à Tchernobyl. […]
M. N. – Que demande SISUR et comment les citoyens peuvent-ils s’impliquer dans le dossier ?
M. F. – Nous demandons la modification de la loi pour extraire les zones municipales des activités minières uranifères. […]
L’objectif est de rallier les 40 municipalités entre Tadoussac et Blanc-Sablon. […] On part du fait que le Plan Nord veut respecter les principes de développement durable. On est en train de faire une demande au Centre d’aide technologique pour avoir un avis technique sur la durabilité de l’activité de l’exploration uranifère. […]
Nous sommes confiants qu’il va y avoir un moratoire. La population ne peut pas être prise en otage par le gouvernement qui n’est là que pour quelques années. Il n’a pas le mandat, en termes de temps et de territoire, de soutenir cette industrie sans que les populations soient impliquées. […] La Nouvelle-Écosse a pris des mesures pour protéger son eau de l’extraction minière, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick aussi. […]
Nous invitons les citoyens à participer au processus de modification sur la loi des mines en déposant un mémoire à la Commission parlementaire fédérale sur les mines. […] Il faut que les citoyens se réveillent pour assurer la souveraineté du Québec en matière d’exploitation uranifère. C’est notre territoire qui va être souillé si on s’embarque dans l’aventure.
Pour poursuivre la réflexion, nous vous invitons à visiter le site du comité citoyen SISUR : http://sisur.ca.