
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Dans l’article 9 du Règlement sur les habitats fauniques, une interdiction d’activité minière sur tous les habitats d’espèces menacées est posée. Mais cette interdiction stipule une exception : celle de l’habitat du Caribou de la Gaspésie. L’article 12.1 du même règlement contient des « limitations » à cette exception, comme la nécessité de fournir un avis écrit avant 2 semaines, destiné au ministère de l’exploitation forestière et minière, pour informer la mise en place de travaux d’exploration. Cet avis n’est pas une demande d’autorisation ou de permis, mais une simple information.
Or, le ministère de la faune ne détient aucun avis écrit conforme à l’article 12.1 de la part de l’entreprise Ressources Appalaches qui a effectué plusieurs forages miniers depuis 2001. La conséquence est que nous n’avons aucune assurance que l’exploration minière reste dans les limites qui lui sont imposées.
En résumé, l’exception permet de réaliser des explorations minières dans l’habitat légal du Caribou. Sachant que le caribou est particulièrement vulnérable à ce type d’activité industrielle. « Comme toutes les espèces menacées ou vulnérables, le caribou de la Gaspésie mérite une protection rigoureuse de son habitat si nous voulons avoir une chance de sauver cette population unique de l’extinction » précise Alice-Anne Simard de Nature Québec.
Mais une question demeure : pourquoi une telle exception ?
La réponse est simple, les mines et les claims ont des privilèges sur le territoire. Leur importance est plus grande que les autres secteurs. Aucun mécanisme d’empêchement ou de régulation et de contrôle de cette forme d’industrie n’est produit.
Pour Louis Fradette du Comité de protection des monts Chic-Chocs, « On constate une fois de plus la préséance des activités minières sur tous les autres usages du territoire, y compris la protection des espèces en péril. Le gouvernement doit agir pour mettre fin à cette préséance lorsque la survie de milliers d’années d’évolution est en jeu ».
Comme le précise Pascal Bergeron d’Environnement Vert Plus, « En creusant l’histoire du règlement sur les habitats fauniques, on constate que des intérêts privés peuvent intervenir pour l’obtention de modifications réglementaires en leur faveur, de manière assez opaque ».
Ce sont sur ces graves problèmes qu’une coalition de groupes environnementaux demande une levée immédiate du régime d’exception minière à l’égard du Caribou de la Gaspésie, sous peine de voir l’espèce s’éteindre. Mais également que la ministre des Ressources naturelles et des Forêts et ministre responsable de la Gaspésie, Maïté Blanchette-Vézina, ordonne la cessation des travaux miniers et le retrait des claims dans l’habitat légal du caribou, cela dans tout rayon additionnel jugé pertinent.
Aujourd’hui, on peut retirer un claim sous prétexte d’« utilité publique ». Il faut que cet article (article 82) soit transformé en « intérêt public » pour inclure les espaces naturels.
Car actuellement, le Caribou compte entre 30 et 40 individus, le nombre tend à se stabiliser ces dernières années, mais il suffit qu’une ou deux années consécutives voient son nombre de naissance drastiquement réduit pour péricliter l’espèce. « La protection du caribou et de son habitat ne peut se réaliser que dans l’optique globale d’un écosystème sain », précise Margret Grenier de ZICO de la Baie de Gaspé
C’est pour cette raison que la coalition demande également l’élargissement de l’habitat légal du caribou de la Gaspésie afin de tenir compte de la superficie de territoire nécessaire à la survie de la population tout en cessant de prendre en compte les intérêts particuliers, forestiers et miniers. L’habitat légal au moment de l’adoption de l’exception caribou, en 2001, couvre à peine le parc de la Gaspésie. L’élargissement de 2011 y ajoute quelques parcelles mineures. Or, actuellement même si le territoire du Caribou est élargi, les activités minières continuent à être exercées dans les zones intéressantes pour le Caribou, ce qui chasse le peu qu’il reste.
Pour enlever cette exception et protéger le Caribou, mais aussi la faune et la flore, il faut adresser au gouvernement une demande de retrait de cette préséance. À savoir que la ministre responsable de la foresterie et des activités minières possèdent un bureau à Rimouski ; un mouvement citoyen à cette place aurait un fort impact.
Toute personne intéressée peut militer pour la sauvegarde du Caribou et de la biodiversité de la Gaspésie en rejoignant l’un des groupes environnementaux :
Environnement Vert Plus et Le Comité de protection des monts Chic-Chocs.
Sources :
Règlement sur les habitats fauniques, RLRQ c C-61.1, r 18 : https://www.canlii.org/fr/qc/legis/regl/rlrq-c-c-61.1-r-18/derniere/rlrq-c-c-61.1-r-18.html?autocompleteStr=Règlement%20sur%20les%20habitats%20fauniques%2C%20RLRQ%20c%20C-61.1%2C%20r%2018&autocompletePos=1#document
L’article 9 du Règlement sur les habitats fauniques : https://www.canlii.org/fr/qc/legis/lois/rlrq-c-c-61.1/derniere/rlrq-c-c-61.1.html#art128.6_smooth