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Nouveau « milieu de vie » à Pointe-au-Père

Par Mathieu Perchat le 2023/05
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Nouveau « milieu de vie » à Pointe-au-Père

Par Mathieu Perchat le 2023/05

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

                La ville de Rimouski annonce l’organisation d’une séance d’information le mercredi 10 mai à 19 h. Cette rencontre porte comme objectif de donner des informations sur le projet Pointe-au-Père dans son ensemble et sur la zone visée, et ce, « pour bien amorcer la phase de consultation citoyenne ». Mais il semble que la consultation citoyenne n’a lieu d’être concernant la pertinence même de réaliser le projet Pointe-au-Père.

Car au regard de la description du projet visible sur le site de la ville, il semble que tous les objectifs sont déjà bien en place, et cela bien avant la phase de consultation citoyenne.

Encore une fois, la crise du logement devrait permettre à la municipalité de repenser la conception de la ville afin de pouvoir lutter contre le réchauffement climatique tout en favorisant l’accès à des logements abordables. D’autant plus que ce sont les pouvoirs publics qui sont en mesure de nous offrir les infrastructures pour réduire notre impact. Et ce n’est pas en créant « un milieu de vie » situé à 2h de marche[1] de la ville, encourageant davantage l’utilisation de la voiture, que l’on va pouvoir construire un milieu de vie pérenne et durable.

Ainsi, nos manières de consommer, de nous déplacer, de nous chauffer et de nous nourrir dépendent de déterminants collectifs.

Pour rappel, pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, il faudrait réduire de moitié nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, et être neutre d’ici 2050. Or, ce n’est pas avec ce type de projet qui continue à promouvoir un mode de vie écocide, une minéralisation des sols, un étalement urbain, une production donc une consommation de ressources pour construire de nouveaux logements, alors qu’il faudrait densifier la ville, revoir la place de la voiture, favoriser des modes d’habitations collectifs et rendre la vie plus saine (espace vert, etc.).

                Faut-il rappeler que le rapport du GIEC indique clairement que les villes sont vulnérables aux changements climatiques, mais aussi qu’elles sont indispensables pour créer des solutions pour le changement climatique. Selon Debra Roberts, coprésidente du Groupe de travail II du GIEC, « les villes offrent aussi des possibilités d’agir pour le climat – des bâtiments écologiques, un approvisionnement fiable en eau propre et énergie renouvelable, des modes de transport durables reliant les zones urbaines et rurales peuvent tous créer une société plus inclusive et équitable. »

Le Plan pour une économie verte (PEV), créé au Québec en mars 2022 pour répondre aux indications proposées par le dernier rapport du GIEC, a amené l’adoption d’une réforme du cadre d’aménagement du territoire et d’urbanisme. Cela dans le but de mettre fin à l’ère de l’étalement urbain sur les milieux naturels. Il semble que la ville de Rimouski et ses élus sont passés à côté de cette information cruciale. Les solutions à court terme ne sont plus à privilégier, en raison de leurs conséquences certaines sur le long terme. Il est certain que repenser l’aménagement d’une ville demande beaucoup de travail, mais il existe des cabinets et des aides extérieures pour réaliser un tel projet. Par exemple, il y a Vivre en ville qui offre son expertise dans le domaine d’un aménagement durable. En résumé, une adaptation rapide des milieux de vie aux changements climatiques permettra aux municipalités d’éviter des coûts importants dans les années futures.

Le rapport du GIEC est formel : « Des efforts ambitieux des villes vont inclure des mix de politiques pour réduire ou changer la consommation énergétique et matérielle, agir conjointement sur l’aménagement du territoire (localisation, densité, connectivité, accessibilité, infrastructures pour la marche et le vélo) et l’électrification des transports et augmenter le potentiel de capture et d’adaptation des milieux naturels et infrastructures vertes et bleues » (SPM-39-41, TS-65). Ou encore « Le rapport propose de miser sur des approches qui réduisent les GES et créent les conditions pour une autre forme de développement, dans les villes et les banlieues, notamment en assurant l’accès et l’abordabilité du logement et du transport collectif » (4-79, 4-90).

Le pire de tout, c’est que le gouvernement du Québec a réalisé un Guide destiné aux Municipalités en 2011 pour élaborer un plan d’adaptation face aux changements climatiques, disponible en tout temps et lieu sur le net. Les alternatives sont déjà présentes depuis longtemps. Un guide mis à jour est également disponible (voir source).

                Ce n’est pas en construisant un nouveau quartier au détriment d’espaces naturels que l’on va réaliser un tournant majeur dans la façon de faire de la Ville. Ce n’est encore une fois que de l’étalement urbain. Ce tournant majeur serait plutôt une transformation de la ville actuelle. Et non re remobiliser des ressources pour en construire une plus loin.

Comment un tel projet peut encore être en vigueur alors qui va à l’encontre de tous les défis écologiques que l’on commence seulement à ressentir au Québec ? Alors qu’il existe bien d’autres solutions connues, réalisables, bien moins couteuses humainement et qui favorisent une justice sociale, la ville de Rimouski continue à se murer dans sa décision de réaliser ce projet écocide.

Car ce projet, aussi vert soit-il, ne va faire que s’ajouter aux pressions environnementales que produit la ville, qui elle reste inchangée. Car il s’ajoute à la ville, au lieu de se servir de toutes ces ressources et ce budget pour amorcer les changements et rebâtir une ville comme un milieu de vie habitable. Car actuellement, et grossièrement, la ville est un lieu de transport et de commerce. Ce n’est pas normal qu’on soit obligé de s’extraire de la ville pour se ressourcer psychologiquement. Le bien-être devrait être autour de nous. C’est donc l’acceptation d’un statu quo que prend la ville de Rimouski au lieu d’amorcer sa transformer.

Il est urgent d’agir.

Sources 

https://rimouski.ca/tourisme/projets-majeurs/nouveau-milieu-de-vie-pointe-au-pere?fbclid=IwAR3HNXlN4DyOIVVjrNwksXSB8DTMufsIIyM6e9oOr5wxTPL8yheqqF5Ijyc

Le guide en question : https://www.environnement.gouv.qc.ca/programmes/climat-municipalites2/Plan-adaptation.pdf

Le guide de 2022 : https://umq.qc.ca/wp-content/uploads/2022/03/guide-climat-reglementation-29mars22.pdf

https://vivreenville.org
https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg2/resources/press/press-release-french/
https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2021-08-14/le-municipal-palier-efficace-pour-s-attaquer-a-la-crise-climatique.php

Un comité qui lutte contre ce projet et pour des logements : mobilisation.foret.magique@gmail.com ou sur facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100089636870267


[1] Resitué à l’échelle de l’individu, on constate que ce projet demande obligatoirement un moyen de transport pour se rendre en ville, donc une mobilisation de ressources évitables et un impact environnemental.

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