Actualité

Un système hégémonique pernicieux

Par Mathieu Perchat le 2023/04
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Un système hégémonique pernicieux

Par Mathieu Perchat le 2023/04

L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local

En prévision de la journée du 22 avril, plusieurs évènements sont organisés sur le thème de l’écologie, la transition écologique, etc.

En plus d’être des lieux d’informations, d’ouverture et de partage, ils sont un espace avec un fort pouvoir démonstratif d’alternatives. En effet, par la structuration de l’évènement, il leur est possible de contribuer à démontrer non par des mots, mais par des actes, comment peut-on reconstruire une vie quotidienne en correspondance avec les valeurs promues.

Il est toujours difficile de pointer les faiblesses de ces événements, car à la fois ils relèvent d’un gros travail bénévole, et que des objections provenant de leur propre camp pourraient offrir du grain à moudre aux détracteurs déjà suffisamment hégémoniques. Il faut donc voir dans cet article non pas une critique ces évènements, mais de contribuer à leur évolution positive.

L’élément pointé très présent dans notre vie quotidienne, est un produit de base qui illustre le système antiécologique dans lequel nous nageons malgré nous. Ce qui est pointé ici est un produit offert au public, et je parle ici de la buvette chaude : le café.

À la suite de cet article, nous constaterons que proposer du café au Canada, et plus particulièrement au BSL dans un évènement écologique est aussi aberrant que d’offrir des chandails réalisés en Inde par des personnes exploitées comme contrepartie à un don réalisé en faveur de la pauvreté dans le monde. Mais surtout, que ces événements recèlent en eux la possibilité de montrer comment créer une convivialité autour de breuvages éthiques.

Niveau écologique

                La consommation mondiale de café est en forte croissance, pour y répondre, il faudra doubler la production sur des terres réduites de moitié. Car les cultures de café poussent principalement à une certaine altitude en Amérique du Sud, qui avec le réchauffement climatique diminue les surfaces et demande de monter toujours plus haut.

C’est pourquoi ces cultures forcent une déforestation sous le mode d’une monoculture. Cette pratique détruit l’habitat de milliers d’espèces animales et végétales et les met en péril. Ce qui entraine par la même occasion les pratiques liées à la monoculture : surexploitation des sols ou encore utilisation d’engrais et pesticides chimiques interdits en Amérique du Nord et Europe, en raison de leur haut taux de toxicité.

D’ordinaire, le café pousse à l’ombre des grands arbres, ce qui produit la nécessité de beaucoup l’irriguée lorsqu’il est cultivé en monoculture. De ce fait, le café entraine une grande consommation d’eau.

Ainsi, cette forte demande de café provenant des pays du Nord engendre ce mode de production (monoculture, déforestation, usage de produits chimiques à haute toxicité, forte utilisation d’eau, appauvrissement des sols). Sans parler ensuite de l’emballage, aussi bien primaire, secondaire que tertiaire, une fois le café produit. Il représente 30% des émissions de CO2.

         Le café, un produit colonialiste et injuste

                Parlons justement des personnes qui sont derrière la production de café. Pour que nous ayons droit à notre café matinal afin de nous rendre prêts à être productif.ve, de nombreuses familles du Sud ont dû travailler laborieusement, exposées aux produits chimiques pour en récolter un maigre prix. Les caféculteurs guatémaltèques gagnent 3 $ par jour pour cueillir en moyenne 100 livres de café. Leur production est alors exclusivement destinée à l’exportation, ce qui engendre une malnutrition chez les caféculteurs. L’agriculture de subsistance n’a plus de place, à la fois en termes d’effort, de temps, mais aussi d’espaces cultivables.

Cette différence énorme entre le petit plaisir quotidien qu’on peut avoir contre la grande souffrance qu’il engendre en retour provient d’un héritage colonialiste qui exploitait la force de travail des personnes du Sud.

L’héritage colonial réside dans la dépendance économique des pays du Sud envers les pays du Nord par l’exploitation de ces matières premières. En effet, le commerce international des matières premières, comme le café ou encore le chocolat, est un héritage du passé colonial. Et ce sont les métropoles consommatrices de ces matières premières qui dictent les prix. Alors que ces matières premières devraient nourrir les personnes qui les cultivent (ou aux alentours).

Pour consommer un café respectueux de l’environnement, l’idéal est alors de se tourner vers une certification biologique et équitable. Une production équitable est certifiée par un label, dont le plus fiable est Fairtrade. Car ce dernier offre une protection financière pour les producteur.es de café, en les mettant à l’abri de la spéculation des prix. Mais le véritable problème réside dans la surdemande de café, dans une consommation quotidienne, comme s’il était un produit de base pour les pays du Nord, alors qu’il ne l’est pas.

Ainsi, il serait peut-être bon temps de penser à notre consommation de produits importés pour se tourner vers nos produits locaux pour que les personnes du sud puissent enfin vivre de leurs ressources et de leur labeur (qui sera bien réduit).

Sources

https://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/bs1867599
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1646584/cafe-filtre-capsule-ecologique-energie-forets

Sur le même sujet : Samy Manga Chocolaté. Le goût amer de la culture du cacao

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