
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Tant d’éléments nous demandent de ne pas accepter ce projet complètement adhérant au regard des enjeux de notre époque. L’angle considéré ici prend comme présupposé que la lutte contre le réchauffement climatique doit être incluse dans chaque nouveau projet. Cette lutte doit guider la cohérence d’un projet.
Au Québec, le transport génère la plus importante source d’émissions de CO2, avec 43 % des émissions totales en 2016, dont 80 % provenaient des transports routiers (MDDELCC, 2018). Une analyse plus fine de l’inventaire québécois révèle que les émissions de CO2 provenant des transports routiers ont augmenté de 52 % entre 1990 et 2016, dont l’essentiel est attribuable aux émissions des camions légers (+125 %) et des véhicules lourds (+171 %) (TRANSIT, 2018).
L’argument qui justifierait la création d’une nouvelle route serait celui de la congestion. Or, une telle création engendre une demande supplémentaire, ce qui produit au fil du temps l’atteinte d’un nouveau seuil de congestion équivalent à celui de l’ancienne route. Ce phénomène a été nommé par Anthony Downs « la loi fondamentale de la congestion autoroutière » en 1962. Et cette loi a été de nombre fois validée par des études, en variant les contextes.
Pour faire simple, la loi de la congestion se compose de plusieurs phénomènes : en raison de la diminution du temps de trajet que produit ce nouveau segment, les usagers et usagères vont être incité.es à augmenter leur fréquence de trajet, à choisir la voiture plutôt que les transports en commun, à déménager en zone rurale, etc. Ce qui est clair, c’est qu’« on ne peut sortir du trafic en construisant des routes » (Tremblay-Racicot, 2019).
Un autre argument pour la construction mobilise la création d’emploi et le développement économique. Or, en plus des coûts financiers importants engagés dans cette réalisation en termes de pollution et de finance, aucune recherche n’a pas établir une corrélation entre augmentation de la capacité routière avec l’emploi et l’activité économique.
En conclusion, « L’augmentation de la capacité routière semble ainsi être une fausse bonne idée qui, en plus d’être inefficace pour atténuer la congestion, ne comporte peu ou pas d’effets directs et indirects positifs pour les régions urbaines, que ce soit en termes économiques, sociaux ou environnementaux » (Tremblay-Racicot, 2019). Car ce prolongement va couter cher aux contribuables, à la fois en termes de santé, d’économique et de justice sociale. Sans parler de la destruction d’espaces naturels qui doivent être préservés pour lutter contre le réchauffement et se diriger vers un système qui diminue ses GES.
Si l’objectif du prolongement de l’autoroute 20 est de diminuer le trafic, la seule méthode réellement efficace se situe dans la gestion de l’offre routière : dans la ligne directrice de la loi fondamentale de la congestion autoroutière, si l’offre routière diminue, alors la demande se réduit, donc son influence.
Sources :
Le rapport L’aménagement du territoire au Québec : https://www.mamh.gouv.qc.ca/amenagement-du-territoire/documentation/
Tessier, M-A. (2015). Développement d’indicateurs d’analyse et de suivi de la congestion routière (Mémoire de maîtrise, Université de Montréal)
Conseillers ADEC inc. (2018). Les coûts socioéconomiques de la congestion routière à Ville de Laval et dans la Couronne Nord. Dans Communauté Métropolitaine de Montréal. Suivi du PMAD 2012-2018. Cahiers Métropolitains, 7, p. 46.
McCubbin, D. et Delucchi, M. (2003). The Health Effects of Motor Vehicle-Related Air Pollution. Dans D. Hensher et K. Button (eds.). Handbook of Transport and the Environment ( 411-428). Oxford : Elsevier.
Environnement et Changements climatiques Canada (ECCC) (2019). Rapport d’inventaire national 1990-2017 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada – Sommaire.
TRANSIT (2018). Prochaine station, l’écofiscalité : Réduire les émissions de gaz à effet de serre en transport au Québec en tarifant adéquatement les déplacements motorisés.
Duranton, G. et Turner, M.A. (2011). The Fundamental Law of Road Congestion: Evidence from US Cities. American Economic Review, 101, 2616-2652.
Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC) (2018). Inventaire québécois des émissions de gaz à effet de serre en 2015 et leur évolution depuis 1990.
Fanny Tremblay-Racicot, « la loi fondamentale de la congestion routière et l’efficacité des interventions publiques visant à réduire la congestion », Le Climatoscope Enjeux de société, no1, septembre 2019.