
L’auteur fait partie de l’Initiative de journalisme local
Toujours dans cette volonté de revitaliser le centre-ville, de le rendre accueillant et profitable à tout.es, une problématique doit être soulevée : celle de l’absence de toilettes publiques.
Lorsqu’on pense aux lieux publics, les toilettes viennent très rarement à l’esprit. Pourtant, un tel lieu est fondamental pour pouvoir réaliser un besoin urgent d’intimité, de solitude et de sécurité. L’absence de toilettes publiques relève de questions beaucoup plus générales liées à la sécurité, à l’accessibilité, au genre, etc. (Kern, 2019, p. 125).
Souvent, ce sont les grands magasins ou encore les centres commerciaux qui fournissent des toilettes confortables et accessibles pour tout.es. Mais lorsqu’on est en ville, le problème de trouver une toilette se manifeste clairement.
La question est : pour quelle raison la ville (public) ne fait pas une priorité de la création de toilettes publiques, au lieu de laisser cette charge aux magasins (privé), aux institutions, aux cafés, etc. Alors qu’au début de la croissance des villes, les pouvoirs publics reconnaissaient le besoin de la population à avoir accès aux toilettes publiques (Lowe, 2018).
Cependant, ces lieux ne garantissent pas un accès systématique à leurs toilettes, protégées par un code, ou un système de clés. L’accès se voit aussi souvent échangé par une consommation obligatoire ; ce qui limite leur accès à des personnes qui ont les moyens. Tout ça pour contrôler les accès et les activités qui s’y déroulent.
L’enjeu de l’accessibilité est en réalité une affaire très genrée. Pour beaucoup de femmes, le temps de toilettes est beaucoup plus long que celui des hommes. Se soulager, composer avec les menstruations, l’ajustement des vêtements, tout cela sans compter le besoin de papier hygiénique, un endroit où placer son manteau et son sac, mais également une porte pouvant se verrouiller. Et à cela s’ajoute, plus que pour les hommes, la gestion des bébés, des enfants et des ainées. Or, l’analyse de Lowe révèle que très peu de toilettes publiques assurent la possibilité de réaliser ces fonctions essentielles.
L’absence ou plutôt la rareté, ainsi que l’inadaptation des toilettes publiques proviennent du fait que la majorité des architectes et urbanistes sont des hommes. Lowe explique que, par exemple, les menstruations « sont un mystère presque total pour les hommes (principalement) cis qui conçoivent et installent les toilettes dans les bâtiments et lieux publics » (Lowe, 2018, p. 111).
C’est l’une des principales raisons qui rend les toilettes publiques inexistantes et inappropriées quand elles existent. Pour qu’un lieu puisse accueillir chaque personne, cela est nécessaire de garantir un accès aux toilettes adaptées à tout type de corps (femme, homme et autres).
Sources :
Rebekka Endler, Le patriarcat des objets, Paris, Édition Dalva, 2022, p. 46-48.
Lesli Kern, Ville Féministe. Notes de terrain, Toronto, Édition, remue-ménage, 2019, p. 125-131.
Lezlie Lowe, No Place to Go: How Public Toilets Fail Our Private Needs, Toronto, Coach House, 2018.