
Alors que Justin Trudeau planifie ses vacances en famille dans la maison luxueuse d’un riche ami de la famille; que François Legault vend son palace pour 5 millions$; que nos élu.e.s municipaux passent leur week-end dans leur deuxième habitation sur le bord d’un lac; que notre maire n’entend pas sévir contre AirBnB; à Rimouski, pour le commun des mortels, la crise du logement est crissement violente.
Une étude du Regroupement des comités de logements et associations de locataires du Québec confirme que le loyer moyen à Rimouski a bondi de 18 % en une année. Pire, ces prix continueront d’augmenter. Parmi le plus dramatique au Québec, le taux d’inoccupation à Rimouski avoisine toujours 0,2 %.
Le maire de Rimouski, Guy Caron, davantage proche du milieu des affaires que de la population, semble dire qu’il suffit de construire n’importe quel type de logement pour régler le problème de la crise. « On est en pénurie de logement de luxe et abordable », affirme notre maire dans les médias. Mais quel pignouf oserait affirmer ceci devant des familles à la rue ou endettées par leur loyer trop cher? « Il manque de logements de luxe…bon déménagement, là! »
Le sait-il, notre maire gatinois de Rimouski, que l’Observatoire des tout-petits rapporte que la hausse du coût de la vie et la rareté des logements forcent les familles à faire des choix déchirants qui ont un impact sur le développement de leurs enfants?1 Pour être capable de payer leur loyer, une forte proportion de parents québécois doivent limiter leurs activités avec leurs enfants et doivent même réduire leurs dépenses pour la nourriture et les vêtements.
Augmentons l’offre, peu importe l’offre, nous dit la classe dirigeante, et un effet de ruissellement immobilier s’enclenchera, libérant des logements jusqu’aux classes plus défavorisées. Or, c’est faux. Une nouvelle étude2 de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) confirme qu’il ne suffit pas de construire des logements.
Simplement augmenter l’offre de logements : un mythe de droite!
L’IRIS nous explique : « La pénurie de l’offre de logements locatifs abordables et sociaux, amplement documentée, nécessite bien évidemment une réponse des gouvernements à la hauteur des besoins. Mais cette pénurie de l’offre est condamnée à demeurer chronique si une certaine culture de stimulation et de soutien de la demande au Canada n’est pas revue et corrigée en profondeur. Cela impliquerait, notamment, l’introduction de mesures fiscales qui décourageraient la demande spéculative — l’investissement privé —, qui s’arroge une part toujours grandissante d’une offre déjà insuffisante. Il serait souhaitable, autrement dit, que les marchés immobiliers soient réglementés de manière à envoyer le signal suivant : si vous êtes à la recherche de profits rapides, l’immobilier canadien n’est pas un choix judicieux pour investir votre capital. Au lieu de répéter en choeur le mantra « il faut augmenter l’offre », peut-être serait-il temps de considérer sérieusement les questions suivantes : pourquoi faut-il encore augmenter l’offre ? Et, surtout : à quel type de demande cette offre s’adresse-t-elle? »
Autrement dit, les gouvernements doivent se demander à qui servira l’offre accrue. Les gouvernements devront aussi contrôler la demande. Il ne suffit pas d’augmenter l’offre à tous vents, mais aussi de contrôler la demande pour empêcher les spéculateurs de s’emparer de l’offre. Bâtir pour bâtir et augmenter les prêts pour l’accès au logement ne doivent pas servir les spéculateurs et les propriétaires-entreprises.
La cause!
Julien Simard, chercheur postdoctoral à l’école du Travail Social de McGill, résume bien l’idéologie qui nous conduit à cette injustice : « La crise du logement n’est que le fonctionnement normal du capitalisme. Ce n’est pas une «crise» ou une anomalie. Seulement la violence de classe qui montre ses démons. Ce qui est en «crise», c’est le vernis discursif et symbolique qui permettait aux Québécois.e.s de penser que la question du logement «n’est pas si pire que ça ici», car la classe moyenne est maintenant impactée big time. Après dix ans de gens qui «tombent en bas de leur chaise» en constatant ceci, hâte que les analyses journalistiques se rendent là, dans l’identification des structures sous-jacentes. Non, la CAQ ne fera rien même si le Québec au complet se met à genoux en réclamant «un peu d’humanité». Le droit au logement est un conflit, une lutte des classes. Pas une sortie aux glissades d’eau. Seule une large mobilisation, des squats, un front multiple, colérique et nerveux pourra leur faire peur. Le FRAPRU, le RCLALQ et les camarades des comités en font déjà assez. Il faut que ça déborde ce milieu exsangue, au front de la misère sociale depuis tant d’années. »
La crise du logement est avant tout idéologique.
Sortir de la logique lucrative
Chantal Desjardins, directrice générale de la Fédération des OSBL d’habitation, propose une autre vision du développement immobilier classique : « Les organismes en habitation à but non lucratif ne cherchent pas le profit. Ils gèrent des logements à l’abri de la spéculation immobilière en garantissant abordabilité et sécurité aux locataires de façon pérenne. À la différence des HLM qui sont gérés par l’État, les OSBL d’habitation sont administrés par des conseils d’administration dont les membres sont issus de la communauté. Au-delà d’offrir un toit à de nombreuses personnes, ces organismes communautaires en habitation permettent aussi de contrer l’isolement de personnes et participent à créer des milieux de vie inclusifs. » Tout le contraire des immenses tours au centre-ville de Rimouski où vivent les personnes âgées nanties.
Que ce soit au fédéral, au provincial ou au municipal, combien d’élu.e.s habitent en appartement? Combien n’arrivent pas à payer leur loyer? Combien subissent la crise du logement? Combien remettent en question les règles et les lois qui créent la crise? Combien se posent la question : « Est-il sain de collectivement accepter comme un état de fait que la propriété soit un objet de spéculation comme un autre3»? Il suffit de suivre la page Facebook de la ministre de l’Habitation pour voir à quel point cette vulgaire Marie-Antoinette vit dans un autre monde, celui des privilégiés du Caquistan. Le seul éclair de génie qu’on peut lui souhaiter, c’est que la foudre s’abatte sur sa demeure et la brûle.
Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) estime que la récente annonce de la ministre de l’habitation (350 millions$ pour 3000 logements « abordables », incluant 1000 « condos abordables ») signe ni plus ni moins la fin du logement social au Québec. La CAQ détourne l’argent du logement social pour construire du logement qui n’est pas du tout « abordable » pour les ménages. Cédric Dussault du RCLALQ dénonçait la situation à la radio de nos impôts : « le logement social fait certainement partie de la solution, mais à moins que le gouvernement ait l’intention de nationaliser l’ensemble du parc locatif au Québec, on ne s’en sortira pas sans un réel contrôle des loyers, avec un registre et un plafonnement des hausses obligatoires. »
La crise du logement comme la crise écologique tirent leur racine du même problème : une classe affairiste vorace et insatiable ainsi qu’une élite politique complice. Ce n’est pas qu’ils ne peuvent pas, c’est qu’ils ne veulent pas. Renversons ces deux ennemis. Se loger est un droit, pas un privilège! Le temps nous est compté. Nous n’avons plus rien à perdre.