
Avec Des points mouvants, le Musée régional de Rimouski présente jusqu’au 30 janvier une sélection d’œuvres de Yann Pocreau. Cette exposition, dont Ève De Garie-Lamanque est la commissaire, met en résonance des sculptures, des photographies et des installations de l’artiste. Originaire de Québec et représenté maintenant par la galerie montréalaise Blouin-Division, Yann Pocreau nous invite ici à une visite autant introspective qu’axée sur ce qui nous dépasse. Une attention aux apparitions lumineuses célestes, de l’ordre du minuscule ou du gigantesque, lie l’ensemble des œuvres.
En 2018, Yann Pocreau était sélectionné pour une résidence de recherche-création à l’Observatoire du Mont-Mégantic, haut lieu de la recherche en astrophysique au Québec. Pendant son séjour, l’artiste a eu accès au télescope de l’institution, qui est devenu un outil de son travail créatif. Des points mouvants nous montre ainsi quelques œuvres issues de cette rencontre étonnante entre les médiums que sont le télescope, l’appareil photo et les archives.
Les deux salles vouées à Des points mouvants se distinguent rapidement l’une de l’autre par leur disposition et leur vocation. Une salle plongée dans le noir qui se profile au fond de la première pièce ne peut que happer l’attention par contraste. Le bruit qui en émane, provenant d’un mécanisme encore inconnu, éveillera également la curiosité. Avant d’y entrer, l’on a d’abord droit à un espace aéré et éclairé qui sied aux dimensions évoquées par les œuvres. Le texte introductif de l’exposition indique que devant l’immensité spatiale, Yann Pocreau a voulu traduire son expérience du « sentiment océanique, c’est-à-dire l’impression aussi vive qu’intime de coparticipation, […] et d’appartenance à l’universel ». L’alternance des échelles de grandeur et le fait de rendre visibles à la fois le très petit et le très grand transportent rapidement hors de soi.
Le temps, comme la taille des objets observés par Pocreau, est lui aussi distendu pour évoquer la minuscule part de l’univers perceptible par l’humain. Dans la salle sombre, les dispositifs en place créent un rapport momentanément possible à des époques derrière nous. Le bruit du carrousel à diapositives nous transporte dans un passé qu’évoque également la série de photographies Les Impermanents, dont la forme bénéficie d’un éclairage tamisé. Le nombre de photographies saisit et les détails du travail de Pocreau invitent à la lenteur. Chaque photographie est parsemée de petits trous qui forment sur l’image une constellation : à la manière des constellations du ciel, ces constellations apparaissent autant comme le fruit du hasard que comme des figures qui s’adresseraient à nous.
L’exposition invite à une grande liberté, de par son sujet et sa mise en scène. Le titre même de l’exposition en témoigne, et encourage chacune et chacun à mettre ensemble les points et à y créer un sens. Nous passons comme des comètes lentes dans l’espace-temps créé par Yann Pocreau, devenus nous aussi « des points mouvants » au milieu des repères qu’il nous propose. Par cette exposition, le Musée régional de Rimouski nous permet d’accéder au moins un moment à une part belle de la quête existentielle humaine.