Les élections fédérales ont débouché sur une situation proche du statu quo si on compare les résultats à ceux du scrutin de 2019 : aucun parti n’a gagné ou perdu plus de deux sièges et, mis à part le Parti vert qui s’est effondré, personne n’a gagné ou perdu plus de 2 % du vote populaire. Le NPD est la force politique qui a le plus progressé, passant de 15,98 % à 17,7 %, mais n’enverra qu’un député supplémentaire à Ottawa.
Le Parti conservateur trône au sommet des suffrages, avec 33,8 % des votes exprimés. Mais c’est bien le Parti libéral, deuxième avec 32,4 % du vote, qui formera le gouvernement puisqu’il a décroché 158 sièges, soit 39 de plus que les Conservateurs.
Si les chiffres sont restés désespérément stables entre 2019 et 2021, mettant en évidence l’inutilité de cette élection, il en est toutefois un qui a nettement progressé : il s’agit de l’abstention, qui est passée de 32,97 % en 2019 à 40,71 % au moment d’écrire ces lignes. Certains diront que la pandémie a dissuadé une partie de l’électorat de se déplacer; d’autres se questionneront sur les dysfonctionnements d’un système qui se prétend démocratique : quatre Canadien·ne·s sur 10 ne se reconnaissent dans aucun parti ou se désintéressent totalement de la politique fédérale.
À peine 20 % des voix pour le premier parti
Élections Canada précise que le taux de participation (59,29 % à 11 h 45, mercredi) ne tient pas compte des personnes qui se sont inscrites le jour de l’élection. De plus, environ un million d’électeurs, soit moins de 4 % de l’électorat, ont demandé à voter par la poste, et tous leurs votes ne sont pas encore comptabilisés. Le taux de participation peut donc encore progresser, mais il n’atteindra clairement pas le niveau de 2019.
Si l’on considère l’ensemble des 27 millions de Canadien·ne·s habiles à voter, cela signifie donc que le Parti conservateur n’a obtenu que 20,04 % des voix, et le Parti libéral 19,21 %. L’abstention pourrait donc récolter plus de « voix » que ces deux partis réunis.
Au Québec, le taux de participation a été légèrement supérieur à la moyenne canadienne (60,64 %), ce qui veut dire que l’abstention a séduit 39,36 % des personnes inscrites sur les listes électorales. La circonscription où on a le moins voté est Abitibi–Baie-James–Nunavik–Eeyou (42,37 %), et celle où on le plus voté est Montarville (71,08 %).
L’abstention plus forte dans l’Est-du-Québec
Kristina Michaud a obtenu une victoire éclatante dans Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, récoltant 60,3 % des suffrages. Mais seulement 53,27 % des gens ont voté, soit moins que la moyenne nationale. Cela signifie que 32,12 % de l’ensemble des électeurs potentiels sont allés glisser un bulletin dans l’urne pour Mme Michaud, quand 46,73 % ont préféré rester chez eux.
Maxime Blanchette-Joncas a bénéficié d’un taux de participation plus élevé dans Rimouski-Neigette–Témiscouata–Les Basques, en l’occurrence 58,33 %. On pourrait expliquer ces scores inférieures à la moyenne canadienne par le fait que les autres partis se sont désintéressés de l’Est-du-Québec, mais la circonscription Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine invalide cette hypothèse : alors qu’il s’agit du seul endroit où il y avait un semblant de lutte, la participation y a été encore plus faible, à 54,24 %.
Seule la circonscription Montmagny– L’Islet–Kamouraska – Rivière-du-Loup fait mieux que l’ensemble du Canada niveau participation, avec un taux de 60,86 %. De manière général, tous les élus conservateurs du Québec ont bénéficié de taux de participation supérieurs à 60 %.
« Ça ne vous tente plus qu’on parle de politique ou d’élections », remarquait le premier ministre Justin Trudeau à la vue des résultats. Peut-être est-il simplement temps d’en parler différemment…