
En ces temps de crise du logement et d’urgence climatique, les écoquartiers ont tout pour plaire : ils permettent de loger des familles tout en limitant leur impact écologique. Mais les différents projets proposés au Bas-Saint-Laurent dans les dernières années peinent à prendre leur envol.
À Saint-Octave-de-Métis, voilà deux ans et demi que la municipalité entend construire un écoquartier de 25 logements sur un grand terrain d’une trentaine d’acres dans la zone constructible du village. Mais aujourd’hui, malgré la surchauffe du marché immobilier au Bas-Saint-Laurent, rien n’a encore été bâti.
« Le nerf de la guerre, c’est toujours l’argent, explique le maire Martin Reid. Pour nous, à Saint-Octave, avec 500 habitants, cela représente des coûts importants au niveau de l’urbanisme et de la mise en place. Il n’y a pas de financement spécifique pour ce genre de projets. » En d’autres termes, il coûte aussi cher pour une municipalité de construire un écoquartier qu’un quartier conventionnel, puisqu’il faut respecter les mêmes normes.
Un concept encore mal défini
Mais c’est quoi, au juste, un écoquartier? « C’est un quartier qui vise la réduction de l’empreinte écologique, tant du côté des infrastructures municipales (routes, trottoirs, gestion des eaux usées) que des bâtiments », résume le maire Reid. Concernant les maisons, Saint-Octave adoptera donc une règlementation sur le choix des matériaux et l’isolation. Cependant, il n’a pas encore été décidé si les terrains seront vendus à la pièce à des particuliers, ou en bloc à un promoteur qui s’occupera de construire tout le quartier en respectant un cahier des charges.
Au-delà de ces points, il n’y a pas de définition claire d’un écoquartier, le concept étant relativement nouveau. Cela peut d’ailleurs facilement mener à de l’écoblanchiment : dans des régions comme le Bas-Saint-Laurent, c’est le transport qui consomme le plus de combustibles fossiles. Or, faire de l’étalement urbain implique un recours accru à la voiture, que les maisons soient écologiques ou non, et limite donc les gains écologiques.
À Saint-Octave, il est tout de même prévu de faire une certaine densification, « au moins dans une section » selon Martin Reid. « Au lieu d’avoir [pour chaque propriétaire] le fameux grand terrain avec piscine, on aurait un plus petit terrain, avec un plus petit bâtiment, mais dès qu’on sort de sa cour on est dans une section de parc, où il y a des sentiers, des endroits pour que nos enfants aillent jouer, peut-être même des espaces à cultiver. » Situé tout près, le centre sportif serait rénové afin de pouvoir servir de salle communautaire aux résidents.
L’école d’architecture de l’Université McGill a participé à la réflexion et a fait des propositions concernant l’enveloppe des bâtiments, la possibilité de construire des bâtiments en duo reliés par un espace commun, ou la mise en place d’un réseau commun d’énergie géothermique ou solaire. Mais malgré l’intérêt montré par d’éventuels résidents, le projet d’écoquartier n’a pas vraiment avancé depuis le début de la pandémie et Martin Reid espère voir les premières pelletées de terre seulement « dans un prochain mandat », c’est-à-dire d’ici quatre ans. « Mais c’est quand même ambitieux! », tempère-t-il.
Pas plus facile ailleurs
Saint-Octave-de-Métis est loin d’être la seule localité où construire un écoquartier s’avère un travail de longue haleine. À Saint-Valérien, le développement domiciliaire du Ruisseau-Raphaël est sur pause depuis deux ans : il reste une dizaine de terrains disponibles sur les 23 initialement proposés.
« Les citoyens étalent leurs projets de constructions en raison des coûts exorbitants des matériaux et de la construction en ce moment », constate la coordonnatrice de la Corporation de développement de Saint-Valérien, Diane Leclerc.
Dans ce quartier « Habitation durable », la municipalité donne des subventions aux propriétaires s’ils construisent selon des normes environnementales plus strictes que le code du bâtiment, notamment au niveau de l’isolation. Mais il n’y a aucune obligation de construire des maisons plus écologiques que la moyenne.
Même en ville, la tâche est compliquée : à Rivière-du-Loup, un écoquartier devait voir le jour au centre-ville, mais le projet a été abandonné. C’est finalement une maison des aînés qui est actuellement construite à cet emplacement.
Au moins un autre projet est sur les rails au Bas-Saint-Laurent : en avril, le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation a accordé une aide financière de près de 60 000 $ à la MRC des Basques pour la planification d’un écoquartier. Mais à la lumière de ce qui se passe ailleurs, cela pourrait prendre beaucoup de temps avant qu’il ne devienne réalité…