
Des températures plus élevées, davantage de précipitations mais moins de neige, des épisodes de canicule plus fréquents en été… Le Bas-Saint-Laurent n’échappera pas aux effets des changements climatiques, et le secteur agricole sera particulièrement affecté. Des mesures d’adaptation permettront toutefois de mieux encaisser les chocs à venir, et le projet Agriclimat en donne une bonne idée dans son tout récent Plan d’adaptation de l’agriculture du Bas-Saint-Laurent aux changements climatiques.
En 2050, la température moyenne du Bas-Saint-Laurent aura augmenté de 2,7 °C par rapport à la période 1981-2010, selon Ouranos. Quant aux précipitations annuelles totales, elles seront en hausse de 75 mm, surtout sous forme liquide.
Il pleuvra davantage en automne, à l’hiver et au printemps, ce qui pourrait accroître l’érosion des sols. La diminution du couvert de neige, couplée à l’alternance pluie-neige, mettra à risque la survie des plantes pérennes (fourrage et petits fruits). Quant aux insectes ravageurs, ils traverseront plus facilement des hivers plus doux. L’été, les besoins en eau seront plus importants pour les plantes et les animaux, et ces derniers souffriront de la chaleur.
Les changements climatiques auront cependant quelques impacts bénéfiques au Bas-Saint-Laurent : le printemps démarrera plus tôt et le premier gel adviendra plus tard, ce qui allongera la saison de croissance des végétaux et permettra aux animaux de passer davantage de temps au pâturage. À l’automne, la maturité des grains sera meilleure et les conditions de récolte seront améliorées.
Une adaptation de l’agriculture aux nouvelles réalités climatiques va donc être nécessaire. Celle-ci se fera à deux niveaux : à l’échelle de l’entreprise agricole, mais aussi collectivement.
À l’échelle de l’entreprise agricole
Chaque producteur aura un travail d’adaptation à faire sur son exploitation, et choisira les mesures les plus appropriées à son contexte personnel, explique le rapport d’Agriclimat qui présente de nombreuses pistes d’action. Il pourra par exemple améliorer la gestion de l’eau au champ par le drainage, le nivellement et les aménagements hydroagricoles. Pour assurer la survie des bleuets et des plantes fourragères, il pourra implanter des haies brise-vent et utiliser du paillis ou des mini-tunnels… quand il ne considèrera pas d’autres espèces de plantes fourragères mieux adaptées à la situation.
Pour lutter contre les ravageurs, maladies et autres mauvaises herbes, certains fermiers choisiront de recourir à un dépistage plus fréquent et de mettre en place des espaces de biodiversité sur leur terre. Il sera également opportun d’optimiser l’irrigation des cultures, en ayant recours à des systèmes plus efficaces et à de plus grandes capacités de stockage d’eau.
Parallèlement, des systèmes de ventilation pourraient faire leur apparition dans les serres et les étables. Toujours dans le but d’apporter de la fraicheur aux animaux, des arbres pourront être plantés dans les champs pour leur offrir un peu d’ombre.
À l’échelle régionale
Bien qu’essentielles, toutes ces initiatives auront un impact limité si elles ne s’accompagnent pas d’un travail à l’échelle collective. En effet, « nombreux sont les producteurs qui privilégient l’échange d’expériences et de connaissances entre pairs pour faire évoluer leurs pratiques », note le rapport. Cela veut dire qu’il sera nécessaire de mettre en place du mentorat entre agriculteurs et tisser des réseaux d’innovation, afin de partager l’information pertinente.
Par exemple, dans le domaine de la production animale, il sera nécessaire de se préparer aux épisodes de canicule. Des services-conseils indépendants dans la vente de matériel de ventilation et de gestion de la température et de l’humidité dans les bâtiments seraient donc bienvenus. Les ingénieurs devront être sensibilisés à l’importance de prendre en compte les microclimats au moment de concevoir les bâtiments. L’information sur le rôle des arbres pour créer des microclimats plus frais en été devra être mieux communiquée.
Plus généralement, il faudra améliorer la gestion de l’eau à l’échelle du bassin versant et faire de la recherche sur les plantes fourragères. Enfin, il faudra prévenir d’éventuels conflits d’usage de l’eau, même si le risque qu’ils surviennent est encore limité dans la région.
Agriclimat en bref
Initié par les producteurs agricoles et mis en œuvre dans dix régions agricoles du Québec, le projet Agriclimat est piloté par le Conseil pour le développement de l’agriculture du Québec (CDAQ) et bénéficie notamment du soutien de l’Union des producteurs agricoles (UPA) et du consortium Ouranos sur l’adaptation aux changements climatiques. Ses travaux se sont échelonnés entre 2017 et 2020.
Durant ces trois ans, 13 ateliers ont été offerts aux producteurs et aux intervenants du Bas-Saint-Laurent afin qu’ils puissent partager leur réalité et réfléchir à des mesures à mettre en œuvre.