
Depuis maintenant une dizaine d’années, le Kamouraska s’est fixé comme objectif de devenir un haut lieu du champignon, à travers son projet Le Kamouraska Mycologique. Cette année, pour la toute première fois, la région a pu dresser un diagnostic complet de l’économie naissante du bolet et de la chanterelle, grâce à un outil informatique développé spécialement à cette fin par les deux centres de recherches que sont le CIRADD (de Carleton-sur-Mer) et Biopterre (de La Pocatière).
Cet outil, qui n’a pas encore de nom, permet de colliger des données provenant de sources très diverses, représentatives d’un secteur lui aussi très hétérogène puisqu’il inclut des cueilleurs, des transformateurs, des formateurs ou encore des chercheurs. « Des indicateurs ont été ciblés pour chacune de ces catégories, et différentes méthodes sont utilisées pour aller chercher les données, incluant des sondages et des entrevues, explique la chargée de projet au mycodéveloppement de la MRC du Kamouraska, Pascale G. Malenfant. Ensuite, tout ça est entré dans l’outil qui calcule les retombées. »
Mme Malenfant précise qu’il ne s’agit pas seulement de retombées économiques, mais aussi « sociales et environnementales ».
Si l’on jette un coup d’œil au diagnostic de l’année 2020 ainsi créé, on peut voir quelques données intéressantes. Par exemple, la région a reçu 1400 « mycotouristes », ce qui est encore modeste, mais qui cause déjà des difficultés d’approvisionnement en champignons à plus de la moitié des entreprises du secteur. Les champignons forestiers cueillis au Kamouraska ne couvrent que 53% de la demande, ce qui signifie que certains restaurateurs et transformateurs doivent en importer.
Il faudrait donc récolter deux fois plus dans les prochaines années. La culture peut être un moyen d’y arriver, mais la MRC travaille aussi à mettre en relation les cueilleurs et les propriétaires de lots forestiers, afin que les premiers puissent entrer sur le terrain des deuxièmes. Déjà, une douzaine de propriétaires ont accepté, rendant disponible un terrain de jeu de plus de 500 hectares.
Cabane à sucre de fin d’été
Si la filière crée 112 emplois, on peut voir qu’il s’agit d’une activité très saisonnière, voire ponctuelle, puisque les personnes évoluant dans les activités d’approvisionnement et de commercialisation n’ont travaillé que 33 jours en moyenne en 2020. « Je compare toujours ça à la saison des sucres, illustre Pascale G. Malenfant : une période courte et intense. » Mais un écosystème plus large s’installe tranquillement, incluant des activités de recherche autour de ce qu’on appelle les mycotechnologies, c’est-à-dire des produits et procédés qui utilisent des champignons.
Au niveau de l’éducation, pas moins de 35 ateliers ou formations ont été organisés, attirant 287 personnes débutantes ou amatrices et impliquant 11 enseignants du collégial.
Les projets en lien avec la mycologie ont bénéficié de près de 300 000 $ de subventions en 2020, mais n’ont généré des retombées que d’environ la moitié, soit 150 000 $. Mme Malenfant parle d’une « consolidation » en cours d’une « très petite économie » amenée à grossir. Par ailleurs, le secteur de la recherche a bénéficié de plus de 240 000 $ de financement dans la dernière année. « C’est de l’argent que les centres de recherche vont chercher pour accompagner les entreprises et soutenir l’innovation, précise la chargée de projet. Donc c’est très bien, c’est signe que les entrepreneurs se développent. »
Et grâce à des diagnostics de ce type qui pourront maintenant être réalisés régulièrement, on va pouvoir suivre de près ce développement.