
La pandémie de COVID-19 constitue un puissant révélateur de la personnalité politique des populations et de leurs dirigeants. Cette crise aurait pu redéfinir positivement les normes de la politique, mais elle polarise plutôt les populations et elle libère la parole des complotistes tous azimuts. Voici un bilan en trois images de l’actualité politique de l’été 2020 au Québec, au Canada et aux États-Unis.
QUÉBEC : LE MASQUE SANITAIRE
Le bilan objectif de la gestion de la crise sanitaire par le gouvernement de François Legault est mitigé, mais il s’en sort plutôt bien dans l’opinion publique, si on en juge par la popularité de son gouvernement dans les sondages. En vacances ou au travail à l’été 2020, le premier ministre a parcouru le Québec des régions et évoqué dans les réseaux sociaux la beauté des paysages, la gentillesse de la population et la qualité de la nourriture. Le port du masque sanitaire dans les commerces et dans les lieux publics est obligatoire depuis le 18 juillet. Le gouvernement a longtemps tergiversé sur le bien-fondé de cette mesure, mais la population l’accepte plutôt bien. Ce n’est pas le cas des complotistes qui font du masque un symbole de l’oppression gouvernementale et de la soumission de la population. Ils sont de moins en moins complexés, et de plus en plus visibles et audibles dans l’espace public. Le défi de la rentrée pour le gouvernement Legault sera de faire accepter le projet de loi 61, qui vise « la relance de l’économie du Québec et l’atténuation des conséquences de l’état d’urgence sanitaire », mais qui, dans les faits, mine la délibération démocratique et le pluralisme politique. S’il y a un combat à mener, c’est celui contre ce projet de loi, et non celui contre le port du masque sanitaire.
CANADA : LE POP ROCK CHRÉTIEN DES ANNÉES 1970
Plutôt que sa maladresse dans la gestion de la crise sanitaire, c’est le scandale WE Charity qui risque de causer le plus de tort à Justin Trudeau. Son gouvernement a annoncé en juin qu’il accordait à cet organisme, fondé et géré par les frères Kielburger, la gestion d’un programme de bourses de bénévolat totalisant 900 millions de dollars, attribuant à cet intermédiaire un budget de 44 millions. Depuis, les Kielburger doivent justifier plusieurs irrégularités, dont l’embauche à forts prix de conférenciers (notamment la mère du premier ministre, qui a reçu de l’organisme un quart de millions en honoraires, et son frère, qui a reçu 32 000 $) et le financement de deux voyages familiaux du ministre Bill Morneau (d’une valeur de 41 000 $). Aux nouvelles télévisées, on voit en films d’archives les frères Kielburger s’activer sur scène dans une chorégraphie digne du pop rock chrétien des années 1970. Pathétiques, mais propres et bien coiffés, ils incarnent l’image du business de la charité dévoyée qui, comme toute charité bien ordonnée, commence par soi-même. Comment Justin Trudeau se sortira-t-il de ce bourbier, qui pourrait même conduire à un scrutin général anticipé? Son modus operandi habituel lorsqu’il gère un scandale consiste à formuler un regret, à verser une larme puis à attribuer une subvention pour faire oublier tout ça, dans l’ordre ou dans le désordre.
ÉTATS-UNIS : LE POMMEAU DE DOUCHE MULTI-JETS
L’orange chevelure de Donald Trump, assortie au teint de son visage de golfeur floridien, est une image forte qui caractérise l’homme. Le président aime ses cheveux au moins autant qu’il s’aime lui-même. En juillet, devant un parterre de journalistes, il déclarait : « Mes cheveux – je ne sais pas pour vous – mais les miens doivent être parfaits. Parfaits. » Cet argument lui servait à justifier le changement des normes étatsuniennes liées au débit d’eau des douches. Ces normes ne permettent pas un jet suffisamment puissant pour bien laver son auguste chevelure. En effet, depuis 1992, dans le but d’économiser l’eau potable, le débit d’eau des douches est limité à 9,5 litres par minute. La prolifération des pommeaux de douche multi-jets remet en question cette norme, ce qui désespère les environnementalistes. Au moment où les États-Unis cumulent 175 000 décès liés à la CODIV-19, le dossier qui préoccupe son président est celui des pommeaux de douche. Le duo démocrate formé de Joe Biden et de Kamala Harris affrontera en novembre l’Agent Orange. Si Kamala est inspirante, Joe est plutôt désespérant. Les chances de réélection de Donald Trump sont minces, mais d’ici le scrutin de novembre, il pourrait appliquer la stratégie de la terre brûlée et causer plus de dommages qu’il ne l’a fait jusqu’à maintenant.