
Sans surprise, la destinée du village du Bic a été au cœur de la consultation publique organisée sur l’application Zoom hier soir par la Ville de Rimouski. Et si le maire Marc Parent avait déclaré il y a quelques semaines qu’il ne sentait pas de grogne dans la population à propos du projet de redécoupage électoral, les 12 personnes qui ont pris la parole lui ont démontré le contraire, pendant plus de deux heures d’échanges.
« C’est une blessure de changer ce district, c’est comme ça que je le sens », a ainsi fait valoir André Marsolais, pour qui « la sauvegarde de l’identité bicoise est dans l’ADN des citoyens du Bic ». Selon lui, cette spécificité est « bénéfique pour la communauté du grand Rimouski ».
Deux points sont régulièrement revenus au fil des interventions des citoyen·ne·s, toutes bien construites et argumentées. D’une part, le sentiment d’appartenance (au Bic, mais aussi dans certains quartiers centraux comme Saint-Robert) ne serait pas respecté : en représentant une population déterminée bureaucratiquement et non une communauté historique, l’élu deviendrait « déconnecté du territoire », selon Raphaël Arsenault.
D’autre part, il serait important de respecter la promesse faite aux Bicois·es lors de la fusion avec Rimouski, en 2009. Une fusion « de gré à gré, pas forcée » selon un ancien maire du Bic, Serge Lévesque, qui « garantissait l’identité bicoise et le territoire ». « C’est comme si on bafouait nos promesses », a abondé Sylvain Trudel, qui était membre du dernier conseil municipal (2005-2009) de l’ancienne municipalité.
La population veut être consultée en amont
Les participant·e·s ont par ailleurs été unanimes à dénoncer le manque de consultation de la population en amont du projet de redécoupage. « Pourquoi en est-on rendu à une démocratie qui se fait en cinq minutes sur Zoom? » a questionné Pierre-Luc Morin, en référence au temps imparti à chaque personne. « Pourquoi une démarche de dernière minute où les citoyens sont en opposition? Pourquoi on est devant une seule proposition? » « C’est incroyable qu’on arrive avec ça en plein été, en pleines vacances » a pour sa part défendu Pauline Côté, au diapason de plusieurs autres interventions. Le conseiller Karol Francis était d’ailleurs absent pour cause de… vacances.
Le maire Marc Parent a répondu qu’il ne faisait qu’obéir à la loi, qui impose aux municipalités de faire une proposition de carte électorale à la population. Quant à la période estivale, la Ville y a été contrainte à cause des retards causés par la pandémie de covid-19. Les délais imposés par Québec sont serrés, et il aurait été impossible de repousser la consultation au mois de septembre, a-t-il dit plus tard en entrevue au Mouton Noir.
L’exercice a en tout cas permis d’entendre plusieurs conseillères et conseillers, qui ont échangé avec les citoyen·ne·s et leur ont posé des questions. On a toutefois rapidement eu l’impression que la plupart des élu·e·s cherchaient à défendre le redécoupage proposé par l’administration municipale, utilisant parfois des arguments quelque peu déroutants, comme lorsque le conseiller Rodrigue Joncas a parlé d’« enrichir » le district du Bic en lui adjoignant quelques centaines de citoyens du district voisin. « Mais les gens de Sacré-Cœur se sont aussi manifestés par écrit, lui a répondu Linda Lavoie, coprésidente du Comité du patrimoine naturel et culturel du Bic. Derrière les chiffres, il y a des humains. »
Seule conseillère à prendre clairement en faveur des « opposants » (le recours à ce terme négatif a été dénoncé lors de la soirée par André Marsolais), Virginie Proulx a fait connaître son malaise quant à l’attitude de ses collègues, qui étaient parfois en confrontation alors qu’« on est censés écouter les citoyens, qui travaillent bénévolement. » Ancienne conseillère de Saint-Robert, Claire Dubé a rappelé que « l’élu représente les citoyens et non la Ville ».
Un règlement doit être adopté à la séance du conseil municipal du 17 août. En entrevue, le maire Parent a expliqué qu’il ne pouvait présumer pour l’instant si des changements importants seront apportés au redécoupage. Il a par ailleurs confirmé que, pour la première fois depuis le mois de mars, le public pourrait assister à cette séance. Hier, des plaques de plexiglas avaient été installées entre les élu·e·s afin de respecter les consignes de sécurité. « La contrainte sera le nombre de citoyens qui pourront se joindre à nous », a précisé le maire.