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Plaidoyer pour une justice climatique

Par Sarah Charland-Faucher le 2019/11
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Plaidoyer pour une justice climatique

Par Sarah Charland-Faucher le 2019/11

Pour la 23e édition des Journées québécoises de la solidarité internationale (JQSI) ayant lieu du 7 au 16 novembre, les organismes de solidarité internationale du Québec ont décidé de se pencher sur la question de la justice climatique. Au Bas-Saint-Laurent et plus activement à Rimouski, les membres du Carrefour international bas-laurentien pour l’engagement social (CIBLES) organisent comme chaque année plusieurs activités publiques avec différents partenaires et des ateliers dans les écoles secondaires. Cette année, l’objectif des activités de sensibilisation est, entre autres, de démystifier le principe de justice climatique et d’étayer l’argumentaire tant scientifique que politique, éthique et morale afin d’aider la population à s’engager dans une transition économique, sociale et écologique centrée sur la réciprocité, l’égalité et la justice. Que ce soit sur le plan des actions individuelles ou collectives, il est urgent d’intégrer les questions de justice sociale et de solidarité aux problèmes environnementaux.

Nous savons que les pays industrialisés et les multinationales sont largement responsables de la crise climatique. Les effets des changements climatiques sont toutefois plus violemment ressentis par les personnes qui en sont les moins responsables : les communautés dans les pays du Sud et les communautés à faible revenu dans les pays industrialisés du Nord. Ces mêmes personnes ont également moins accès aux ressources et à la technologie (ex. : air climatisé) pour s’adapter aux changements et agir pour réduire leurs émissions.

Action collective pour le climat

La notion de justice climatique est aussi utilisée pour légitimer les plaintes et les actions juridiques déposées contre des États ou de grandes entreprises pour actions insuffisantes contre les changements climatiques ou pour absence d’actions, ce qui compromet l’avenir et la vie des prochaines générations. Entre 2006 et 2019, selon Wikipédia, plus de 1 300 plaintes relatives au climat ont été déposées dans une trentaine de pays, parfois par des enfants. Au Québec, le 6 juin 2019, le cabinet Trudel Johnston & Lespérance représentait ENvironnement JEUnesse devant la Cour supérieure du Québec dans sa demande d’autorisation pour exercer une action collective contre le gouvernement canadien au nom de tous les jeunes Québécois et de toutes les jeunes Québécoises de 35 ans et moins. Le 11 juillet 2019, le juge Gary D.D. Morrison de la Cour supérieure du Québec a rendu son jugement dans lequel il refuse d’accorder à ENvironnement JEUnesse l’autorisation d’exercer une action collective pour la justice climatique. ENvironnement JEUnesse a annoncé qu’il portera le jugement en appel.

Intégrer la justice sociale aux questions environnementales est crucial pour comprendre globalement les enjeux et renforcer la solidarité entre les générations, mais aussi et surtout entre les peuples. Décoloniser les rapports de solidarité entre les peuples et les nations est une priorité dans notre démarche, tout comme la sensibilisation à l’urgence d’agir. Cette urgence ne nous saute pas toujours aux yeux au Québec, mais est une évidence ailleurs (l’Indonésie déménagera sa capitale, Jakarta, d’ici 2024). Cela suppose de s’attaquer aux causes profondes de la crise climatique, incluant les modes de production, la consommation et les accords commerciaux qui briment notamment la liberté des peuples à exercer souverainement leur droit à une alimentation saine et écologique issue de leur territoire. Inscrire les droits humains, le droit au travail, à l’équité et l’égalité des sexes dans les combats pour l’environnement n’est pas un extra à saupoudrer ici et là, c’est essentiel pour obtenir des gains durables en s’intéressant à la racine des problèmes auxquels nous faisons face. L’interdépendance manifeste et factuelle entre tous les êtres vivants et entre les humains et la Terre doit être mise au-devant de la scène pour nourrir toutes les actions qui nous animent et inspirer les personnes qui commencent leur réflexion sur l’état du monde. La question des réfugiés est aussi au centre des enjeux, car peu importe la hauteur des murs que les nations riches tenteront de construire, rien n’arrêtera la volonté désespérée de mères et de pères prêts à tout pour la sécurité et l’avenir de leurs enfants. On a grandement eu recours à la science pour convaincre la population d’agir en faveur de l’environnement, comme si la morale nous faisait peur. Mais force est de constater que nous sommes aussi face à des enjeux et des dilemmes éminemment moraux et il faudra trouver une façon d’en parler.

En terminant, une approche féministe axée sur une analyse de genre intersectionnelle pour comprendre les relations de pouvoir inégales basées sur le genre et d’autres caractéristiques, comme le statut socio-économique, l’origine ethnique, la nationalité, la capacité, l’orientation sexuelle, l’âge, etc., doit aussi aider à comprendre les causes profondes des inégalités, la transformation des rapports de pouvoir et la promotion des droits des femmes si nécessaire à des mutations sociales porteuses de sens et de progrès. La justice climatique n’est pas un nouveau concept fourre-tout, mais bien une paire de lunettes essentielle pour réfléchir, agir et décoloniser les rapports de solidarité entre les peuples. 

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