
Vous étiez-vous déplacés pour la première édition du festival bas-laurentien des arts du cirque Détour? Une franche réussite, non seulement aux yeux des organisateurs, mais aussi pour le public et les artistes, qu’on a pris soin de sonder après coup.
Si vous avez suivi le feuilleton, vous savez que la seconde édition, tentée en 2018, est tombée à plat, comme une mauvaise blague. Une histoire de sous, bien sûr. En revanche, personne n’a baissé les bras, et c’est ainsi que le festival nous est revenu pour une seconde édition il y a quelques jours à peine. Les baltringues avaient cette fois cloué leurs pieux sur le site de la grande Feste médiévale de Saint-Marcellin, un site tout à fait approprié, notamment grâce à des installations permanentes commodes pour un événement du genre.
Gagnante, la formule n’a pas été changée autant qu’elle a été étoffée, avec un lancement des festivités mieux campé – merci à Kalafuba! -, une scène plus imposante, la présence sur le site du GGRIL avec son Zoo (dans le dessein avoué de faire du festival un événement interdisciplinaire mettant en valeur le talent local), des performances in situ signées Élise Legrand, dont la performance en première édition avait été un moment fort, et une soirée de clôture assurée par Les parfaits inconnus, troupe québécoise à la réputation bien établie! Les activités en journée samedi sont demeurées à contribution volontaire avec amalgame de numéros au chapeau, tandis que les spectacles vespéraux étaient tout aussi abordables.
La réalité québécoise
Où étiez-vous lors de cette deuxième édition, alors? Mais ce n’est pas vraiment la question, quand je discute avec les responsables du festival. La question est où est le public québécois, quand le cirque ne demande qu’à cirquer, couper le souffle, divertir et émouvoir? Toujours la question de la poule ou de l’œuf : manque d’intérêt, donc rareté d’installations appropriées… ou serait-ce plutôt l’inverse?
Lors de la première édition, les spectateurs ont été étonnés du niveau de profession-nalisme des artistes. On semble attendre peu du cirque dans la province. Si l’imaginaire qui en émane demeure fort, on a aussi tendance à garder une image enfantine du cirque, ici, selon Lysane Picker-Paquin, cofondatrice de Détour. Devant le manque d’opportunités, nos artistes s’exilent, notamment vers l’Europe, où ils sont mieux considérés, disposent de salles avec de meilleurs équipements et peuvent espérer vivre de leur art, toujours plus exigeant.
On trouve aussi le cirque coûteux. Toutefois les cachets exigés par une troupe entière demeurent en deçà de celui exigé… par un seul humoriste. Le bât du dollar blesse : après la première édition du festival, plusieurs municipalités ont manifesté auprès des organisateurs leur intérêt à présenter des numéros de cirque, mais ont tiédi devant les sommes exigées par les artistes – qui se comparent pourtant à celles des musiciens!
Dans pareil contexte, est-ce une anomalie de voir poindre une entité tel que le Cirque de la Pointe-Sèche dans le Kamouraska? Du tout, selon Jérémy Baudry, aussi cofondateur de Détour et lui-même artiste de cirque. L’homme affirme qu’on assiste en fait à un certain renouveau au Québec. Il cite l’implantation du cabaret Le Monastère, à Montréal et l’apparition d’un autre festival circassien, cette fois chez les Madelinots. D’autres initiatives devraient aussi venir étoffer l’offre. À suivre pour ceux et celles qui aiment en avoir plein la vue, sans effets spéciaux!