
PHOS, quelle belle initiative que ce festival matanais qui se déroulait cette année du 1er au 16 septembre. Toujours de grandes surprises et un calendrier varié pour une sixième année de manifestations multidisciplinaires.
Le quartier général de PHOS (l’usine du centre-ville) présentait les superbes et touchantes photos en grand format En eaux troubles d’Isabelle Hayeur. Ses prises de vue entre terre et eau amènent à réfléchir aux bouleversements environnementaux avec beaucoup d’acuité.
Plus loin, l’installation sonore, Hélix de Sonia Paço-Rocchia, où des senseurs actionnaient des objets étranges (casserole, ballons, etc.) qui se mettaient à vibrer au bout de ressorts, rappelait peut-être un peu trop les maisons hantées des foires, malgré un dispositif technologique inventif. Au centre d’un cube de tissu noir se trouvait l’installation Mascarades de Boris Firquet, très d’actualité dans sa métaphore unissant de façon morbide le pouvoir politique et ses déviations vers le militaire. Les projections de Firquet entouraient les spectateurs sur quatre côtés, mais l’iconographie lourde et proche de Star Wars m’a peu touché, malgré les références connues aux archives d’une actualité postspectaculaire. Toutefois, il y avait là une critique politique qui ne manquait pas d’ironie.
Plus loin, Mise au monde, de Maryse Goudreau, une projection réalisée à partir de documents d’archives sur les bélugas (d’Anticosti à la Russie), semblait témoigner du fait que cet animal est devenu un symbole qu’utilisent ou utilisaient les amuseurs de foires en Russie dans la surenchère médiatisée de sa disparition.
Au Complexe culturel, une impression de maison hantée m’est revenue en voyant le piano aux touches toutes noires bouger sur ses pattes dans l’installation numérique Drone[s] d’Émile Morin. Une œuvre qui déstabilise notre perception de l’art.
Puis dans l’espace « des jeux de miroirs » ou plus exactement « d’illusions virtuelles » Oval de Lenka Novakova et Otso Lähdeoja est une oeuvre immersive où les spectateurs sont eux-mêmes objet de captation et de projections vidéo.
De La grandeur des choses, de Christian Calon, j’ai apprécié les images tirées de la forêt boréale canadienne mixées à celles du sud du Québec, mais j’ai pris un peu moins de plaisir à la bande sonore associée à cette succession rapide d’images forestières. Il m’aurait probablement fallu plus de temps pour m’imprégner de cet environnement.
La révélation est arrivée à la fin du parcours avec Blanc de Nelly-Ève Rajotte : « un vaste écran blanc incite le spectateur à se fondre avec la perspective céleste d’un drone survolant des paysages du Grand Nord ». Des formes noires : des meutes de chiens et des personnages miniatures circulent et se regroupent sur ce grand espace blanc. Situation envoûtante, énigmatique où « la bande-son tantôt exalte tantôt nie un aspect sublime ». Proche de la technologie et de l’influence des jeux vidéo, cette œuvre enthousiasme par son effet de grand espace blanc qui contraste avec la petitesse des protagonistes, probablement fabriqués à l’ordinateur, avec quelques vraies images de chien, etc.
Hélas pas assez de temps pour voir les œuvres présentées sur la promenade et dans la verrière du Complexe culturel de Matane. En tout, une trentaine d’artistes d’ici et d’ailleurs présentaient leur travail dans l’espace public de la Matanie pour cette sixième année de PHOS.