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L’interruption de grossesse : une information de qualité svp!

Par Mélina Castonguay le 2018/11
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L’interruption de grossesse : une information de qualité svp!

Par Mélina Castonguay le 2018/11

Plus d’un quart de siècle après la France, la pilule abortive commence à être disponible au Québec, mais non sans embûches. En fait, alors que l’accès à l’interruption de grossesse est encore un enjeu, qu’en est-il de l’accès à une information de qualité pour les individus se préparant à vivre ce processus? Préoccupée, j’ai entrepris une recherche documentaire sur la question et il en ressort que toute personne qui défend l’autodétermination des individus en matière de santé devrait s’inquiéter des résultats.

Éthique des organisations anti-choix

L’inscription des mots clés « préparation + avortement » (en anglais et en français) dans le moteur de recherche Google et dans Amazon.ca mène à une forte proportion des sources anti-choix (sites Web et documents papier). De plus, malgré une lecture attentive des contenus, on constate une difficulté à reconnaître clairement le biais anti-choix de certaines sources. L’intention de persuader un individu de poursuivre sa grossesse n’est pas toujours énoncée de façon explicite dans le discours anti-choix, ce qui constitue un problème éthique. Cette situation est largement documentée par la recherche préparée en collaboration avec la Fédération du Québec pour le planning des naissances et financée par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS)1.

En fait, la difficulté à distinguer les organisations anti-choix et les ressources prônant l’autodétermination des individus à disposer de leur propre corps est telle que même d’anciens députés (Yves Bolduc, Agnès Maltais) ont, à leur insu, utilisé des budgets discrétionnaires publics pour financer des groupes anti-choix.

Selon l’analyse de Gonin et de ses collaboratrices2, les groupes anti-choix utilisent des sites Internet et des réseaux sociaux pour rejoindre les personnes en quête d’information sur l’interruption de grossesse (leur population cible). Leur discours est ambigu et imite, à quelques éléments près, le discours des organisations pro-choix. Ils se présentent comme des groupes pouvant offrir une information crédible et un accompagnement impartial. Le plus souvent, leurs liens avec des organismes anti-choix « parapluie » sont absents de cette documentation.

Une information de qualité présente mais clairsemée

L’information de qualité sur la préparation à l’interruption de grossesse existe bel et bien au Québec, mais elle se trouve à la pièce sur les différents sites des Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS), des cliniques de planning ou sur les sites des quelques organismes pro-choix fiables. On y trouve des outils d’aide à la décision, de la documentation décrivant la procédure ainsi que des grilles comparant l’avortement chirurgical et l’avortement médical (ou médicamenteux). L’ensemble de cette information de qualité n’est pas compilé en un seul endroit par le MSSS pour le moment. De plus, aucun ouvrage de synthèse sur la question à l’intention des professionnels de première ligne et des individus n’est actuellement disponible en français ou en anglais, ce qui me semble problématique sachant que la rapidité d’intervention sur le plan physique et médical est nettement préférable lorsque l’interruption de grossesse a été choisie.

Un sujet pourtant étudié

Peu de références dirigent les individus en quête d’information vers les outils de médecine intégrative. De la recherche d’intérêt existe pourtant dans le domaine de l’interruption de grossesse. On peut penser entre autres au travail de la Dre Isabelle Marc dont les résultats sont significatifs. Sa thèse en épidémiologie intitulée Bénéfices d’une analgésie non pharmacologique par l’hypnose dans la prise en charge de la douleur aiguë et de l’anxiété des femmes lors de l’interruption de grossesse du premier trimestre a été déposée en 2007 à la Faculté de médecine de l’Université Laval.

Selon toutes ces observations, on peut penser que le tabou social autour de l’avortement est un frein important à l’offre d’une information scientifique, complète, exacte et de qualité. Et cela mérite, selon moi, l’attention de nos institutions de santé qui devraient pallier le manque d’information claire pour traiter de cette question de santé.

1. Fédération du Québec pour le planning des naissances, Mieux comprendre les ressources conseil grossesse anti-choix au Québec, 2014, 44 p.

2. Audrey Gonin, Véronique  Pronovost et Mélissa  Blais,  Enjeux éthiques de l’intervention auprès de femmes vivant une grossesse imprévue au Québec. Discours et pratiques de ressources anti-choix et pro-choix, UQAM, 2014, 171 p.

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