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Dans les coulisses de la séduction politique

Par Philippe Marcotte le 2017/07
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Dans les coulisses de la séduction politique

Par Philippe Marcotte le 2017/07

La politique est savamment élaborée, planifiée, programmée. À tout instant, nos politiciens et nos politiciennes mettent en œuvre un imposant arsenal de techniques et de stratégies pour attirer l’attention, se distinguer, bien paraître, se rendre désirables et nous faire de l’œil. Bref, ils nous draguent. Et ce sont des professionnels dans l’art.

On peut jouer les vierges offensées devant ces beaux discours. Se boucher les oreilles et refuser les avances. On peut aussi apprendre les règles de ce jeu de séduction, apprendre à en décoder les signes, à défaire l’emballage du marketing politique. C’est ce à quoi nous invite La communication politique. L’art de séduire pour convaincre, qui vient de paraître dans la collection de La petite Bédéthèque des Savoirs.

La collection, remarquée, vise à vulgariser des sujets complexes et divers (intelligence artificielle, conflit israélo-palestinien, heavy metal) par la bande dessinée. Le secret est de faire appel à des spécialistes reconnus, couplés à des dessinateurs chevronnés. Ici, c’est l’historien des médias Christian Delporte qui s’y colle, aux côtés de Terreur Graphique (!).

On apprend dans cet Art de séduire pour convaincre les recettes qui ont fait le succès des Kennedy, Berlusconi, Sarkozy et Obama. Et qui sont aujourd’hui reproduites, avec plus ou moins de succès, tant par les Trudeau, Couillard que Nadeau-Dubois. On y relate bien sûr des choses banales : soigner sa coiffure, ne pas gesticuler, chercher à paraître « ordinaire » et proche des gens. Mais il y a plus dans cet ouvrage que des petits trucs du métier. On y apprend comment, avec le temps, les sondeurs, publicistes, spécialistes des méthodes d’enquête, comment les scénaristes, même, ont été intégrés aux équipes politiques. Résultat : qu’il s’agisse d’un blockbuster hollywoodien, d’une publicité pour un savon ou d’une campagne électorale, on applique grosso modo les mêmes recettes.

L’ouvrage est captivant, dense et ludique à la fois. Parfait pour un public intéressé par la politique, mais qui ne connaît pas encore tous ses rouages – les mordus navigueront probablement en eaux connues. Mais, bizarrement, même si on s’adresse à un public plus jeune que vieux, on passe très peu de temps sur les moyens de communication les plus populaires aujourd’hui, venus après la télévision, sur laquelle on insiste finalement un peu trop. En outre, faire défiler sur des dizaines de pages toutes les techniques de marketing qui ont fait école finit par donner l’impression d’un public un peu idiot, prompt à se laisser manipuler et charmer par les paillettes. Un raccourci lui-même un peu tape-à-l’œil…

En fait, comme d’autres parlent du ciel et de l’enfer, on finit, ici encore, par opposer l’« avant » et le maintenant, l’information et la communication, le sérieux et le frivole. On reconduit ainsi un discours bien-pensant qui fait l’apologie d’une époque bénie d’avant la tyrannie du spectacle, époque pendant laquelle les citoyens auraient joui d’un débat politique systématiquement posé, rationnel, honnête, exempt d’artifices, de partisanerie et de populisme. Les choses ont changé, certainement, mais il n’est pas nécessaire de reconduire ce lieu commun franchement ennuyant. Considérant que le cynisme est devenu, lui aussi, une nouvelle manière de plaire en politique, rien ne sert de le nourrir.

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