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Le défi des petites écoles en milieu dévitalisé

Par Jean Bernatchez le 2017/03
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Le défi des petites écoles en milieu dévitalisé

Par Jean Bernatchez le 2017/03

Les commissions scolaires sont tenues d’offrir des services éducatifs de qualité à tous les jeunes de leur territoire. On observe toutefois, dans le temps et selon les régions, des variations importantes du nombre de jeunes d’âge scolaire. Quand on planifie les services éducatifs offerts dans chaque école, ces variations représentent un défi constant, d’autant plus grand pour les petites écoles en milieu dévitalisé qui doivent souvent fermer.

Les problèmes

Certaines régions affichent des taux de croissance démographique importants. Dans l’est du Québec, il y a au contraire une diminution de la population. Par exemple, des 94 500 personnes recensées en 2011 sur le territoire gaspésien, il est probable qu’il n’y en ait plus que 90 800 en 2036. La population d’âge scolaire (0-19 ans) connaîtrait la diminution la plus importante, passant de 17 100 individus en 2011 à 14 400 en 2036. La population de 65 ans et plus, établie à 19 300 personnes en 2011, serait de 34 100 en 2036. En 2036, 38 % de la population du territoire gaspésien serait âgée de 65 ans et plus, mais seulement 16 % de cette population aurait moins de 20 ans. La dévitalisation de plusieurs villages est à la fois cause et conséquence de ce phénomène démographique. Les familles quittent le milieu parce qu’il n’offre plus de possibilités d’emploi, et ce mouvement contribue à une dévitalisation plus grande encore. De petites écoles doivent fermer, elles qui forment pourtant le cœur du village.

Déplacer les élèves sur de grandes distances peut également constituer un problème. Cette distance est interprétée en temps nécessaire pour se rendre de la maison à l’école le matin : pour le cas de jeunes de 5, 6 ou 7 ans, un temps de transport supérieur à 45 minutes peut avoir un impact négatif sur la motivation et la réussite scolaire. En outre, le choix de maintenir des services éducatifs dans de très petites écoles présente des coûts financiers et sociaux importants. L’école a pour mission d’instruire, de socialiser et de qualifier tous les élèves. Il est difficile de réaliser la mission de socialisation dans de très petites écoles où seulement quelques enfants se côtoient pendant plusieurs années consécutives. Des solutions existent cependant pour atténuer certains effets.

Des écoles basées sur d’autres modèles

L’École en réseau (ÉER) est une déclinaison de la classe 2.0, une expression qui désigne l’apport des nouvelles technologies à l’apprentissage. Depuis 2002, ce modèle est expérimenté dans plusieurs petites écoles québécoises. En 2017, elles sont une centaine à l’utiliser dans 25 des 72 commissions scolaires. Généralement, deux enseignantes sont présentes dans deux classes distantes. Les élèves des deux classes interagissent grâce à un dispositif technique simple : des ordinateurs connectés à Internet, un logiciel de vidéoconférence, des webcams et un forum électronique. Toutes sortes d’activités y sont possibles : travaux en équipes constituées d’élèves des deux classes, cours magistraux projetés en même temps dans deux classes, partage des tâches d’enseignement. Ce modèle permet de briser l’isolement professionnel des enseignantes et de contribuer à la socialisation des élèves. Il n’y a plus de frontières, même des classes de pays différents peuvent être connectées.

Le modèle de la classe multi-âge est aussi porteur. Des élèves de différents niveaux sont regroupés dans une même classe animée par une seule enseignante. Le défi est grand, mais plusieurs apprécient son potentiel pédagogique, confirmant l’idée que la classe multi-âge peut être plus qu’un compromis administratif permettant de garder ouvertes les petites écoles. On s’inspire de la classe de karaté : les âges et les forces se complètent, sans nuire à l’apprentissage. Au contraire, il y a émulation. Les parents d’enfants plus jeunes apprécient le modèle parce que leurs enfants sont en contact avec des élèves plus avancés. Il faut toutefois trouver un équilibre entre l’accompagnement des élèves d’un même niveau et l’intervention en grand groupe. Cela représente un défi pédagogique important pour l’enseignante, qui doit aussi maîtriser plusieurs programmes scolaires différents.

Autres modèles, les écoles communautaires sont apparues en Angleterre et aux États-Unis dans les années 1970. L’expression est utilisée une première fois dans un document de politique québécoise en 1982 pour désigner un carrefour où la communauté se donne à son école et où l’école se donne à sa communauté. Plusieurs modèles existent, mais ils ont en commun cette synergie entre l’école et sa communauté. L’école communautaire s’inscrit dans un ensemble de partenariats et les services qu’elle fournit visent à la fois l’apprentissage des élèves et le développement de la communauté : les partenaires soutiennent l’école dans sa mission et l’école contribue au développement de la communauté. Il y a partage de ressources, ce qui permet des économies financières appréciables. Au-delà du projet éducatif que chaque école se donne, il existe une philosophie éducative à laquelle l’école et ses partenaires se rallient. L’école communautaire est ainsi un carrefour de valeurs partagées.

 

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