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L’Attila des oléoducs

Par Patricia Posadas le 2016/09
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L’Attila des oléoducs

Par Patricia Posadas le 2016/09

Là où mon cheval passe, l’herbe ne repousse plus.

-Attila

De retour de Montréal, je traverse lentement ce pays si beau à bord d’un des rares autobus qui desservent les régions. Je vois lefleuve, les rivières, les grands champs, les forêts. Toute cette beauté exaltée par les chaleurs du mois d’août. Et je tente d’imaginer ce territoire traversé, percé, violé par le plus grand et le plus terrifiant des oléoducs. L’Attila des oléoducs!

4 600 km de tuyaux par lesquels transitera 1,1 million de barils de pétrole dilué par jour pendant 40 ans! Pour alimenter ce boyau monstrueux, les pétrolières augmenteront leur production de telle sorte que l’ensemble, exploitation et transport, générera 32 millions de tonnes de CO2 par année (ce qui équivaut à rajouter 7 millions de véhicules de plus chaque année, pendant 40 ans)1.

Ce boyau monstrueux traversera 830 cours d’eau (dont la rivière des Outaouais et le fleuve Saint-Laurent), menacera par le fait même l’eau potable de 5 millions de Canadiennes et de Canadiens. Il traversera des réserves fauniques, des terres agricoles, des forêts. Il longera des villes et des villages, car nul obstacle, naturel ou humain, n’arrêtera la volonté des pétrolières d’exporter leur pétrole extrême, même si tout le monde sait maintenant, avec certitude, que le destin des hommes, et de la vie sur terre, est hypothéqué si l’on continue à consommer les énergies fossiles au rythme actuel.

Les déversements de Kalamazoo (2010) et en Saskatchewan cette année prouvent que la surveillance est inadéquate et qu’on ne sait pas comment récupérer le pétrole des sables bitumineux qui coule et nappe le fond des rivières et des lacs.

À la COP21, nos premiers ministres ont signé un traité inerte en se faisant passer pour des défenseurs de l’environnement. Pourtant, Trudeau soutient Énergie Est, même si ce projet contredit sa propre parole et, pour nous rassurer, il confie son analyse à un organisme, l’Office national de l’énergie (ONÉ), dont on sait qu’il est favorable à l’industrie des hydrocarbures. Le gouvernement Couillard, pour sa part, s’apprête à promulguer une loi qui donnera tout pouvoir aux pétrolières.

Dernièrement, des centrales syndicales ont pris position contre cet oléoduc, assurant que les emplois de demain exigent une transition énergétique. L’armée canadienne elle-même se questionne sur la sécurité du projet, mais elle peine à obtenir des réponses de la part d’Énergie Est, car cette compagnie méprise tout le monde, forte du soutien de nos premiers ministres inféodés à la cause pétrolière.

Attila a peut-être envahi l’Europe grâce à la propagande et à l’ignorance, mais les temps ont changé. Nous savons qu’Énergie Est menace notre air, notre eau, nos terres et, par le fait même, l’avenir de nos enfants.

Ainsi, notre lutte contre Énergie Est et contre le projet de loi 106 est un test citoyen fondamental. Cette lutte contribue à définir notre avenir commun.

1-Éric Pineault, Le piège Énergie Est, Écosociété, 2016, p. 16 à 19.

Patricia Posadas est membre du groupe citoyen Prospérité sans Pétrole.

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