
Lors de la séance du conseil des commissaires du 21 mars dernier, la Commission scolaire des Phares s’est engagée à ouvrir une école primaire alternative à Rimouski pour la rentrée scolaire 2017. Le principal obstacle à franchir était de lui trouver un lieu, un exercice qui se conjuguait bien avec la démarche de révision des quartiers à laquelle s’affairait la Commission scolaire. En effet, motivée par l’atteinte d’un équilibre budgétaire et la menace de tutelle qui pèse sur sa tête, elle cherchait à remplir ses bâtiments et à en liquider d’autres. Cet exercice avait permis d’envisager trois lieux intéressants pour loger l’école souhaitée par une centaine de parents rimouskois.
Au bout de presque deux ans de travaux conjoints avec la Commission scolaire, le groupe Développement d’une école primaire alternative à Rimouski (DÉPAR) s’est heurté à un nouvel enjeu. Le 13 mai dernier, les représentants du groupe ont été convoqués par les services éducatifs de la Commission scolaire pour une annonce inattendue : de nouveaux calculs financiers indiquaient des coûts trop élevés pour le projet, ce qui entraînait des déficits annuels récurrents. De ce fait, on annonçait que les services éducatifs ne recommanderaient pas aux commissaires d’aller de l’avant avec le projet d’école alternative.
Décontenancés par ce retournement inattendu, les représentants du groupe DÉPAR ont étudié toutes les pistes de développement envisagées au cours des derniers mois par leurs partenaires, les experts de la Commission scolaire. Ils ont aussi fait appel à d’autres experts de différents milieux afin de mieux comprendre les mécanismes complexes du financement ministériel et de l’organisation scolaire. Après ces recherches, une solution envisagée au départ et finalement écartée a été remise sur la table : la possibilité de créer une deuxième école dans un bâtiment existant dans lequel l’espace est disponible. Une solution qui réglerait l’enjeu du financement ministériel et qui serait parfaitement envisageable légalement. Or, la Commission scolaire affirme que cette option est impossible, voire illégale. Pourtant, rien dans la Loi sur l’instruction publique et la Loi sur les infrastructures n’indique qu’il est impossible de loger deux écoles dans une même bâtisse, comme cela se fait ailleurs au Québec. Alors que les membres du groupe DÉPAR demeurent convaincus qu’avec de la volonté et de la créativité, l’ouverture est toujours possible, la Commission confirmait son désir de se retirer, dans une résolution qu’elle a rendue publique le 20 juin dernier.
Il existe actuellement 32 écoles alternatives publiques au Québec, regroupées dans le Réseau des écoles publiques alternatives du Québec et situées autant en milieu urbain qu’en région : Abitibi-Témiscamingue, Mauricie, Montérégie, etc. Pourtant, on ne compte aucune école alternative entre Lévis et la Gaspésie.
Le projet d’école alternative de Rimouski a comme visée de susciter la créativité, de favoriser l’esprit critique, d’encourager la solidarité, la démocratie, la joie de vivre et le plaisir de vivre ensemble. Cette école se distingue par sa vision éducative où chaque élève chemine à son rythme autour de projets personnels et collectifs. L’apprenant devient ainsi activement engagé dans son processus d’apprentissage tout comme il est encouragé à le faire dans la vie de l’école. En somme, il participe à un milieu de vie savant et inspirant.
Les parents ont également un rôle important à jouer au sein de l’école. Ils sont considérés comme les premiers éducateurs de leurs enfants et travaillent de connivence avec des enseignants qualifiés et passionnés qui accompagnent tout un chacun.
En effet, n’est-il pas illusoire de chercher à faire avancer tous les élèves à la même vitesse? L’école alternative se donne des modalités évaluatives qualitatives et formatives qui permettent de mesurer le progrès en fonction de défis et d’objectifs propres à chacun, à l’abri de la comparaison avec les pairs.
On peut être d’accord ou non avec une telle vision de la pédagogie, mais il paraît nécessaire de continuer à développer une offre diversifiée dans notre Commission scolaire, au même titre que le sont les programmes de sports-études ou de concentration artistique. Si l’éducation est l’un des piliers de la société, offrons-nous la liberté de la choisir.
Malheureusement, l’heure n’est décidément pas à la réjouissance alors que les services aux élèves sont directement amputés. Aussi faut-il désormais croiser les doigts pour que nos enfants ne rencontrent pas de problèmes dans leur parcours scolaire, puisqu’ils se retrouveront passablement laissés à eux-mêmes, pris au piège d’un système qui épuise ses profs. « L’école à bout de bras », scandions-nous en ce début d’année scolaire à la grandeur du Québec!
Le groupe DÉPAR n’entend pas se laisser intimider par la dernière résolution du conseil des commissaires et continuera d’explorer les différents recours ainsi que les modèles à envisager pour une possible ouverture en 2017.