
Lapin Lapin est une drôle de pièce de théâtre. C’est d’abord l’histoire d’une famille modeste, mais solidaire, les Lapin. En raison d’une série d’événements à la fois loufoques et tragiques, les Lapin se trouvent réunis dans un deux pièces et demie. Ce texte, c’est Coline Serreau qui l’a écrit, en 1986. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il y a plus de 25 ans, ce texte est tombé dans les mains de Denis LeBlond, auteur et metteur en scène rimouskois.
Denis LeBlond est l’un des fondateurs du Théâtre les gens d’en bas, il en a assuré la codirection artistique au côté d’Eudore Belzile de 1984 à 1987. En 2015, alors que le théâtre est à la recherche d’un nouveau projet, Denis LeBlond lit une chronique dans Le Devoir qui traite d’une adaptation québécoise de Lapin Lapin. Lui revient alors à la mémoire ce vieux rêve de mettre en scène cette pièce. En compagnie d’Eudore Belzile à la direction artistique, Denis se lance dans une adaptation linguistique du texte. Il se dit lui-même « passionné des casse-tête ». Quand on lui demande quels ont été les défis dans ce travail de transformation, il parle bien sûr du grand nombre de personnages qui prennent vie dans ce texte et de la richesse des nombreuses scènes dans lesquelles il a dû opérer des coupures afin de pouvoir présenter une pièce d’une heure trente. Mais son plus grand défi a été de mettre en scène une pièce dans un vocabulaire populaire. La langue doit être vivante, aussi vivante que puisse l’être le théâtre.
« Cette pièce, c’est une famille qui a la vie aux tripes », annonce Denis. Elle prône un discours d’émancipation des femmes, la solidarité, l’humour. Lapin Lapin est un spectacle communautaire, au sein duquel des acteurs non professionnels bénéficient d’un encadrement professionnel. C’est ça, le Théâtre les gens d’en bas : la rigueur permet, tout particulièrement aux jeunes acteurs, de comprendre et de transmettre la dynamique et la discipline qu’exige le théâtre professionnel.
« Faut que ça soit démoniaque! » lance Denis à son équipe, tandis que les acteurs dansent le scrupuleux ballet de la mise en scène. Chaque acteur tricote sa partie afin que la pièce tienne en un seul morceau cohérent. De la gestion du nombre de verres sur la table au calcul de fourchettes à laisser sur le comptoir pour la prochaine scène, rien ne doit traîner, tout doit être chorégraphié.
Certains membres de la troupe n’ont pas encore vingt ans. Ils sont beaux et persévérants. D’autres, plus âgés, tout aussi lumineux, ont peu, voire pas d’expérience. Et pourtant, la qualité du jeu des acteurs en dit long sur les 180 heures de travail qu’ont nécessité les répétitions et la mise en scène.
Lapin Lapin reste dans la mémoire, comme une ritournelle. Elle satisfait une nécessité sociale : l’art comme lieu pour s’apprivoiser entre générations, tout autant que le besoin de se changer les idées, ensemble, grâce à une formidable création locale.
Lapin Lapin, un texte de Coline Serreau mis en scène par Denis LeBlond, sera présenté au Théâtre du Bic du 17 au 20 mai.