
Le 12 février dernier paraissait La tempête, deuxième roman de Gabriel Anctil, publié aux Éditions XYZ. Après un bel accueil par la critique et le public de Sur la 132, son premier roman, l’auteur, qui a habité au Bas-Saint-Laurent pendant quatre ans, fait un retour dans le temps en nous plongeant dans la noirceur de l’hiver 1998.
Divisée en quatre grands segments qui se déroulent du 7 au 10 janvier 1998, cette œuvre s’immisce dans le huis clos forcé de la famille Tétreault réfugiée chez Irène, la matriarche de la famille, dans le chic quartier d’Outremont à Montréal. Victime des pannes électriques causées par la fameuse crise du verglas, les membres de la famille Tétreault se voient forcés de se retrouver. Or, ces retrouvailles sont plutôt source d’angoisse pour Marie, la fille d’Irène. En effet, dès les premiers contacts entre les membres de la famille, le lecteur sent une grande tension : « Marie, pour une raison que son fils ignorait, avait toujours évité son frère comme la peste. »
Sont dépeints, tout au long du roman et de la « tempête », des personnages à fleur de peau, comme une Manon qui met la radio « au bout » afin de connaître les moindres détails de la crise ou un Arthur colérique, le fils d’Irène, qui rentre du travail en sacrant. Malgré ces tensions se déploie une tendre complicité entre Irène et son petit-fils Jean qui, au fil des confidences, cherche à percer certains mystères familiaux : les fantômes du passé de sa mère, les allées et venues de son père, le secret d’Arthur et de Manon, etc. Quant à Irène, personnage rassurant par excellence, elle est attentive au moindre besoin de sa famille : « Celle par qui arrivaient les sacs de chips, les petits gâteaux Vachon et les paparmanes par sacs complets. »
Le roman, bien ancré dans son époque et dans son milieu, use de références populaires comme le restaurant Saint-Hubert, la marque Vuarnet, l’émission La poule aux œufs d’or et l’actualité politique. L’auteur a d’ailleurs effectué de nombreuses recherches, notamment dans le récit L’enfer de glace. La tempête de verglas du siècle au jour le jour d’Éric Pier Sperandio, afin de reconstituer le plus fidèlement possible cette catastrophe naturelle. Ce travail a porté fruit, car un grand réalisme en émane au fil des pages.
Le contexte du confinement dans lequel évoluent les personnages souvent stéréotypés fait assurément émerger des anecdotes, des secrets, des souvenirs et des affrontements, que ce soit le nostalgique et fier Arthur qui raconte son passé de musicien et ses prouesses au travail ou Irène qui redécouvre son album de famille, tous s’ouvrent aux lecteurs. Cependant, l’auteur aurait eu avantage à jouer avec la suggestion pour laisser les actions parler au lieu de constamment expliquer.