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Un autre pas vers la dictature?

Par Marc Simard le 2014/05
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Un autre pas vers la dictature?

Par Marc Simard le 2014/05

Il est facile de couper le budget de Radio-Canada. Il y a là des millions de dollars qui servent à quoi finalement? On n’y produit rien de tangible. On n’y construit pas d’objets. On n’y transforme pas de matière première. Pas de profits en retour du 29 dollars que chaque Canadien y « investit » annuellement. Même pas de pétrole! En plus, les employés sont grassement payés et ont d’excellentes conditions de travail, des régimes de retraite, des assurances collectives, des enfants à l’université, des chalets dans les Laurentides, deux voitures et quoi d’autre?

On m’a mis en lock-out en 2002 alors que j’étais journaliste à la radio de Radio-Canada à Rouyn-Noranda. Sur le trottoir devant la petite station, avec des pancartes « Pour l’équité salariale avec nos collègues ontariens! », nous n’attirions pas la sympathie des passants qui, pour la plupart, peinaient à joindre les deux bouts. Dans ce contexte, comment faire comprendre à Stephen Harper et à la population l’importance de la SRC?

La direction de la société d’État annonçait tout récemment des compressions de 130 millions de dollars dans le budget de Radio-Canada et il y a fort à parier qu’au moment où vous lirez ceci, peu de gens en parleront encore. En deux semaines seulement après la nomination de Gaétan Barrette comme ministre de la Santé au Québec, plus de 10 000 personnes avaient signé une pétition en ligne lui demandant de perdre du poids. Une pétition contre les coupes à Radio-Canada a obtenu à peine 1 500 signatures (à la grandeur du Canada) en un mois…

Comme le gouvernement Harper ne semble comprendre que le langage de l’argent, inutile de faire la preuve que le savoir, la culture, l’information sont les pierres angulaires d’une société en santé. Misons plutôt sur le retour sur l’investissement, comme ils disent.

L’émission Enquête diffusée chaque semaine à la télévision écope sévèrement. Des 14 postes de journalistes qui tombent au combat, trois étaient affectés à cette émission. Enquête est sans doute le plus efficace chien de garde des finances publiques québécoises (et donc canadiennes) au sein des médias traditionnels. Ses journalistes ont révélé des dizaines de scandales au cours des dernières années, dont la collusion dans le domaine de la construction et les failles dans le financement des partis politiques. La création de la commission Charbonneau repose essentiellement sur le travail d’Enquête. L’exercice qui découlera de la commission permettra une meilleure gestion des deniers publics. Moins d’argent malhonnête, plus d’argent dans les poches des citoyens et dans les coffres de l’État.

Enquête a aussi lancé tout un pavé dans la mare en dévoilant le nom de ceux qui placent leur fortune dans des paradis fiscaux. Le retour sur l’investissement pour Ottawa est assez évident non?

L’Agence du revenu du Canada encaisse annuellement des millions de dollars en TPS sur les publicités diffusées à Radio-Canada pendant les heures de grande écoute. Or, si moins d’émissions sont produites, moins nombreuses seront les publicités. De plus, si la qualité des émissions n’est plus au rendez-vous, les cotes d’écoute n’y seront pas non plus. Conséquence directe : le prix des publicités sera moins élevé tout comme les revenus de l’État.

Il y a d’autres « retombées économiques » moins tangibles, mais aussi importantes à long terme. Radio-Canada produit, diffuse, récompense la création et en fait la promotion. Combien de séries télévisées, de films, de documentaires font le tour du monde grâce à la société d’État? Cette « promotion » attire les investisseurs étrangers, les touristes aussi!

Pour Stephen Harper, Radio-Canada est une entreprise. Le danger, c’est qu’il arrive à en convaincre la population. Désinformer les Canadiens, les tenir dans l’ignorance, censurer les journalistes, un pas de plus vers une dictature.

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