
J’habite un petit village où l’on vient d’annoncer la fermeture du centre de services Desjardins situé à Saint-Alexis-de-Matapédia, ainsi que ceux de deux villages voisins, Saint-François-d’Assise et L’Ascension-de-Patapédia. Ce dernier village est situé à 32 kilomètres de la caisse populaire la plus proche. Pour encaisser un chèque, un membre doit donc parcourir 64 kilomètres aller-retour.
Depuis l’annonce brutale de la fermeture des trois points de services lors de l’Assemblée générale annuelle de la Caisse populaire des Monts et Rivières, à laquelle étaient aussi présents quatre agents de sécurité, je me questionne sur ce qui se passe au Mouvement Desjardins. À la lumière de ce que je découvre, je réalise avec consternation que nous tous, sociétaires, caissiers, caissières, conseillers, conseillères, membres des conseils d’administration ainsi que tous les autres employés de la Caisse Desjardins, sommes à la merci d’une institution financière qui, en quelques années, est devenue une machine à faire de l’argent. Le but premier n’est plus de servir le client, mais de lui vendre des « produits financiers ». On demande toujours plus aux employés, plus de performance pour toujours plus, plus, plus de $ $ $ $ $ $ $ $ $ ! Oui, Desjardins s’implique dans la communauté en faisant des dons, mais cette aide est devenue le glaçage d’un gâteau empoisonné. Une coopérative financière n’est pas un organisme de charité ! La vision qui était celle d’une coopérative au service de ses membres a pris un virage qui prend de plus en plus l’allure d’un dérapage. La machine est trop grosse, trop gourmande et elle est en train de s’emballer.
Je réalise qu’à chaque étage de la pyramide, les employés sont continuellement sous pression et j’ai compris que « Conjuguer avoirs et êtres » veut dorénavant dire être plus performants (employés) pour avoir plus d’argent (patrons). J’ai aussi compris que « À travail égal, salaire égal » signifie travailler selon la formule de la « carotte ». Vous êtes gentils et vous nous faites faire des profits : on vous donne du bonbon (primes, bonus, billets de spectacles, soupers, tournois de golf, etc.) Vous n’êtes pas performants, on n’est pas contents : on vous donne du bâton !
Aujourd’hui, je m’adresse à vous tous, employés de la Caisse Desjardins, ainsi qu’à tous ses membres, jeunes et moins jeunes ; je m’adresse à votre gros bon sens et à votre conscience du cœur.
À vous, caissiers, caissières, en avez-vous assez de vous faire tasser, déplacer, replacer pour finalement être remplacés par des guichets automatiques ?
À vous, employés, en avez-vous assez de vous faire « presser comme des citrons » pour que chaque jour, chaque semaine, on extraie de vous le maximum ?
À vous, conseillères et conseillers financiers, en avez-vous assez d’être toujours en « mode performance » afin que ceux qui sont en haut de la pyramide, les patrons, se remplissent de plus en plus les poches à la sueur de votre front ?
À vous, directeurs et directrices, à qui on refile les « sales jobs » de fermetures de caisses et de points de services, en avez-vous assez d’être obligés de vous torturer l’esprit et de vous mettre à dos vos communautés afin de satisfaire aux demandes de plus en plus exigeantes de vos employeurs ?
À vous, cadres, en avez-vous assez d’être devenus complices d’un système qui vous fait manger dans sa main par toutes sortes de stratagèmes : cadeaux, primes sur le dos des sociétaires qui sont aussi vos concitoyens, vos amis et les membres de vos familles ?
À vous, Mme Leroux, présidente du Mouvement Desjardins, en avez-vous assez de faire enrager et suer les gens de nos villages, de nos quartiers, de nos villes par vos mesures de redressement ?
Un rappel : une coopérative est un mouvement composé de membres qui ont le droit de parole. Deux autres questions pour vous : êtes-vous à l’écoute de vos membres ? Si, comme on peut le lire dans votre plan de redressement et de coupure de services, votre salaire était de 1,9 million de dollars en 2011 et de 3,4 millions cette année, qu’en sera-t-il l’an prochain ?
Et finalement, à vous tous, sociétaires, membres de la Caisse : en avez-vous assez de vous faire marcher sur le corps par le rouleau compresseur qu’est devenu le Mouvement Desjardins ? En avez-vous assez de payer continuellement pour tous les services, retraits, transferts, études de dossier, etc. ? Réalisez-vous l’ampleur des sommes d’argent qui entrent chez Desjardins en une seule journée toutes les fois qu’on vient grignoter des frais de services sur vos transactions ?
Si vous en avez assez, commencez à dire tout haut ce que vous pensez tout bas. Levez-vous fièrement et parlez-en. Il est temps qu’on dénonce cette nouvelle forme de virus, de cancer, de corrosion mangeuse de chair qui s’est glissée dans les murs des Caisses Desjardins. « Une sauterelle sur une voie ferrée ne pourrait pas arrêter un train, mais un millier de sauterelles pourraient le faire ! »